Un groupe de Burkinabè résidant au Canada se prononce sur la situation nationale

| 09.02.2015
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Un groupe de Burkinabè résidant au Canada se prononce sur la situation nationale
© DR / Autre Presse
Un groupe de Burkinabè résidant au Canada se prononce sur la situation nationale
Selon les informations rapportées par les médias, le Régiment de Sécurité Présidentielle (R.S.P.) aurait interrompu un conseil des ministres le mercredi 04 février dernier, puis exigé une inamovibilité de ses membres ainsi que la nomination d'un certain nombre des leurs à des postes de commandement et la démission du premier ministre Yacouba Zida qui ne ferait plus leur affaire. Cette incursion des militaires du R.S.P. en conseil des ministres serait par ailleurs la deuxième du genre depuis la mise en place du gouvernement de transition. Le R.S.P. par ces agissements nous rappelle que nous avons « enterré le cadavre mais ses pieds sont toujours visibles ». Alors qu'on croyait s'être débarrassé du système Compaoré, il faut se rendre à l'évidence que nous sommes exposés à une rechute.


Cette situation provoquée par le R.S.P., aussi rocambolesque soit-elle, apparaît néanmoins comme le rayon de lumière jeté sur le fonctionnement de la transition depuis sa mise sur pied en novembre dernier. Il apparaît clairement que l'État du Burkina Faso est pris en otage par ce régiment dit de sécurité présidentielle. On comprend maintenant pourquoi le Président du Faso et le Premier Ministre prennent tour à tour des engagements devant le peuple, pour ensuite se dédire dans les faits, sans doute à cause des menaces nocturnes du R.S.P. On comprend aussi pourquoi, malgré les annonces tapageuses, aucun dossier judiciaire n'est encore ouvert ou rouvert sur les affaires Norbert Zongo, Thomas Sankara et celles plus récentes des martyrs des événements des 30, 31 octobre et 1er novembre 2014. Peut-on expliquer autrement le fait qu'aucune poursuite judiciaire n'ait été enclenchée jusque-là sur la corruption généralisée, les détournements de fonds et les crimes de sang du régime Compaoré ?

Ce comportement du R.S.P. est indigne de ceux qui portent l'uniforme de l'armée burkinabè. Il y a lieu de rappeler ici que la souveraineté, c'est-à-dire le droit exclusif d'exercer l'autorité politique, appartient au peuple burkinabè, qui a mis en place les institutions de la transition avec une maturité et dans un consensus si large que cela a surpris et imposé le respect partout dans le monde. Il est inadmissible qu'un groupe quelconque au sein de l'État puisse s'imaginer détenteur du droit d'obtenir ce qu'il veut, surtout sous la menace des armes. L'armée est censée garantir la sécurité du peuple contre les menaces extérieures et non interrompre le fonctionnement des institutions. Le Président du Faso est en outre le chef suprême des armées et tout refus d'obéissance à son égard est une trahison. Un groupe armé qui défend des intérêts autres que ceux du peuple n'est pas une armée, c'est une milice.

Cependant, ce qui vient de se produire n'est pas entièrement une surprise. La difficulté de conduire la transition avec l'existence du R.S.P. avait été anticipée mais la solution a été escamotée. Les dirigeants de la transition qui, pourtant, ont été investis au nom du peuple ont cru qu'ils pouvaient lui cacher la réalité de leur manque total de contrôle de l'appareil d'État. Au mieux, ils ont voulu procéder en douceur mais maintenant il est clair qu'il va falloir s'attaquer à l'une des tâches les plus difficiles de la transition qui est le démantèlement du R.S.P. Si les nouvelles sur les nominations des Colonels Boureima Kiéré et Moussa Céleste Coulibaly sont avérées, ce serait une erreur très grave de la part des autorités de la transition. Elles devraient, soit abdiquer si elles sont incapables de mener la transition, soit recourir au peuple pour qu'on résolve la question du R.S.P. une fois pour toute. Il n'est dans l'intérêt de personne de nuire à ceux qui ont simplement été affectés dans ce corps et qui suivent les ordres. On pourra donc le fusionner avec le reste de l'armée et lui assigner la mission de défense du territoire au même titre que les autres corps de l'armée.

Ironiquement, c'est le R.S.P. lui-même qui vient de signer par ces actes son arrêt de mort institutionnelle car il n'est pas concevable dans le contexte actuel que le pays puisse disposer d'une autorité pleine à la tête de l'État. Il est donc urgent que tous les Burkinabè démocrates et patriotes se mobilisent pour faire aboutir l'insurrection populaire en demandant la dissolution du R.S.P. et en exigeant Justice pour les martyrs des 30, 31 octobre et 1er novembre 2014 et pour tous les crimes de sang et économiques commis par Blaise Compaoré et son système.

Nous, Burkinabè vivant au Canada, lançons un appel à la mobilisation générale pour défendre les institutions par nous investies de la responsabilité de mener la transition à bout, et exiger d'elles la dissolution pure et simple du R.S.P. Aux partis politiques et organisations de la société civile, nous disons qu'il serait caduc d'organiser des élections si le président qui en est issu ne dispose pas de l'autorité nécessaire pour diriger le pays.

Nous devrons exiger ensemble :

  • une dissolution pure et simple du R.S.P.,
  • une réaffectation de tous les militaires du R.S.P. et sa substitution par une garde (police ou gendarmerie) plus respectueuse des institutions du Faso,
  • une action judiciaire impérative et crédible sur les crimes du régime Compaoré,
  • un agenda clair de la transition,
  • et enfin une fermeté et une transparence dans la gestion de la transition.

Ensemble, nous vaincrons !

Olivier Badolo
Babou Serge Bationo
Tankian Coulibaly
Zoumana Coulibaly
Alimata Diallo
Christophe Gamsonré
Alidou Koutou
Alidou Ouédraogo
Christine Paré
Elie Paré
Alexis Sanou
Mahamadi Savadogo
Téguewindé Sawadogo
Edmond Ziba
Hamado Zoungrana

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