Pas d'escorte de détenus au palais de Justice, pas d'audition, pas de procès, pas de visite, pas de nouveaux déférés ni de corvées ; c'est ce qu'il a été donné de constater le 2 octobre 2013 à la Maison d'arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO) et au Tribunal de grande instance (TGI) de Ouagadougou. En effet, les Gardes de sécurité pénitentiaire (GSP) sont en colère et pour cause, la non- satisfaction de leur plate-forme revendicative (voir encadré). Ils réclament, entre autres, un statut particulier. Seul le service minimum (réception de nourriture pour les détenus, repas pénal, escorte de détenus à l'hôpital) est assuré à la MACO. Une façon de montrer, selon le secrétaire général par intérim du Syndicat national des agents de la GSP, l'assistant Hermann Zomnayé Bayala, rencontré sur les lieux, que le mouvement ne trouble pas l'ordre. Pour lui, les raisons de ce mouvement sont très légitimes, et il s'explique en ces termes : « Notre projet de statut particulier est un document qui a été déposé depuis 2011 et avançait à pas de caméléon jusqu'à ce que le Premier ministre décide de freiner le processus tout récemment. Il a décidé d'observer un moratoire sur notre statut pour, a-t-il dit, s'occuper d'abord des questions d'indemnités de tous les fonctionnaires » , a-t-il signifié. A l'entendre, la patience a des limites. « Les gens peuvent être patients, mais à un certain moment, ils n'ont plus le choix quand ils ne peuvent plus supporter », a-t-il lancé. Il a confirmé le suivi du mot d'ordre de grève sur toute l'étendue du territoire national, ou du moins, dans les localités où se trouvent des maisons d'arrêt et de correction. « A l' instant où je vous parle, il n'y a pas une seule maison d'arrêt au Burkina où les éléments n'observent pas ce mouvement », a-t-il précisé. En tout cas, les agents GSP semblent déterminés à aller jusqu'au bout pour que leur plate-forme soit satisfaite. « Le problème est très sérieux car, ça ne va pas », a martelé l'assistant GSP qui estime que le gouvernement doit prendre ce problème à bras- le-corps. Même s'il s'agit d'un mouvement spontané, à en croire Hermann Zomnayé Bayala, seuls ceux qui ont décidé de l'observer pourront y mettre fin. Mais pour lui, ils ne le feront pas tant que le gouvernement ne leur proposera pas quelque chose de concret. En tout cas, le SG par intérim du syndicat des GSP affirme n'avoir eu aucune réaction de la part du gouvernement. Il estime que le Conseil des ministres (ndlr : c'était le mercredi 2 octobre) se penchera sur leur problème. « Logiquement, nous n'attendons pas qu'il vienne faire des promesses, mais nous voulons des actions, car nous avons toujours été méprisés et négligés. Trop, c'est trop ! », a-t-il mentionné. Il n'exclut cependant pas le dialogue avec le gouvernement, « S'il doit nous croiser, nous sommes disponibles. Seulement, nous ne voulons plus de promesses, nous voulons des actions concrètes », a-t-il lancé avant de poursuivre. « Il faut que nos autorités comprennent que nous ne pouvons pas nous éterniser dans les promesses. C'est pourquoi nous sommes obligés de marquer un arrêt à un certain moment. Et ce, pour nous faire entendre ». « Que les autorités sachent que nous luttons pour le développement de notre pays et nous voulons être pris en compte », a-t-il conclu.
Quel impact ce mouvement a-t-il eu sur les activités judiciaires ?
Pour répondre à cette question, nous nous sommes rendu au TGI de Ouagadougou. Coïncidence ou pas, la salle d'audience, en lieu et place d'audience, a accueilli, dans cette matinée, la cérémonie d'installation du premier président de la Cour d'appel de Ouagadougou, du procureur général, des présidents de chambres, des substituts généraux et des conseillers. L'impact du mouvement de cette grève n'a pas été ressenti pour le moment, mais qu'en serait-il des jours à venir, puisque les agents n'entendent pas baisser les bras ?
Le contenu de la plate-forme revendicative des GSP
Nous avons eu une copie de la plate-forme revendicative dont voici le contenu :
- l'adoption et l'application du projet de loi portant statut particulier des agents GSP ;
- la construction et le fonctionnement de l'école de GSP ;
- la construction d'un siège pour la direction générale de la GSP et d'un poste de commandement pour la GSP ;
- la dotation de la GSP en matériel spécifique, roulant et de communication ;
- la reconstitution de la carrière des agents de la première promotion des GSP ;
- l'évacuation de tous les dossiers en justice des éléments de la GSP ;
- la dotation annuelle des éléments en effets d'habillements ;
- l'implication de la GSP dans la politique nationale sur le grand banditisme ;
- ramener la durée de la formation des élèves inspecteurs professionnels à 2 ans ;
- mettre l'accent sur la formation continue de tous les éléments de la GSP ;
- accélérer la spécialisation des éléments dans le domaine de l'agriculture, l'élevage, la santé, l'action sociale, l'éducation, les finances, les ressources humaines... ;
- etc.
Cathérine PILABRE