J’étais fortement sollicité en Angleterre pendant ce mercato

| 18.02.2015
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J’étais fortement sollicité en Angleterre pendant ce mercato
© DR / Autre Presse
J’étais fortement sollicité en Angleterre pendant ce mercato
Alain Sibiri Traoré a afin pu parapher son contrat avec l'AS Monaco. Le club de la Principauté, qui suivait l'international burkinabè depuis deux ans, s'est finalement laissé convaincre par les qualités du gaucher burkinabè malgré une CAN mitigée avec sa sélection nationale. Alain Traoré redécouvrira ainsi l'hymne de la Ligue des champions avec sa nouvelle formation. Dans l'interview qu'il nous a accordée, il parle de la participation des Etalons à la CAN, de son approche avec Monaco et des ambitions avec sa nouvelle formation.


Sidwaya Sport (S.S.) :Quel bilan faites-vous de votre participation à cette CAN 2015 ?

Alain Sibiri Traoré (A.S.T.) : Je ne sais trop comment définir cette campagne africaine. Nous sommes parti avec beaucoup de confiance et nous avions fait une bonne préparation en Afrique du Sud. Nous sommes arrivés à Bata avec d'énormes ambitions. Mais on a été cueilli à froid dès le premier match et la confiance s'est vite effritée. On jouait maintenant avec la peur et c'était devenu compliqué. Personnellement, j'en tire tout de même une satisfaction au niveau de ma santé. J'ai pu enchaîner cinq matchs dont deux rencontres de préparation et trois matchs de compétition avec beaucoup de rythme. Sinon, je ne peux pas tirer de bilan positif pour cette CAN 2015. On était beaucoup attendus, le peuple croyait énormément en nous mais on n'a pas su relever le défi. Mais il ne faut pas tout remettre en question et tout jeter. Nous sommes aujourd'hui l'une des générations de joueurs burkinabè qui sommes allés en finale d'une Coupe d'Afrique des nations et depuis que nous sommes ensemble en équipe nationale, on arrive à qualifier l'équipe régulièrement pour les phases finales. Donc, tout n'est pas négatif. C'est dans les défaites qu'on arrive à construire quelque chose de solide. On a encore une marge de progression, c'est au peuple burkinabè d'être patient et tolérant car nous sommes sur la bonne voie.

S.S.: Vous avez été vice-champions d'Afrique en 2013. Ce costume n'a pas été dur à porter pour vous au cours de cette compétition ?

A.S.T. : Non, je ne le pense pas. Au contraire, cela était une pression positive pour le groupe. On était en pleine confiance, on pensait que rien ne pouvait nous arriver. Dans ces genres de compétition, il faut toujours être conscient du danger et nous n'avions pas pris la pleine mesure de cela. On n'avait pas tout réuni non plus pour pouvoir faire une bonne CAN. Pour aborder une telle compétition comme la CAN, il fallait que tout soit bien réuni et que tout soit bien organisé autour de l'équipe afin que l'équipe ne pense qu'au football. Pour cette compétition, on n'était pas tous concentrés sur le même but. Quand je parle de tous, je ne fais pas allusion aux joueurs mais plutôt de tout ce qui tourne autour de l'équipe.

S.S. : Peut-on insinuer que la Guinée équatoriale soit un pays maudit pour vous ?

A.S.T. : Je ne le pense pas ainsi. Ça fait deux CAN que l'on dispute dans ce pays et deux fois on n'arrive pas à s'extirper des phases de poule. Dans le style et dans le fond du jeu, on a produit du bon football mais on n'arrive pas à marquer des buts et à nous qualifier. Ceux qui ont la langue de bois diront que nous sommes maudits mais je ne partage pas cette opinion. C'est juste qu'on n'arrive pas à s'exprimer pleinement là-bas ou on manque un peu de chance. Franchement, quand je suis retourné en club, tout le monde m'a dit qu'on méritait mieux, qu'on avait un beau football, on a eu beaucoup d'occasions, les journalistes de Canal+ m'ont aussi relevé cela. Tous ceux qui ont suivi la CAN m'ont dit qu'on n'était pas ridicules. Ils m'ont encouragé et nous ont exhortés à poursuivre sur cette lancée car nous avons une bonne équipe et nous jouons bien au ballon. Seulement, il nous a manqué la chance. Quand je regarde également les feuilles de statistiques de nos matchs, en deux rencontres, on fait 39 tirs et 5 poteaux. Je ne pense pas savoir qu'il y ait une équipe qui ait pu faire cela cette saison.

S.S. : Pourtant, votre préparation à Nelspruit laissait présager d'une bonne campagne africaine pour vous ?

A.S.T. : C'est vrai, mais les matchs de préparation n'ont rien à voir avec la compétition. Certaines équipes ont perdu tous leurs matchs amicaux mais pendant la compétition, elles ont montré un tout autre visage. C'est le cas de la Côte d'Ivoire qui a perdu contre les Espoirs de la Suède et aujourd'hui, elle est en finale de la CAN. C'est le jour et la nuit entre un match amical et une compétition internationale de haut niveau. On ne peut pas comparer ces choses. C'est bien de gagner les matchs amicaux pour accumuler la confiance mais on sait très bien que tout cela n'a rien à voir avec la réalité.

