Antoine Kologo dit Lipicot, instituteur
« Nous allons prier pour que ces mesures soient appliquées et suivies »
« De ces mesures qui ont été prises par le gouvernement, je vois que 5 000 F CFA, c'est bon mais ce n'est pas arrivé. Je suis un enseignant, mais je mène une activité parallèle parce que ça ne va pas. Par rapport à la sujétion, il a été dit que c'est entre 2 000 et
5 000 F CFA qui vont s'ajouter. Là encore, nous attendons de voir parce qu'on ignore qui aura 2 000 F CFA et qui 5 000 F CFA. Par rapport à l'IUTS, ayant moi-même suivi le ministre des Finances, j'avoue que c'est le flou total. Nous attendons de voir concrètement sur nos bulletins, à partir du mois d'octobre comme il l'a dit, ce qui nous est réservé. Nous allons prier pour que ces mesures soient appliquées et suivies et qu'on puisse pousser un ouf de soulagement. »
Patrice Kaboré, professeur d'histoire-géographie
« Je pense que la vraie mesure qu'il fallait, c'est la réduction des coûts des facteurs de production »
« Par rapport à l'urgence de la situation, je crois que ces mesures sont très insignifiantes. Je pense que la vraie mesure qu'il fallait, c'est la réduction des coûts des facteurs de production en commençant par l'électricité. Si l'électricité baisse, c'est le coût de toute la chaîne de transport et de production qui va chuter et cela va jouer sur le ciment et les denrées alimentaires. Quand on veut augmenter les salaires, il faut qu'on le fasse sérieusement car les études ont montré que le salaire du Burkinabè de 2013 est inférieur à celui du Burkinabè de 1980 par rapport au coût de la vie. C'est vrai que le pays n'est pas riche, mais on pense que le gouvernement pouvait faire mieux. »
Oumar Savadogo, professeur de philosophie
« Il faut prendre en compte les propositions des syndicats »
« En ce qui concerne les fonctionnaires, je pense que ce sont d'anciennes mesures qui ont été rejetées d'abord par les syndicats et qui sont revenues sur la table. Et de ce point de vue, je considère qu'il y a un manque de respect car il n'y a pas une prise en compte des propositions qui ont été faites par les responsables syndicaux. Nous avions été clairs avec le gouvernement. S'il y a une augmentation allant dans le sens de l'amélioration des conditions de vie et de travail, ces conditions doivent être conséquentes. Je ne peux pas dire que ces mesures, surtout pour les indemnités de logement, sont satisfaisantes. Il faut prendre en compte les propositions des syndicats parce qu'ils savent vraiment ce que vivent les travailleurs sur le terrain. Avec ce que propose le gouvernement en ce qui concerne les indemnités de logement, c'est insignifiant compte tenu du niveau des loyers au Burkina Faso. Ces propositions ne vont pas dans le sens de nos attentes et je dirai même qu'on se moque de nous. »
Adèle Kaboré/Conombo, institutrice
« Il y a un effort qui est fait mais ce n'est pas assez »
« Ces mesures sont à féliciter mais ce n'est pas assez. Il faut plus d'amélioration puisqu'actuellement le niveau de vie est élevé au Burkina Faso. Tout coûte cher et surtout le logement. Si l'on pouvait augmenter encore les salaires, cela nous ferait plaisir. En ce qui concerne l'augmentation du FONER (prêts et aides), je ne pense pas que cela aura un impact sur la vie des étudiants parce que ces derniers vivent aujourd'hui dans la misère et il n'y a pas eu beaucoup d'amélioration. »
M. Bénewendé Stanislas Sankara, président de l'Union pour la renaissance/Parti sankariste
« Des mesures artificielles et dérisoires visant la mise en place du Sénat »
« J'ai l'impression que M. Blaise Compaoré veut corrompre le peuple burkinabè à 60 milliards de F CFA pour obtenir l'institution du Sénat. Sinon, je ne comprends pas que le gouvernement puisse disposer de cette somme en un temps record alors que depuis longtemps nous souffrons. Je me l'explique très mal. Ce d'autant plus qu'il a été élu sur la base d'un programme où il nous promettait un Burkina Faso émergent. Donc, c'est un peu paradoxal parce que notre pays reste très pauvre, le peuple vit dans la misère et quand on parle de la vie chère, ce n'est pas une fiction. Que l'on soit salarié ou pas, tout Burkinabè connaît ces dures réalités et je pense que ce ne sont pas des mesures artificielles, ponctuelles qui peuvent venir à bout d'une vie chère qui est devenue le quotidien du Burkinabè. De mon point de vue, il faut des mesures pérennes qui s'attaquent aux problèmes dans leur fond et non à la surface. Je rappelle que ces mesures