Les églises, les sectes et les MOUVEMENTS religieux qui nous entourent

| 16.09.2014
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Les églises, les sectes et les MOUVEMENTS religieux qui nous entourent
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Les églises, les sectes et les MOUVEMENTS religieux qui nous entourent
À l'initiative de l'American Colonisation Society, le Liberia a été érigé en 1847 en État indépendant pour accueillir les Noirs américains qui voulaient retourner en Afrique (ce qui limiterait la population noire des USA !). Ces immigrants obtiennent des terres et s'y installent avec leur mode de vie. Mais les autochtones n'apprécient pas cette présence et préféreraient que la Grande-Bretagne avec laquelle ils sont liés (marins Krou) les colonise. D'où des conflits contre les colons américains. Impliqué dans un des conflits, William Wade Harris est emprisonné (1910). C'est un Krou originaire du pays Grébo, près de Garraway, au Sud-est du Liberia.

Le christianisme a pénétré au Liberia grâce aux Méthodistes et aux Épiscopaliens. Ces derniers ont fait un gros travail de traduction de la Bible en grébo. Or, les Américano-libériens ont cherché à détruire ce travail. Notons l'importance des traductions de la Bible et surtout de l'Ancien Testament dans le développement des mouvements prophétiques.

La mission de Harris

Harris a suivi une formation catéchistique chez les Méthodistes. Puis il navigue comme marin Krou et sera maçon. Il se marie en 1885, devient instituteur assistant et catéchiste en 1892, est suspendu en 1904 (faute contre les mœurs) puis est réintégré. Il se fait remarquer par son intelligence et son courage. En prison, il a une vision de l'Ange Gabriel qui lui annonce la mort de sa femme et sa mission à venir : il doit lutter contre les fétiches et baptiser dans l'eau. En sortant de prison, il porte une nouvelle tenue, une aube blanche et une coiffure ; il tient une croix et une calebasse avec des perles, appelés yaka. Il est accompagné de deux assistantes habillées de blanc et qui manient les calebasses. Plus tard, il prendra trois autres assistantes. Sont-elles ses épouses ? Il répond : " Il y a une loi pour les Blancs une autre pour les Noirs en ce qui concerne le mariage ". Comme il prêche en vociférant et en menaçant, on le prend pour un fou.

Harris en Côte d'Ivoire

Il pénètre en Côte d'Ivoire en 1913, après que les autorités coloniales françaises aient soumis ce territoire, eurent imposé aux populations l'impôt de capitation et les prestations en travail et aient forcé celles-ci à quitter leurs campements et à se regrouper dans de gros villages le long des pistes et de la voie ferrée. La vie économique et sociale des gens a donc été bouleversée. À ce moment, le catholicisme se trouve en difficulté : les missionnaires ont débarqué fin 1895, mais plusieurs sont morts de la fièvre jaune à Grand-Bassam. Le gouverneur Binger leur a confié l'enseignement public. Mais, en 1904, les lois de la séparation de l'Église et de l'État les contraignent à y renoncer. Puis ils sont mobilisés en 1914 et partent avec le sentiment d'un échec. Quand ils reviennent après le passage de Harris, les gens affluent nombreux pour entrer dans l'Église.
Harris est resté sur la côte et est allé jusqu'en Gold Coast (Ghana). Il tient la Bible en main, mais ne l'ouvre pas car il la sait par cœur et les gens sont illettrés. Partout où il passe, il désigne un homme du pays pour continuer son œuvre. Il utilise les pistes tabou et mange les nourritures interdites pour prouver aux gens que ces coutumes n'ont aucun pouvoir. Le passage de Harris marque un changement dans les coutumes : on supprime les huttes réservées aux femmes en règles ; les veuves ne sont plus tenues à un isolement de 18 jours après la mort de leur mari ; les écoles se multiplient ; les populations apprennent les règles d'hygiène et de propreté. " Harris annonce qu'il reçoit des messages du ciel. Il arrache les cigarettes de la bouche des fumeurs. Il prêche violemment contre le travail du dimanche. Il fixe longuement le soleil ". Il lutte aussi contre l'alcoolisme et recommande l'instruction. Il marque sa préférence pour l'Église catholique.

Il est expulsé de Côte d'Ivoire en décembre 1914 ou janvier1915 pour deux raisons : parce que les employeurs européens voient d'un mauvais œil qu'il interdise le travail du dimanche ; ensuite, parce que les autorités françaises craignent que les Anglais ne l'utilisent pour affaiblir la présence française en Côte d'Ivoire. Mais le colonisateur français n'a rien à reprocher à Harris : son action a été bénéfique et il a libéré les esprits pour le progrès économique et social en même temps que religieux. Harris est parti sans protester, en demandant au peuple de ne fomenter aucun trouble, de rentrer chez lui pour servir Dieu et de ne retourner aux fétiches sous aucun prétexte.