S.S. : Est-ce le fait d'avoir été titulaire et de jouer l'entièreté des matchs de poule de la CAN qui a convaincu l'AS Monaco à vous engager ?

A.S.T. : Monaco me suit depuis longtemps et ça fait pratiquement deux ans que ce club voulait me recruter mais mes soucis sanitaires ont retardé les choses. Monaco était attentive à mes performances en Coupe d'Afrique pour voir si réellement j'avais bien récupéré et que j'avais mes qualités physiques surtout. Sinon le club connaissait auparavant mes qualités techniques et tactiques. Monaco attendait juste de me voir dans une compétition de haut niveau pour observer comment j'allais me comporter, comment j'allais jouer et comment cela allait se passer. Au bout du premier match, j'ai reçu le coup de fil du directeur sportif du club de la Principauté qui m'a dit qu'ils me suivent et de continuer sur ces performances. A la fin du second match, j'ai eu la confirmation que je rejoindrai cette formation car le directeur sportif m'a dit que je suis prêt et que je suis revenu à mon meilleur niveau. C'est quand même paradoxal car à écouter les spécialistes du football burkinabè et les médias, j'ai l'impression que j'ai fait une pâle Coupe d'Afrique. Imaginez un club du standing de Monaco qui regarde la Coupe d'Afrique et qui trouve que j'ai été bon et dans mon pays, on me critique que je n'ai pas été bon. Je ne comprends plus rien au sport (rire).

S.S. : Quel sentiment vous anime de rejoindre aujourd'hui un club du standing de Monaco ?

A.S.T. : C'est surtout un sentiment de fierté, d'abord pour moi et pour le Burkina Faso. Dans l'histoire du football burkinabè, il n'y a pas beaucoup de joueurs qui ont évolué dans des clubs de ce standing. Cela fait la fierté du Burkina et fera également que le Burkina sera reconnu à sa juste valeur. Car le pays possède des joueurs qui peuvent évoluer dans des clubs de top niveau en Europe. Tous ensemble, on doit faire en sorte et prier afin que tout se passe bien pour moi à Monaco car cela sera une vitrine pour tout le Burkina Faso.

S.S. : La concurrence sera davantage rude en Principauté. Vous sentez-vous apte à relever le défi ?

A.S.T. : C'est normal, dans toutes les équipes, il y a la concurrence et si je suis ici, je devrais m'attendre à une concurrence farouche. A moi maintenant de relever le défi. Si Monaco est venue me chercher, ce n'est pas pour venir voir les meubles, c'est pour venir apporter un plus pour le bon déroulement de l'équipe. Maintenant, ce ne sera pas facile, je le sais, car rien n'est facile dans la vie, il faut toujours se battre pour gagner sa place. Comme je l'ai fait à Auxerre et comme je l'ai toujours fait à Lorient, je ferai pareil à Monaco pour gagner ma place et honorer ma présence ici au sein du groupe.

S.S. : Monaco est une formation qui joue encore sur plusieurs tableaux. Est-ce une opportunité pour vous de vous montrer davantage au premier plan ?

A.S.T. : Forcément, car Monaco est un grand club qui joue encore sur tous les tableaux, c'est à moi de gagner ma place et me montrer aux yeux du monde entier. Tout le monde regarde la Ligue des champions, tout le monde regarde Monaco qui jouera les huitièmes de finale de cette compétition face à Arsenal. C'est forcément un très grand match qui sera vu par des milliers de personnes. C'est à moi de tout faire pour y participer et montrer de quoi je suis capable. Je me rappelle bien l'année où j'ai joué la Ligue des champions avec Auxerre, c'était l'une de mes meilleures années avant d'aborder ce nouveau challenge. Mais cela c'est du passé, aujourd'hui je suis à Monaco et je dois tout faire encore pour briller et donner une suite favorable à ma carrière. A la demi-finale de la Coupe de la ligue, j'ai eu la chance d'être dans le groupe. Il y a déjà une équipe en place, j'ai quelques jours d'entraînement avec l'équipe. Déjà débuter sur le banc, c'est non négligeable. J'essaierai de rentrer progressivement et d'apporter un plus à la suite des matchs.

S.S. : Hormis l'AS Monaco, y-a-t-il d'autres clubs qui étaient à vos trousses ?

A.S.T. : Bien sûr, pendant ce mercato, j'étais surtout sollicité en Angleterre. J'avais déjà trois bonnes pistes en Premier league mais comme Monaco me suivait depuis deux ans, je ne pouvais refuser leur offre. Aujourd'hui, on parle de Monaco comme quand on parlerait du PSG. En France, c'est ce qu'il y a de mieux actuellement et l'As Monaco fait partie du top 10 européen. Je ne pouvais donc pas refuser Monaco pour aller en Angleterre.