interviennent dans un contexte ou le peuple burkinabè a rejeté de façon fracassante et catégorique le Sénat. On les propose pour baisser la température et reprendre en même temps les tournées pour essayer de convaincre certaines communautés à accepter le Sénat, mais la pilule ne pourra pas passer à mon avis. Je crois qu'il faut tenir compte du cahier de doléances des syndicats. Est-ce là une augmentation ? Au niveau des indemnités, le plus fort taux est de 5 000 F CFA. Au niveau de l'IUTS, il faut que la loi soit votée puisque c'est un impôt et il va falloir attendre que l'Assemblée nationale délibère. Cela permettra de voir l'impact sur le salaire de ceux qui sont concernés par ces mesures. Ce sont des mesures trop dérisoires par rapport à la vie chère. Il faut attendre de voir l'impact réel sur la vie de nos concitoyens. »
Issa Balima, président de l'Union des Forces Centristes
« Je crois que ces mesures sociales sont à prendre à leur juste valeur »
« Je crois que ces mesures sociales sont à pendre à leur juste valeur. Et pour ce faire, je remercie le Conseil des ministres qui a bien voulu prendre en compte les recommandations faites par le comité de suivi et de mise en œuvre des questions portant sur l'opérationnalisation du Sénat parce que nous sommes de ceux qui pensent que même si la question du Sénat divise les Burkinabè, ils sont peut-être à catégoriser. Il y en a qui pensent que le Sénat est un instrument qui les empêchera d'accéder au pouvoir selon leur stratégie, mais aussi ceux qui manifestent de bonne foi parce qu'ils ne supportent plus leur façon de vivre et ne sont pas heureux. C'est pour cela que nous avons recommandé au gouvernement de prendre des mesures sociales fortes à l'endroit de tout le peuple burkinabè pour continuer dans la lancée qui a consisté à marquer un temps d'écoute et de respect vis-à-vis de toutes les opinions autour de la mise en place du Sénat. Evidemment, cela ne pourra pas ne pas avoir un impact et il faut bien que l'on se dise une chose. Aujourd'hui même si le président Compaoré le voulait avec son Conseil des ministres, il ne leur revient pas de définir unilatéralement sans concerter les autres acteurs. C'est une bonne chose à notre avis et nous souhaitons que tout le monde le perçoive comme une volonté d'apaiser le climat social plutôt que d'y voir un acte de faiblesse et faire de la surenchère qui pourra nous mener à des situations déplorables. Je lance donc un appel à la tolérance parce qu'une culture démocratique suppose que l'on fasse attention à ce que l'on fait. Car, quand on s'inscrit dans la logique de « c'est moi ou le chaos, tout pour moi et rien pour les autres », on s'auto-exclut de la façon de vivre démocratiquement. C'est un acte allant dans le sens de l'apaisement et même si ce n'est pas arrivé, c'est quand même un juste milieu pour éviter de faire de notre pays un marché de reconstruction pour des marchands d'armes ».
Mme Awa Namoano/Diallo de l'UNDD
« C'est bon à prendre »
« A l'UNDD, nous ne pouvons que nous féliciter des mesures sociales que le gouvernement vient de prendre. Vous vous souviendrez que pendant les tournées régionales du parti consécutives à la crise de 2011, pour exiger des réformes urgentes, l'UNDD avait tenu des conférences sur des thèmes sociaux qu'il voulait voir pris en compte dans le cadre des assises à venir. Le CCRP, à notre corps défendant, au lieu d'appréhender la crise dans ses multiples dimensions politiques, socio- économiques, militaires, sécuritaires, judiciaires etc., a privilégié le seul côté politique. Le président du parti sur une tribune récemment, est revenu sur les conséquences désobligeantes de cette approche sélective, suggérant d'y remédier dans le cadre du rapport d'étape commandé au comité de suivi. Ce dernier, entre autres propositions, a fortement recommandé des réponses diligentes à certaines demandes sociales. C'est maintenant chose faite. Ce que je pourrais en dire sous le contrôle des instances dirigeantes du parti, c'est qu'on ne saurait faire la fine bouche devant cet effort. C'est vrai qu'on peut toujours mieux faire, mais le relèvement des indemnités de logement et de sujétion de tous les agents de l'Etat et des Etablissements publics pour compter du 1er juillet 2013, la revalorisation des salaires de tous les travailleurs des secteurs public et privé à travers l'allègement de l'IUTS, c'est bon à prendre. Il s'agit à présent de ne pas s'arrêter en si bon chemin. »
Propos recueillis par Cathérine PILABRE