L'après Harris

Il meurt le 23.04.1929. Avant sa mort, il reçoit deux visites dont les messages sont contradictoires. D'abord, en septembre 1926, la visite du pasteur méthodiste Pierre Benoît qui souhaite que les fidèles de Harris rejoignent l'Église méthodiste. Harris aurait dit à Benoît : Personne ne doit se joindre à l'Église catholique romaine s'il désire rester fidèle. Selon M. Bureau, certains termes de ce document ont été soufflés (à Harris) par un missionnaire trop zélé (c'est-à-dire Benoît).
Ensuite, en 1928, deux ivoiriens, partisans de Harris – John Ahui et Salomon Dagri – vont lui poser des questions sur le mariage et les collectes d'argent. Il reste dans l'ambiguïté pour le mariage et met en garde contre les impositions et redevances de toutes sortes dans le domaine de la religion. Il ne s'en prend pas aux catholiques. Il annonce que la France subira des épreuves. John Ahui créera l'Église harriste après la deuxième Guerre Mondiale. Le Harrisme donnera aussi naissance à d'autres mouvements prophétiques.

Le message de Harris et son succès

Il frappe par sa grande simplicité : il faut abandonner les pratiques de la sorcellerie et les cultes rendus aux fétiches.
La vérité du Dieu unique est contenue dans la Bible et la force de Dieu est dans la croix de Jésus-Christ.
Le Dieu de Harris est plutôt vengeur et jaloux. Jésus-Christ intervient peu mais sa mort est source de salut. Harris n'enseigne pas les dix commandements. En cas d'adultère, il faut se confesser à son conjoint.

Les points importants pour Harris

  • Le repos du dimanche.
  • Ne pas mêler les questions d'argent à la vie religieuse.
  • Brûler les fétiches.
  • Prier de façon simple, si possible en chantant, pour obtenir la grâce d'une vie honnête.
  • Les fidèles découvrent ainsi un Dieu fort, supérieur à toutes les puissances malfaisantes, sources de leurs souffrances.

Les populations voient en Harris un homme fort, à la manière des Blancs, qui puisait sa force, comme eux, dans le livre sacré et dans l'eau du baptême.
Pour elles, leur retard vient de ce que Jésus n'a pas pu venir en Afrique. Harris a converti entre 100 000 et 120 000 personnes. Le harrisme, comme beaucoup d'autres mouvements religieux modernes en Afrique, ne peut s'expliquer qu'à partir de deux éléments primordiaux :
Le système africain d'explication du monde et de l'homme dans le monde qu'est la sorcellerie et les moyens d'obtenir ou de s'en défendre que nous appellerons le fétichisme d'une part et, d'autre part l'intervention du Blanc dans la société africaine : le Blanc possesseur d'un pouvoir supérieur introducteur de la révélation chrétienne sous la forme de la Bible. Le prophète et le mouvement prophétique n'existent pas sans le sorcier et l'Européen.

Le Christianisme céleste

Le Christianisme céleste peut apparaître comme une Église indépendante car, tout en s'inspirant du christianisme, il est indépendant des grandes Églises chrétiennes. Il a ses textes, son langage, ses rites. On le classe parmi les Églises indépendantes africaines dont les caractéristiques essentielles sont les suivantes : elles ont un leader charismatique, elles opèrent un syncrétisme entre le christianisme et la tradition africaine, elles sont en général nées d'une protestation contre une situation politique et sociale : à l'origine, protestation contre la colonisation et des Églises jugées trop favorables à l'Occident ; par la suite, protestation contre les changements rapides dans la société et contre l'insuffisance des soins médicaux. Ces Églises se veulent une réponse à l'interrogation des gens sur la présence du mal et une protection contre ce mal.

Le milieu et la naissance du Christianisme céleste

Cette Église est née au Sud-Dahomey (ce pays s'appelle maintenant le Bénin), c'est-à-dire dans une région marquée par le Vodun : sens de la prière face aux forces de la nature, peur de la sorcellerie, sens de l'ésotérisme (les monastères Vodun), importance de la vision et de la prémonition et influence des Églises Aladura venues du Nigeria, et qui ont une interprétation fondamentaliste de la Bible.
Cette Église a été fondée le 29.09.1947 à Porto-Novo, à la suite d'une vision reçue par Samuel Biléou Joseph Oschoffa.
Oschoffa est né en 1909 à Porto-Novo d'un père méthodiste, menuisier. Sa mère Fohoun est vendeuse de tissus. A deux reprises, son père tente de lui faire donner une formation, d'abord auprès d'un catéchiste, puis auprès d'un pasteur. Mais, après quelque temps, Oschoffa s'enfuit, revient chez lui et apprend la menuiserie avec son père. Fin 1946, il se lance dans le commerce de l'ébène. Accusé d'adultère (mais ce n'est pas prouvé), il est expulsé de l'Église des Séraphins, et il épouse Félicia Yaman accusée d'être sa complice.
Un mois après son retour, le 29.09.1947 (fête de saint Michel, archange), il se met en prière avec des amis et a une vision : un être resplendissant qui ne touche pas le sol lui donne la mission de fonder une religion dont les membres n'adoreront que Dieu. La vision s'articule autour de trois points :

  • La mission contre le fétiche.
  • L'annonce de persécution.
  • La promesse d'aide.

