Les Etalons m’ont fait peur

| 14.10.2013
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Les Etalons m’ont fait peur
© DR / Autre Presse
Les Etalons m’ont fait peur
Depuis quelques jours, ce match Burkina-Algérie, comptant pour les barrages qualificatifs pour le mondial 2014, hantait mon esprit.
Je sais qu'en football, rien n'est gagné d'avance. Mais jamais les Etalons n'ont été si proches du but, si proches d'un mondial. Et ce 12 octobre, je suis au stade dès 13h 30 pour attendre le coup d'envoi à 16h. J'aperçois les nouveaux supporters algériens à la porte 18. Ils sont 1500 venus par 5 vols spéciaux. Avec eux, 78 journalistes et 60 de la délégation officielle. Que va-t-il se passer ? C'est plongé dans cette réflexion que l'arbitre zambien donne le coup d'envoi à 16h. Mon cœur bat. Il bat davantage quand je vois les Fennecs entamer la partie tambour battant. Il bat encore plus fort quand, à la 3e mn, la charnière centrale de la défense burkinabè se blesse seul. Le « Général Bako » est hors du terrain. Le banc de touche est inquiet. « Il ne le faut pas », me suis-je écrié sur le banc des sapeurs-pompiers où j'avais place. Le staff médical des Etalons est au four et au moulin pour requinquer cette cuisse qui ne doit pas lâcher. Très vite, Bako est de nouveau sur le terrain. Je respire. Le stade aussi. Mais peine perdue. A la 7e minute, Bako s'écroule sur le dos. Ses coéquipiers accourent, caressant le secret espoir qu'il n'abandonnera pas la bataille si précocement. Malheureusement, ce sera ainsi. Put est obligé de lancer le Toulousain, Steeve Yago, à la place du Lyonnais. Les Fennecs pressent, les Etalons souffrent et balancent de longues balles. Préjuce Nacoulma (12e mn) entre en dribbles à l'orée de la surface de réparation algérienne. C'est la faute. Beau coup franc que Aristide Bancé ne cadre pas. En 3 mn (16e, 17e et 19e), les Fennecs gagnent coup sur coup, trois corners. C'est trop. Je souffre. Ces 20 premières minutes sont un calvaire pour les Etalons. Mais le stade espère toujours. Moi aussi. Les Etalons obtiennent leur premier corner à la 21e minute. Dès lors, le jeu semble se stabiliser. Et voilà qu'à la 34e mn : Jonathan Pitroipa, dans un travail formidable, sert Bancé qui négocie encore mal le cadre. Le doute renaît dans les esprits. Mais je me convaincs que les Etalons marqueront dans les derniers instants. Le 4e juge assistant montre 2 mn de temps additionnel. C'est suffisant pour le frêle Pitroipa d'étaler toute sa classe. Ce jeune qui sait tout faire avec un ballon de football déchaîne. Cet artiste choisit ce dernier instant pour allier feintes et percées. L'homme à la prise de balle soudaine installe le cauchemar dans la défense algérienne. C'est du « Pit » ». Suite à un drible dont lui seul a le secret, la défense n'avait de solution que de l'abattre en pleine zone rouge. L'arbitre zambien ne tremble pas. J'applaudis, tout comme le stade. Ouf, on a notre but, au bon moment, me dis-je intérieurement. J'avais oublié qu'une chose est d'avoir un penalty, une autre est de savoir le transformer. Je vois Bancé se saisir du ballon. Il le dépose au point de penalty. Le stade retient son souffle. L'attaquant burkinabè s'élance et voit son tir repoussé par le portier algérien. Que se passe-t-il ? Pourquoi Bancé a-t-il raté ce shoot ? Oui, il peut rater, même dans des matches décisifs comme celui-là. Et des souvenirs me reviennent dans ce sens. Je revois le Ghanéen, Asamoah Gyan, qui a raté son pénalty à la Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud. C'était à la dernière seconde des prolongations du quart de finale entre le Ghana et l'Uruguay. Je revois le penalty raté de Didier Drogba en cours de match lors de la finale de Coupe d'Afrique des nations 2012 contre la Zambie. Je revois également le Camerounais, Pierre Womé, considéré comme le responsable de la non-qualification du Cameroun à la Coupe du monde 2006 parce qu'il a raté un penalty (envoyant la balle sur le poteau) à la dernière minute du dernier match de qualification face à l'Egypte. La