Monsieur le ministre, quand on vous écoute, vous semblez ne pas savoir que vous donnez vous-même les raisons pour lesquelles des Burkinabè se méfient des Koglwéogo, ces forces d’autodéfense qui se constituent librement sur l’ensemble du territoire national. A moins que vous ne dites le contraire par rapport « aux conditions » que vous avez mises en place pour composer ces forces dans les arrondissements, les communes et les villages.
Justement Monsieur le ministre d’Etat, c’est parce qu’il n’y aura pas de rails pour qu’on y mette les Koglwéogo que des Burkinabè s’en méfient. L’histoire est assez récente. L’incivisme est si ambiant, l’autorité de l’Etat est si absente que d’autres forces, nées en dehors du reste de ce qui reste encore comme autorité, peuvent constituer un véritable danger pour la stabilité des institutions. Si vous n’y croyez pas, interrogeons l’histoire et laissons la réponse au futur.
Vous dites bien que les Koglwéogo ne sont pas des officiers de police judiciaire ; ils ne sont pas non plus des magistrats. Quand ils arrêtent quelqu’un, ils doivent le remettre aux mains de la gendarmerie et de la police ». Bien ! S’ils ne sont ni policiers ni gendarmes, quel droit leur donnez-vous pour qu’ils arrêtent des gens dans les secteurs, villages et quartiers ? Ne pensez-vous pas justement qu’à ce niveau naissent déjà les règlements de comptes dans les secteurs, les villages et les quartiers ? Quelles sont les infractions pour lesquelles un Koglwéogo peut décider « d’arrêter » un citoyen et le remettre à la gendarmerie ou à la police ?
C’est entre autres, tout cela qu’il fallait définir avant de créer et de chercher « à mettre sur les rails » les Koglwéogo. Du reste, on attend le très prochain trophée de guerre de ces « Koglwéogo » qui nous divisent comme si on était à la veille de la tentative de révision d’un certain article 37. Même si les enjeux ne sont pas les mêmes.
Dans tous les cas, quand les Burkinabè hésitent, se méfient et craignent, il faut savoir analyser. C’est bien important pour la suite.
Dénis Dafranius Sanou