Ouahigouya : Les transporteurs acceptent enfin d’intégrer la gare routière

| 28.08.2013
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Ouahigouya : Les transporteurs acceptent enfin d’intégrer la gare routière
© DR / Autre Presse
Ouahigouya : Les transporteurs acceptent enfin d’intégrer la gare routière
« Ouahigouya : les transporteurs refusent d'intégrer la nouvelle gare routière », ainsi titrions-nous dans notre édition du 3 août 2011. Les transporteurs issus des différents syndicats ne parlaient plus le même langage que les autorités municipales. Du coup, les nombreux appels de ces dernières de l'époque visant à ramener les transporteurs à de meilleurs sentiments, sont tombés dans l'oreille d'un sourd. Les partenaires financiers, eux, regardaient de loin les protagonistes, mais n'étaient pas indifférents. Dès sa prise de fonction, le nouveau maire de la ville, Gilbert Noël Ouédraogo, se donnait tant de priorités parmi lesquelles l'ouverture effective de la gare routière. Le pari était risqué mais les démarches s'avèrent aujourd'hui payantes. Après de nombreuses négociations, et malgré l'hostililité farouche de certains extrémistes, la mise en exploitation de la nouvelle gare est devenue une réalité. L'heureux aboutissement est intervenu le 22 août dernier en présence des vieux routiers du monde des transports, mais également du ministre délégué chargé des Transports, Baba Diémé.

La situation de la nouvelle gare routière de Ouahigouya, sans être catastrophique, était tout de même préoccupante. Au fait, il y avait les pessimistes pour lesquels « la construction de la gare était politique, et il lui fallait un remède politique ». Il y avait les fatalistes qui évoquaient « l'éventualité de voir la gare se transformer en un marché secondaire de Ouahigouya ».

Et si la villa du maire faisait face à un déguerpissement ?

Mais il y avait aussi les optimistes convaincus qui croyaient, « qu'il pleuve ou qu'il neige, que les différentes parties n'ont d'autre choix que de s'entendre. La gare fonctionnera, tôt ou tard ». Durant deux ans, un véritable dialogue de sourds s'était instauré entre les autorités communales et les syndicats des transporteurs. Des divergences de fond ont opposé les deux parties, notamment le refus des transporteurs d'intégrer la nouvelle gare, parce que, disaient-ils, la construction du joyau s'est faite de façon unilatérale. Résultat de cette entente empoisonnée : tout le monde avait fini par ne rien comprendre de ce qui bloque véritablement l'inauguration de cet espace. Le principal partenaire qui est la coopération suisse s'était rendu compte de la complexité du malentendu. A Ouahigouya, l'on avait presque oublié l'existence de la bâtisse. On en parlait peu si bien que personne ne voulait écouter lorsqu'il s'agissait d'évoquer le sujet de la gare. Plus de deux ans après, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts. La mairie a changé de mains. Abdoulaye Sougouri a passé le flambeau à Gilbert Noël Ouédraogo qui, dès son entrée en fonction, promettait de rencontrer tous les acteurs en vue de renouer le fil du dialogue. Au regard du pourrissement de la situation, nombreux étaient ceux qui voyaient la tâche du maire ardue, voire dangereuse. Les radicaux les plus irréductibles des transporteurs ne se privaient pas de rappeler à qui voulait l'entendre que « Si Gilbert veut terminer son mandat, il n'a qu'à cesser d'évoquer le problème de la gare ». Comparaison d'un transporteur : « A supposer qu'on dise à Gilbert que sa maison située au secteur 2 est concernée par un déguerpissement quelconque. Va-t-il l'accepter facilement ? Si la gare déménage, il y aura des familles affamées. Voilà pourquoi, nous refusons qu'on nous déloge d'ici ». Voilà que, de discussions en discussions, les responsables de la mairie et les responsables des syndicats, toutes tendances confondues, ont décidé de s'entendre. Pour s'en convaincre, les représentants de tous les syndicats étaient présents à la cérémonie marquant la mise en exploitation de l'infrastructure. Le parrain de la cérémonie, Amadé Bangrin Ouédraogo, a tenu un langage de vérité aux acteurs en ces termes : « Ce qui grandit Ouahigouya et ses habitants, c'est l'entente. Evitons la logique du pire. Que n'a-t-on pas dit lorsqu'il s'est agi de demander aux transporteurs de rejoindre l'ancienne gare ? A l'époque, on a même dit que l'endroit était hanté, qu'il était sale... Mettez-vous en tête qu'un jour, l'on vous demandera encore de quitter celle que nous inaugurons aujourd'hui ». Le patron de la défunte STMB, Amadé Bangrin Ouédraogo, a pris le soin de citer nommément les vieux routiers (vivants ou non) du transport au Yatenga. D'ailleurs, une minute de silence a été observée pour rendre hommage à El Hadj Salif Déré Ouédraogo. Le ministre délégué aux Transports, Baba Diémé, n'a pas hésité un seul instant à parler de « long et tumultueux processus. » Le maire de Ouahigouya, tout heureux de voir l'aboutissement consentant du processus, reste pourtant prudent. En effet, une période transitoire de 3 mois a été instaurée en vue de permettre aux transporteurs de s'installer véritablement. Alors que la nouvelle gare routière était en effervescence, l'ancienne connaissait un mouvement inverse. Les forces de l'ordre y avaient pris position, question de sécuriser la zone et de dissuader toute tentative de sabotage. Lorsque nous nous y sommes rendus le mardi 27 août 2013, presque la totalité des installations étaient déjà démolies. Les forces de l'ordre n'y siègent plus. Les vendeurs ambulants et autres gérants de kiosques se refusent à tout commentaire. Sont-ils favorables ou hostiles à cette nouvelle donne ? Dans cette ville de Ouahigouya, pétrie de mystères, il est difficile de répondre à la question. Quelle que soit la réponse, il apparait plus jamais que le processus est engagé et il semble irréversible.

