Répression de la marche sit-in du balai citoyen à Bobo-Dioulasso: 5 blessés et 15 personnes arrêtées et libérées

| 30.06.2014
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Répression de la marche sit-in du balai citoyen à Bobo-Dioulasso: 5 blessés et 15 personnes arrêtées et libérées
© DR / Autre Presse
Répression de la marche sit-in du balai citoyen à Bobo-Dioulasso: 5 blessés et 15 personnes arrêtées et libérées
Initialement prévu pour se tenir à la place de mairie de Bobo-Dioulasso, le samedi 28 juin 2014, le sit-in du Balai citoyen qui visait à dénoncer la gestion de la ville de Bobo-Dioulasso n'a pas eu une autorisation officielle des autorités de la ville du fait « de place déjà attribuée à une autre association dans la matinée ». Décalée dans l'après-midi, l'activité n'a également pas eu l'accord des responsables de la ville. Finalement, les organisateurs de l'activité se sont entêtés à tenir leur activité car, selon eux, les arguments avancés par les autorités pour rejeter leur demande ne tiennent pas. Dans ce bras de fer, l'activité s'est transformée en une course-poursuite accompagnée de jets de gaz lacrymogènes. Bilan de cette course-poursuite : 5 blessés du côté des manifestants et 15 personnes interpellées. Aussi, le porte-char du podium du Balai citoyen a été confisqué avec à bord une dizaine de personnes dont un membre de la coordination du mouvement. Au CHU de Bobo-Dioulasso, nous avons pu visiter les cinq blessés dont quatre au bloc et une aux urgences.

Blocage des artères menant à la mairie, course-poursuite, jets de gaz lacrymogènes, plusieurs arrestations et des blessés. Tel est le bilan du sit-in du Balai citoyen qui se voulait pacifique. En effet, la marche suivie de sit-in du balai citoyen avait pour but, selon ses organisateurs, d'interpeler les autorités communales à s'impliquer activement dans la gestion de la ville de Bobo-Dioulasso. Mais, les organisateurs de l'activité ont vu leur demande d'autorisation rejetée car, la place de la mairie où devrait se tenir le sit-in, aurait été attribuée à l'Association de jeunes pour le progrès social de Bobo-Dioulasso (AJPSB) pour y tenir une cérémonie de remise de vivres et matériels divers à l'orphelinat « Den Kanu » du secteur 25 de la ville. Tenant à leur activité, les organisateurs ont, selon eux, introduit une nouvelle demande à la mairie pour cette fois-ci tenir l'activité dans l'après-midi de la même journée. Celle-ci a également été rejetée, parce que, le cadre serait attribué à l'AJPSB pour toute la journée. Toute chose qui réconforte le Balai citoyen dans sa position que la demande est refusée tout simplement parce que la marche est dirigée contre la mairie.

« La manifestation pacifique est un droit reconnu par la Constitution »

Convaincu que la manifestation pacifique est légale, les organisateurs de l'activité ont tenu à exprimer leur mécontentement face à la gestion « chaotique » de la ville de Bobo-Dioulasso, en dépit du « refus » des autorités de leur accorder l'autorisation. « Salia Sanou, après avoir pris en otage le développement de la ville de Bobo, ne peut en aucun cas constituer un frein à l'expression de notre droit reconnu par la Constitution », a signifié Alexandre Diakité, coordonnateur du Balai citoyen des Hauts-Bassins. Selon lui, Salia Sanou aurait fait savoir que jamais le Balai citoyen n'aura d'autorisation pour manifester dans cette ville tant qu'il (le mouvement) participera aux manifestations de l'opposition. Ainsi, dans l'expression du droit à la manifestation pacifique, les manifestants ont été pourchassés par des éléments de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS), gazés, arrêtés. D'autres blessés ont été conduits à l'hôpital de Bobo-Dioulasso. Si les manifestants ont eu du mal à respirer pendant cet exercice assimilable à un film Hollywoodien, il en a été de même pour des habitants du secteur 1 (Dioulasso-Ba) de la ville où la majeure partie du film s'est déroulée. En effet, les manifestants, pourchassés, ont trouvé refuge dans les concessions. Et là, ils étaient gazés en même temps que des populations assises dans leurs cours. Ces dernières, à un moment donné, en avaient marre et voulaient s'en prendre aux éléments de la CRS qui se sont rapidement dissipés à bord de leurs véhicules.