S.S. : Les Etalons sont-ils toujours aujourd'hui un bon tremplin pour les joueurs burkinabè ?

A.S.T. : Je ne sais pas si on pourrait parler de tremplin, l'équipe nationale est exceptionnelle. Elle reste une vitrine pour les jeunes footballeurs burkinabè. On ne pourra jamais refuser une sélection. Quand le pays t'appelle, c'est pour venir honorer les couleurs nationales en tout donnant. L'équipe nationale est et restera toujours le top des tops. Dans tous les pays du monde, les sélections sont respectées et restent toujours une vitrine pour tous les sportifs.

S.S. : Comment faire pour que les Etalons retrouvent leur lustre d'antan après cette CAN calamiteuse ?

A.S.T. : Aujourd'hui, on a un niveau supérieur à celui de 2013. Je parle en termes de football pur et non en termes de résultat. Quand on prend nos matchs en 2015 comparés à ceux de 2013, on a plus de variantes accompagnées d'un large éventail dans le jeu. Sauf qu'en 2015, il nous a manqué la réussite. C'est là la différence entre 2013 et 2015. On a plus de possession de balle cette année qu'il y a deux ans et on réussit plus de passes en sus. On ne régresse pas. Mieux, nous progressons. Malheureusement, certaines personnes ne retiennent que les résultats et les victoires. Pour garder la même philosophie dans le jeu, il faut continuer à travailler, faire le dos rond et ne pas s'occuper de nos détracteurs. En football, il y a des hauts et des bas, aujourd'hui, nous sommes dans le bas et c'est à nous de tout faire pour remonter la pente. Et cela passe par une victoire dès le prochain match. La Côte d'Ivoire a été fortement critiquée, elle a eu du mal à se qualifier et aujourd'hui, elle joue la finale (ndlr : interview réalisée le jeudi 5 février). Tout est oublié. Quand on voit la Côte d'Ivoire évoluer, ce n'est pas esthétique mais elle gagne et c'est ce que les gens retiennent. On va faire le dos rond et travailler. Je voudrais profiter de l'opportunité pour apporter un éclairci sur certaines choses. Après mon départ de la CAN, j'ai appris que j'ai été victime d'une agression de supporters. Personnellement, je ne suis pas un habitué des maquis et tout le monde le sait car on ne me voit jamais. A forte raison me pavaner dans un maquis après un échec dans une coupe d'Afrique. Je demande à Salif Kaboré, votre collègue de Ouaga FM de rectifier son erreur. Ce n'est pas parce qu'un joueur a refusé une interview qu'il peut se permettre de diffuser n'importe quoi pour la population. C'était juste une parenthèse pour clarifier les choses.

S.S. : Faire le dos rond, selon vous, c'est avec Paul Put ou un autre technicien ?

A.S.T. : Franchement, c'est une décision qui ne vient pas de moi. Personnellement, je ne suis pas pour un perpétuel changement. Que ce soit avec Duarte quand on s'est fait éliminer en 2012 ou cette fois encore, je dis haut et fort que je ne suis pas fan des changements, je préfère la continuité car ça paie. En tant qu'acteur, on ne peut pas décider. Il y a des gens compétents et mieux qualifiés dans le domaine pour examiner et analyser. Notre rôle, c'est d'être sur le terrain et jouer au ballon. C'est ce qui nous a beaucoup manqué car nous ne sommes pas restés dans notre registre de footballeurs. On a voulu tout régler nous-mêmes et être sur le terrain en même temps et cela nous a coûté la lucidité et la réussite. Pour résumer, il nous a manqué ce petit plus qui fait qu'on gagne un match. On a mis tout cela de côté et on était en train de discuter avec les dirigeants et se plaindre de gauche à droite et au final, on rentre à la maison bredouille. Je préfère aujourd'hui rester dans mon cadre de footballeur et peu importe ce qui va se passer, je demeure à la disposition de l'équipe nationale.

S.S. : Vous êtes adulé par le peuple burkinabè, quelle adresse avez-vous à son égard ?

A.S.T. : Je suis triste et déçu de ce que nous aurions pu lui servir à la CAN. Ce sont des choses qui arrivent dans la vie et l'erreur est humaine. Je pense qu'on mérite le pardon du peuple. Je demande aux supporters de prier pour tous les joueurs de l'équipe nationale afin que beaucoup trouvent un bon club et y jouent régulièrement pour bien finir la saison et repartir sur de bonnes bases.

S.S. : Votre favori pour cette compétition ?

A.S.T. : Je verrai bien Ghana # Côte d'Ivoire en finale et que le meilleur gagne après. J'ai mon ami et frère Jordan Ayew qui est mon pote de tous les jours à Lorient. Côté ivoiriens, j'ai Max Gradel et surtout Salomon Kalou qui me prend comme un petit frère. Je suis également ami avec le coach ivoirien Hervé Renard. Mon cœur balance et je souhaite que le meilleur gagne. Je demande au peuple burkinabè de prier pour moi pour ma réussite avec Monaco.

Entretien réalisé par
Béranger ILBOUDO

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