Naaba Kiiba empoche les 10 000 F CFA d'un chanteur

Dans sa prise de parole au nom de tous les syndicats, le vétéran du commerce et des transports, le vieux Aly Gourga Sawadogo, a été plus que pragmatique. Tout en se félicitant de cette mise en route de la gare, il en a profité pour demander à tous les acteurs d'être conséquents avec eux-mêmes. En clair, il veut que tous les acteurs travaillent, main dans la main, pour un rayonnement du monde des transports au Yatenga. Tout le monde ou presque l'espère beaucoup. Aussi, la présence à la cérémonie de Sa Majesté Naaba Kiiba lui a donné une autre solennité. Mieux, un fait rare s'est même produit pendant la cérémonie. En effet, un chanteur traditionnel du nom de Jérémie de Taonsongo qui faisait les éloges de Sa Majesté a contraint le Roi de lui remettre la somme de dix mille francs CFA. L'étonnement était grand dans l'assistance qui venait d'être témoin d'un fait, pas insolite, mais carrément rare. Le geste du Roi des Rois du Yatenga a fait dire à beaucoup que l'ouverture de la gare augure un lendemain meilleur. Quelques minutes après la générosité de Sa Majesté, c'est au tour de Aly Gourga Sawadogo de mettre la main à la poche et d'en ressortir un billet craquant de dix mille francs CFA. En signe de respect, il le remet à Sa Majesté afin qu'il l'ajoute à Jérémie de Taonsongo. Naaba Kiiba récupère le billet, le présente au public et l'empoche allégrement. Cet autre fait, celui-là insolite, a suscité un long rire auprès de l'assistance. Cette bonne humeur veut laisser croire que cette fois-ci est la bonne. On se rappelle qu'en 2011, une cérémonie similaire avait eu lieu dans l'enceinte de la gare. La suite, on la connaît. Commentaire d'un observateur : « Cette fois-ci, les transporteurs ont le dos au mur et ils ont intérêt à intégrer la gare. Un commerçant conclut : « A l'ancienne gare, beaucoup de transporteurs avaient le monopole de certains axes routiers. Avec cette nouvelle gare, toute personne qui en a les moyens peut payer son véhicule et le mettre sur l'axe qu'il veut ».

Hamed NABALMA

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