Boulevard Charles-de-Gaulle. Nous sommes à l’intersection entre l’alimentation La Surface et la station Shell, au quartier Zogona de Ouagadougou. Il est 7h13 mn, le 9 juin 2016. Les forces de sécurité sont mobilisées. Leur nombre impressionnant sur la voie, renseigne sur la délicatesse de leur mission : mettre au pas tous les usagers inciviques sur cette partie du boulevard dédié à l’ex-président français. Déjà, des usagers en n’ont payé les frais. 13 motos et 2 voitures sont immobilisées pour diverses infractions à notre arrivée. Mady Singbéogo, habitant le quartier Djikofè( secteur n°51) sera obligé de continuer son chemin en taxi ou à pied. Se dirigeant vers le centre-ville, il brûle le feu. Arrêté par la police, il justifie son acte : «je n’aime pas brûler le feu. C’est par ce que je suis pressé aujourd’hui d’arriver en ville pour légaliser des papiers que je l’ai fait». ne dit-on pas que trop pressé n’arrive qu’en retard ? En tous cas, M. Singbéogo ne dira pas le contraire. A bord de sa voiture, M. X qui a requis l’anonymat est interpellé pour absence de plaque d’immatriculation à l’avant de son véhicule. Un papillon lui est remis pour s’acquitter de la somme de 25 000 F CFA avant de rentrer en possession de sa voiture. En moins de 20 mn, en ce lieu de forte fréquentation de motocyclettes, des usagers indélicats sont arrêtés, les uns après les autres. Halima Sawadogo est aussi verbalisée pour absence de plaque d’immatriculation. Visiblement surprise d’être interpellée, elle quitte son véhicule de couleur rouge. En pleurs, elle dit ne pas comprendre pourquoi, elle ne peut plus poursuivre son chemin pour arriver à son service. «Je n’ai pas brûlé le feu et on m’arrête. Je ne sais pas pourquoi on me retire mon véhicule?», murmure-t-elle en pleurs. Qu’à cela ne tienne, un papillon lui est remis pour règlement dans une semaine. Après l’intersection de La Surface, direction l’hôpital pédiatrique Charles-de-Gaulle. Comme de petits poissons, les «brûleurs de feu» tombent dans le filet des éléments postés pour réguler la circulation. «J’étais devant le feu, et on m’a dit de venir chercher ma moto dans sept jours», révèle Daouda Tiendrebéogo. Ce délai, selon lui, n’est pas raisonnable. Etudiant en 3e année de Sciences économiques et de gestion, il habite le quartier Kossodo. «Je serai obligé de me rendre au cours au SIAO en bus. J’ai tenté de négocier. Mais, ils n’ont pas accepté de me comprendre», indique-t-il l’air découragé. Cuisinière au Médiateur du Faso, Thérèse Kafando est prise en flagrant délit de passer le feu rouge. Pour elle, son acte n’est pas intentionnel. «Je suis allé voir mon papa qui est malade. A mon retour, lorsque je me suis rendue compte que, je suis à un feu, je l’avais déjà brûlé», raconte-t-elle. Tout en demandant la clémence des forces de sécurité, elle jure la main sur le cœur que son acte ne se reproduira plus.
Réprimer les inciviques
Une semaine sans moyen de déplacement a été un calvaire pour Hassane Tiendrebéogo. Interpellé, le jeudi 2 juin 2016, devant l’ancienne Assemblée nationale, il dit avoir vécu des moments difficiles. «Ce n’est pas facile d’être sans moto pendant sept jours. Maintenant, même s’il n y a pas de policier au feu, je vais m’arrêter», affirme Hassane Tiendrebéogo. Conscient que brûler le feu n’est pas un comportement citoyen, néanmoins, il plaide pour la réduction du délai de retrait des engins. Avant, le retrait de tout engin, un tour à la gendarmerie et à la police est nécessaire pour connaître son identité et vérifier, s’il n’a pas été volé. «Cette opération de la police est bien, parce qu’elle va contribuer à réduire les accidents», justifie M. Tiendrebéogo. Les engins saisis sont «parqués» en divers lieux : au commissariat central de police de Ouagadougou, au camp CRS, aux commissariats d’arrondissements et Ouaga 2000. L’opération initiée depuis le 31 mai dernier, vise à lutter contre l’incivisme routier, réprimer les contrevenants et sensibiliser les usagers de la route, confie le chef de service régional de la circulation et de la sécurité routière du Centre, Bangré Kaboré. Selon M. Kaboré, au 8 juin dernier, 995 engins à deux roues, 129 véhicules et 10 tricycles ont été saisis. Au titre des documents, 123 permis de conduire, 81 cartes grises ont été récupérées. Les véhicules ou engins saisis, a-t-il dit, l’ont été pour défaut de plaques d’immatriculation et non-respect de feux tricolores. Et tout contrevenant devrait débourser la somme de 6 000 F CFA pour récupérer son engin, une semaine après l’infraction. «S’il y a cumul d’infractions, l’amende peut aller au double», dit-il. Idem pour les véhicules qui doivent payer 25 000 F CFA pour défaut de plaque d’immatriculation. «Après le contrôle, si vous n’avez pas de visite technique, carte grise, l’assurance...toutes ces infractions sont comptabilisés. C’est pourquoi, le montant des contraventions varient», précise-t-il. Depuis le début de l’opération, les actes d’incivisme dans la circulation ont baissé, aux dires de M. Bangré Kaboré. Il en veut pour preuve, le nombre d’engins saisis qui est passé de 364 au premier jour de l’opération à 120, 90...les jours suivants. Il confirme également que cette opération a permis de récupérer deux engins volés dont l’un au préjudice d’une étudiante. «Son engin lui a été restitué le 8 juin dernier», s’est réjoui le chef de service régional de la circulation et de la sécurité routière du Centre.
Aziz NABALOUM