Cette mesure, que d’autres viendront peut-être renforcer dans les jours à venir, notamment à l’approche des élections, est d’autant plus opportune que des soldats putschistes de l’ex-RSP sont toujours en cavale et peuvent constituer une menace dont on ignore par quelle voie elle passerait pour nuire.
L’interdiction de se déplacer avec des véhicules à vitres teintées n’atteindra cependant ses objectifs que si elle est comprise, acceptée et surtout observée par les Burkinabè qui en sont les premiers bénéficiaires. Pour ce faire, la mise en application de la mesure sécuritaire doit être stricte, soit, mais stratégiquement bien pensée pour rencontrer le moins de résistance possible et être par conséquent efficace. Il est évident que le sentiment et le contexte d’exacerbation de l’insécurité se sont brusquement installés avec le coup d’Etat inattendu. Si bien que l’autorité a voulu prendre promptement et diligemment le taureau par les cornes. Il faut néanmoins remarquer que la désapprobation de certains conducteurs de véhicules à vitres colorées interpellés est révélatrice d’un certain malaise qui risque de troubler la bonne application de la disposition. Certes, des responsables de la police ont promis que la mesure ne sera pas aveuglement appliquée mais fera la distinction entre les vitres teintées d’origine et celles faites après l’acquisition du véhicule.
Force est cependant de reconnaître que sur le terrain, la discrimination utile n’est pas la chose la mieux partagée. Cela est-il dû au fait que les agents de sécurité ne soient pas suffisamment avertis pour faire la part entre les vitres teintées depuis l’usine et celles teintées après achat à l’intérieur du pays? Et pourquoi, au cas où il était interdit de circuler avec des vitres teintées même avant la prise de la récente mesure, avoir laissé ces véhicules franchir les frontières, être commercialisés, dédouanés, passer avec succès la visite technique et être immatriculés?
Quoi qu’il en soit, pour éviter de faire des victimes inutiles, il faut éviter de s’affoler et d’y mettre trop de zèle, même si le contexte n’est pas très propice à la grande sérénité. Accordons aux uns et aux autres le temps nécessaire pour s’approprier les tenants et les aboutissants de la mesure. Permettons à ceux qui ont acheté innocemment des véhicules aux vitres teintées et qui n’ont que ceux-ci comme moyen de déplacement de disposer d’un délai raisonnable pour se conformer aux textes nouvellement pris. Il est vrai que la loi, c’est la loi et nul n’est censé l’ignorer, tout comme en matière de sécurité il n’y a pas de temps à perdre, car les individus mal intentionnés pourront profiter du répit pour opérer.
Mais rien ne sert de courir si l’on n’est pas parti à point. Car, à côté de ceux qui teintent leurs vitres ou les recouvrent de plastiques fumés pour passer inaperçus et commettre de basses besognes, il y a aussi ceux qui le font juste pour amoindrir l’effet de la canicule engendrée par le soleil ardent du Sahel, et d’économiser ainsi l’énergie utilisée par la climatisation de leur véhicule. Les populations ont du reste intérêt à collaborer avec les forces de sécurité qui ont multiplié les contrôles sur les axes routiers pour assurer notre sécurité à tous. Ceux qui ont teinté les vitres de leur voiture juste pour se la jouer doivent entendre raison, et les agents de sécurité user de tact pour réussir leur mission.
Les Echos du Faso