palme dans ces séries de penalties ratés est détenue par qui, par l'Argentin Martin Palermo avec trois tentatives manquées dans une même rencontre. C'était en 1999. Ce jour-là, la Colombie a battu l'Argentine en match de poule (3-0) de la Copa América qui a lieu au Paraguay. Quatre penalties ont été ratés, dont trois par le seul Martin Palermo. Quand j'ai fini de revisiter tout cela, j'ai pardonné à Bancé. Et quand j'ai fini de lui pardonner, j'attendais le coup de sifflet de l'arbitre. Je vois le sociétaire du Horoya athlétic club de Guinée, le merveilleux latéral gauche, Jean-Noël Lingani, déborder dans son côté. Il lève la boule ronde et la place sur la tête en or du prodige Pitroipa qui bat le portier algérien. 1-0. Pitroipa met ainsi le stade en ébullition. Je saute de joie. Je crie de joie. Les supporters algériens sont plus que calmes. Mon souvenir me rappelle que c'est le même Lingani, dans le même geste, qui avait déposé cette balle victorieuse sur la tête de Préjuce Nacoulma le 7 septembre dernier contre le Gabon. Sacré Lingani !
Dans les vestiaires des Etalons, le capitaine Charles rappelle à ses camarades que rien n'est encore fait. « Les gars, on repart sur le terrain en se disant que c'est toujours 0 à 0 », avait-il lancé avant la reprise. Il a raison. Surtout quand 7 mn après la reprise, le virevoltant Sofiane Feghouli remet les pendules à l'heure pour l'Algérie. Incroyable ! Un match à rebondissements. Les Etalons ne se découragent point. C'est ainsi que Djakaridia Koné, dans un exploit personnel, remet tout un stade dans la liesse à travers ce tir croisé qui donne le 2-1. Rassuré, je cours vers la salle Sanou Mathias du stade pour préparer la conférence de presse après match. Une chaise entre mes mains et mon confrère Ronga de la RTB, la mine triste, fait confiance à ses écouteurs qui avait bouché ses oreilles : « Les Algériens viennent d'égaliser », lance-t-il tout en remuant sa tête. Quoi ? Je laisse la chaise tomber et cours vite vers la main courante pour en être plus convaincu. Le tableau d'affichage ne ment pas : 2-2. Il y a longtemps que les Etalons ont pris deux buts en un match. Il faut absolument gagner. Voilà pourquoi Put voit clair et lance le jeune Bertrand Traoré à la 75e mn. Son entrée éclaire davantage le jeu. Sa première frappe me rassure. On reprend encore espoir. Et vint cette 86e mn quand Bertrand tente une frappe lointaine qui est manipulée par la défense des Fennecs dans les 18 mètres, provoquant un second penalty. Le stade explose. Bancé est encore allé se saisir du ballon. Le stade proteste. Il veut un autre tireur. Bancé est ferme. Il s'exécute et faillit rater car le portier a touché le ballon qui finit par mourir dans les filets. L'essentiel, c'est le but. 3-2. L'essentiel, c'est la victoire déjà. C'est fait. Le reste, ce sont des détails. Bancé se réconcilie avec son public grâce à son courage. Les Fennecs protestent, mais l'arbitre reste ferme. Sept minutes d'arrêts de jeu. Le score ne changera pas. Les Etalons sont victorieux. Les Fennecs qui joueront le 19 novembre sans Adléne Guedioura sont prévenus. J'oubliais. L'Algérien Adlène, entré en remplacement d'Hassan Yebda à la 68e minute, a commis une grosse faute à la 72e minute. Il écope d'un avertissement (le 2e sur l'ensemble des éliminatoires) le privant ainsi du match retour à Blida. Fin du match. L'entraîneur algérien et ses joueurs veulent en finir avec l'arbitre. Tension sur la pelouse. Je regagne la salle pour la conférence de presse. Paul Put est là avec Charles. Vahid y envoie son adjoint seul, sans le capitaine. Pas grave. La victoire burkinabè est là. Bravo aux Etalons ! Mais que j'ai eu peur. Ce fut un match des nerfs. Je respire et continue d'espérer car rien n'est impossible à Blida le 19 novembre prochain. Absolument rien. Continuons d'y croire. Le mondial est toujours envisageable. La mobilisation doit se poursuivre. Le travail doit s'intensifier. Confiance, confiance, confiance !

Alexandre Le Grand ROUAMBA

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