D'autres visions confirment la précédente. Désormais Oschoffa et ses successeurs prétendront ne parler que sous l'inspiration d'une parole qui leur est dictée. De même, les hymnes leur sont révélées. La puissance manifestée va s'exercer contre les forces maléfiques mises en œuvre par la « sorcellerie » de deux manières principales : destruction de la puissance des fétiches et guérisons miraculeuses.

Le développement de l'Église

Elle s'appelle Christianisme céleste, ce qui signifie que le vrai culte est celui qui est rendu à Dieu par les Anges dans le ciel et auquel les membres de l'assemblée doivent se joindre. L'Église est reconnue comme association le 1.11.1956. Cette Église d'origine populaire a commencé à attirer les cadres moyens et même supérieurs vers 1967, ce qui l'a conduite à renoncer à l'improvisation et à se structurer. Les fidèles sont attirés pour les raisons suivantes :
Désir de résoudre leurs problèmes (santé, stérilité, profession, jalousie ...). Attrait pour les charismes (guérison, visions), pour l'entraide entre fideles, pour la recherche d'une prière fervente, pour le désir de rejeter les fétiches, pour obtenir une intégration dans la société et le cosmos.
L'histoire du Christianisme céleste a ensuite été marquée par les persécutions qu'il a subies (ainsi que d'autres groupes religieux tels que les Témoins de Jéhovah) sous le gouvernement marxiste de Mathieu Kérékou. Oschoffa s'est alors installé au Nigeria. Puis il est décédé sans désigner de successeur.
Depuis, le Christianisme céleste s'est répandu en plusieurs pays. Il a tendance à se diviser car divers évangélistes prétendent être les plus qualifiés pour succéder à Oschoffa. Vu qu'ils ont hérité des objets appartenant à Oschoffa, les Nigérians avec le Pasteur Bada semblent assez bien placés. Le pasteur ivoirien Ediémou (de l'une des branches des Célestes de Côte d'Ivoire) se dit actuellement leur allié.
Quelques aspects de la vie de l'Église
En recevant le baptême (par immersion), le croyant est pénétré par l'Esprit du Christ ressuscité qui s'oppose directement à la puissance des Vodun.
L'Église est encadrée par une double hiérarchie dont les grades sont conférés par onction. Une hiérarchie de gouvernement et des visionnaires (soumis au contrôle du gouvernement). De son vivant, Oschoffa était le prophète-pasteur (fondateur) dominant les deux hiérarchies. Ensuite viennent, du côté du gouvernement, les pasteurs, les évangélistes puis les leaders. Les leaders ont leur correspondant chez les visionnaires : ce sont les wolileaders, puis au dessous les wolidja. Au niveau des fidèles ou hommes de prières, on a les alagba et les devanciers. Les femmes n'ont de place qu'à ce niveau de femmes de prières, car elles sont soumises aux impuretés propres à leur sexe.
Cette Église insiste sur la prédication et la prière. Elle célèbre la Sainte cène quatre fois par an, comme les Méthodistes, dont le dimanche des Rameaux et à Noël. Selon les opinions des Célestes, tantôt leur Sainte Cène est marquée par la Présence réelle, comme dans l'Église catholique, tantôt elle n'est qu'un Mémorial, comme chez les protestants. La fête de Pâques est célébrée sans Sainte Cène. Le mariage est célébré religieusement, pas comme un sacrement, mais comme un vœu devant Dieu, et il doit être respecté. En fait, à cause de la polygamie, beaucoup de Célestes vivent sans s'engager dans ce mariage.
Les charismes les plus importants sont : la vision et la guérison.

La vision

Selon le vocabulaire en usage, le visionnaire est en esprit ou tombe en esprit, comme en extase. Il n'est plus conscient de ce qui se passe autour de lui, Il est alors agité par l'Esprit, agité par des tremblements. Il émet des paroles en langues ou des sons (" hon...hon...hon "), qu'un autre sera chargé de traduire. Puis, il est ramené en chair ou rentre en chair.

La guérison

À la différence des guérisseurs traditionnels et de certaines Églises, le Christianisme céleste ne recourt pas à la pharmacie traditionnelle ni aux confessions des péchés. Seuls sont employés le couvent, la prière et l'eau bénite. Le visionnaire vise à repérer la force mauvaise qui cause la maladie. Il est alors possible de mettre en œuvre une force bonne pour la combattre. Un des buts de ces cérémonies est d'inciter les gens à ne pas recourir aux fétiches.

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