Ont-ils senti que l'heure était grave? Une chose est sûre, les partis politiques de l'ex-opposition et les Organisations de la société civile s'étaient donné rendez-vous sur la place publique. Objectif: se donner encore et toujours les moyens de peser de tout leur poids dans la conduite des événements.
De fait, à Ouagadougou, sur la mythique place de la Révolution, ce 25 avril 2015, le temps était à nouveau à la mobilisation, voire à la remobilisation, et à la démonstration de force, pour ensemble réaffirmer leur soutien à la nouvelle loi électorale en vigueur. Celle qui va encadrer la présidentielle et les législatives du 11 octobre 2015, et par la suite les élections municipales de fin janvier 2016.
Dans une attitude qui n'est pas sans rappeler un passé assez récent d'ailleurs, les manifestants ont pris d'assaut le lieu de rassemblement avec des messages qui en disaient long sur leur détermination. Avec un seul mot d'ordre décliné sur des pancartes, sur des affiches, ou encore sur des banderoles: celui de la défense des institutions. D'où cette volonté réaffirmée de resserrer les rangs face à l'adversité. Et surtout ils ont martelé, à l'image de Luc Marius Ibriga, que «le droit sera dit, rien que le droit, tout le droit».
Devenu manifestement un champion des formules et des petites phrases clés en main, l'universitaire manie habilement et tout à la fois la casquette de gestionnaire du pouvoir d'Etat et celle de membre de la société civile. Contrairement à un Augustin Loada, l'actuel ministre de la Fonction publique, qui, lui, s'embourbe chaque jour un peu plus dans ses propres contradictions.
En plus de l'actuel Contrôleur général d'Etat, deux autres personnalités de la Transition sont apparues, elles aussi, comme étant les vedettes du meeting du 25 avril. Il s'agit de Cheriff Sy, le président du CNT, et d'Auguste Denise Barry, le ministre de l'Administration territoriale, de la Décentralisation et de la Sécurité.
Le premier, après les difficultés liées à la très controversée affaire des émoluments jugés excessifs des membres du CNT, précédée par des bisbilles entre OSC pour désigner leurs représentants au sein du Conseil, l'heure semble être à présent au retour en grâce progressif auprès d'une partie des Burkinabè. En tout cas, pour ceux qui ont participé à l'insurrection populaire qui a entraîné les changements auxquels on assiste depuis lors.
Critiqué et attaqué parfois de manière personnelle, le fondateur de l'hebdomadaire Bendré a longtemps fait profil bas. C'est finalement à la faveur du vote de la loi sur le code électoral que l'homme est sorti de sa réserve, avec un discours d'une grande fermeté à l'endroit des anciens dirigeants et de leurs soutiens. Une sortie à travers laquelle il promettait que rien n'arrêterait le train de la Transition. Et en la matière, on peut noter que le changement de ton observé par certaines chancelleries occidentales à l'égard de l'actualité récente au Burkina témoigne, sans aucun doute, d'une nette évolution qui va dans le sens de la position exprimée par le CNT.
Le second personnage, et non des moindres, à avoir tiré les marrons du feu en plus des deux autres précédemment cités, c'est Auguste Denise Barry, le ministre de l'Administration territoriale, de la Décentralisation et de la Sécurité, le titulaire des grands dossiers de la république.
Place de la Révolution, son nom a été continuellement scandé par une foule manifestement acquise à sa cause. Celle-ci allant même jusqu'à exiger qu'on le laisse monter sur le podium pour qu'il puisse prendre la parole. En tout cas, le colonel a pu apprécier de visu la remontée de sa cote de popularité, contrairement à celle de son Premier ministre et compagnon d'armes.
En fin de compte, c'est sous le soleil brûlant du mois d'avril que les partisans de l'inclusion sans l'impunité ont chanté en chœur leurs hymnes préférés et dépoussiéré un peu leurs vieux slogans. A l'image de celui-là même que ses camarades appellent, depuis sa mésaventure en terre congolaise et non sans ironie, «le prisonnier de Kabila», l'artiste musicien Oscibi Yohann, pour ne pas le nommer. Ou encore le kundé d'or 2015, Sana Bob, venu lui aussi témoigner de son engagement aux côtés des fondateurs du Balai citoyen, à œuvrer en faveur d'un Burkina uni, dit-on, dans l'adversité.
A. Traoré