Assise sur un chariot à bagages à quelques mètres de son comptoir d'enregistrement à l'aéroport parisien de Roissy, la Thaïlandaise Thapanat Rueangmanee, 25 ans, confie être «un peu nerveuse, comme la plupart de mes amis». Mais «pas le choix» pour cette sportive venue participer à un meeting d'athlétisme dans la banlieue parisienne: pour rentrer à Bangkok, «on ne peut pas prendre le bateau».
«Trois crashs en une semaine, ça commence à faire beaucoup», commentait pour sa part Hadjera Akli, 24 ans, venue accueillir de la famille d'Algérie à Roissy, l'un des deux aéroports de la capitale française. «Mais c'est un concours de circonstances», tentait-elle aussitôt de se convaincre.
Sur les forums internet, les peurs se réveillaient, comme pour Yoco, qui doit se rendre à Séoul en août. Elle «restait plutôt zen» jusque-là, mais avoue sur le site français crash-aerien.aero que «la trouille revient».
«En sécurité»
«Après trois tragédies sur une si courte période, beaucoup de gens vont bien entendu poser des questions sur la sécurité aérienne», a reconnu vendredi le directeur de l'Association internationale du transport aérien (IATA), Tony Tyler dans un communiqué. Mais «malgré les événements des sept derniers jours, on peut prendre l'avion en sécurité», assure-t-il.
Chaque fois que des accidents surviennent, la sonnerie du téléphone du Centre français de traitement de la peur de l'avion se fait plus insistante: «d'anciens stagiaires nous appellent parce qu'ils sont anxieux, ont des interrogations», raconte Xavier Tytelman, président du centre et ancien aviateur militaire. «On essaie de leur fournir des explications, de leur faire prendre du recul.»
Travail et famille
Dans ce centre créé en 2007, plusieurs centaines de personnes tentent de soigner leur phobie chaque année, déboursant 430 euros, parfois pris en charge par leur entreprise. Car la peur de l'avion peut être un «vrai frein à la progression professionnelle», note Xavier Tytelman.
«Certains démissionnent, n'arrivent pas à travailler.» Pour d'autres, cela crée une «souffrance familiale», explique le président, citant le cas de «gens expatriés qui ne rentrent pas pendant des années voir leur famille».
Pour apaiser les stagiaires, une psychologue les aide à ne pas se laisser envahir par les pensées négatives et à gérer leur anxiété, notamment par la respiration ventrale.
Taux de survie de 50%
«Il faut désamorcer tout ce qu'ils vont pouvoir voir dans les médias, les films», explique M. Tytelman. «Là, on a une succession d'accidents dans lesquels personne ne survit mais en général, le taux de survie dans un avion de ligne lors d'un crash qui fait au moins un mort est de 50%, alors que pour une voiture à 40 km/h, il y a 80% de mortalité», rappelle ce spécialiste en sécurité aérienne.
A Roissy, certains voyageurs tentaient de se montrer rationnels, à l'image du Parisien Gabriel Dulbecco, étudiant en partance pour la Chine: «c'est vrai qu'on peut vite devenir parano. Mais en même temps, il y a des milliers de vols tous les jours, ça se passe toujours bien».
D'autres étaient carrément fatalistes, comme Zohra, Algérienne de 52 ans: «on fait confiance à Dieu, c'est tout, si l'avion s'écrase c'est qu'il devait s'écraser».
(ats)