La place de la mairie, un lieu interdit aux manifestants

Tôt dans la matinée, un groupe de jeunes habillés en tee-shirt à l'effigie du Balai citoyen attendait devant la Bourse du travail, en face de la mairie. Ils attendaient certains des leurs, en provenance de l'Avenue Nelson Mandela où il était question d'exiger le démarrage des travaux de cette voie, dont le lancement a eu lieu le 3 février 2014 par Luc Adolphe Tiao. C'est ainsi que des véhicules CRS sont arrivés à vive allure. A leur arrivée, leur responsable s'est approché des manifestants avec un mégaphone en main. « Vous n'êtes pas autorisés à occuper cet endroit. Donc nous vous prions de bien vouloir déserter les lieux », a-t-il fait savoir aux manifestants. Et ces derniers de répondre en chœur : « Nous allons de façon pacifique tenir notre activité pour dire au maire que nous ne sommes pas contents de la gestion de la ville. Ensuite, nous partirons ». Quelques pas en arrière, d'un seul geste de l'index, il fait pleuvoir un torrent de gaz lacrymogènes sur les manifestants qui se sont dispersés dans le secteur. Ainsi commence la course-poursuite. A ce moment, l'autre groupe s'attelait à rejoindre la place de la mairie par la rue Imam Sakidi Sanou. Alors, du renfort. La chasse à l'homme s'installe. Les artères menant à la mairie sont bloquées. Manifestants, habitants, usagers de la voie et autres, tous ont souffert de l'effet du gaz lacrymogène. Et c'est dans cet exercice que cinq blessés ont été enregistrés du côté des manifestants et environs quinze personnes arrêtées, selon les organisateurs de la marche.

Les autorités de la ville tenues pour responsables

Pour la première fois, le Balai citoyen, depuis sa création, vient de subir une répression. Cependant, les dommages causés par celle-ci sont, selon Alexandre Diakité, de la responsabilité des autorités de la ville de Bobo-Dioulasso. Sinon, se demande-t-il, « comment refuser l'autorisation à des citoyens de manifester leur droit reconnu par la Constitution de façon pacifique » ? Aussi indique-t-il, « la veille de notre manifestation, à savoir le vendredi 27, nous avons été appelés par la haut-commissaire, en présence de toutes les autorités de la ville. De 15h à 19h nous avons discuté et fait des concessions sur toute la ligne. Nous avons fait savoir au maire que comme la place de la mairie est occupée, qu'il nous donne un lieu où nous pourrons lui transmettre notre plateforme revendicative. La haut-commissaire a approuvé l'idée et le maire s'y est opposé en disant que tant que le Balai citoyen continuera à participer aux manifestations de l'opposition et à injurier les autorités, jamais il n'aura d'autorisation dans cette ville. C'est là que nous lui avons fait savoir que la manifestation est un droit et que nous le ferons valoir ». Dans les échanges, dit-il, « la haut-commissaire a réussi à nous convaincre de reporter notre activité. Mais, comme il se faisait tard et que l'information a pris toute la ville, il était difficile de pouvoir toucher tout le monde. Pour ce faire, nous avons préconisé qu'elles (les autorités) nous donnent les moyens adéquats pour rattraper l'information, à savoir la télé et la radio. Aussi, nous avons souhaité que dans l'immédiat, le maire nous donne l'autorisation de tenir notre activité le samedi suivant, chose qu'il a encore refusée. Finalement, la haut-commissaire a accepté le principe de passage en direct à la télé. Elle devrait rentrer en contact avec la télé et la radio afin que nous y passions. Mais, nous sommes allés attendre jusqu'à 22h, en vain ». Finalement, dit-il, « elle nous a fait savoir qu'elle ne pouvait plus honorer notre requête, tout en nous demandant de faire avec nos moyens de bord pour toucher les populations. C'est ainsi que nous lui avons fait savoir qu'il sera très difficile pour nous de pouvoir toucher tout le monde, au regard de l'ampleur de l'information dans la ville». Alors conclut-il, « nous avons fait des efforts pour empêcher cette marche. Si les autorités en avaient fait autant, on ne serait pas là aujourd'hui. Nous les tenons donc pour responsables quant à ce qui est arrivé. Car, lorsque l'autorité viole les textes pour refuser le droit de manifester aux populations, celles-ci se doit de tenir le bras de fer avec l'autorité ».

Un bilan satisfaisant

Tout en déplorant les cas de blessures, les organisateurs de la marche et du sit-in se disent satisfaits, car pour eux, malgré le refus des autorités de leur accorder l'autorisation, la marche a pu te tenir et cela a permis de mettre « en plein jour l'incapacité des autorités à gouverner ». « Ce n'est pas en gazant des manifestants aux mains nues, qu'on pourra résoudre la situation. Ce que Salia doit savoir, c'est qu'en autorisant les CRS à gazer, non seulement les manifestants et des populations, il vient de compliquer sa situation. Dès lundi, nous allons encore introduire une nouvelle demande pour tenir notre activité. Tant qu'il ne recevra pas notre plateforme revendicative, jamais nous ne baisserons les bras» a-t-il fait savoir, tout en se réjouissant de l'inaction des manifestants face aux CRS. « Les autorités doivent comprendre que nous ne sommes pas des casseurs, malgré tout ce qu'elles nous ont fait endurer, nous n'avons cassé quoi que ce soit. C'est dire que nous avons un esprit plus républicain qu'elles », a-t-il signifié tout exigeant la libération immédiate des personnes arrêtées et celle du véhicule porte-char. Dans l'après-midi, nous apprenions que le véhicule ainsi que les 15 personnes ont été libérés.

Par Mady BAZIE

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Les à-côtés

L'activité de l'AJPSB reportée

Comme prévu, tôt le matin, la place de la mairie était occupée par l'Association des jeunes pour le progrès social à Bobo-Dioulasso (AJPSB), pour effectuer leur cérémonie de remise de vivres et autres matériels à l'orphelinat « Den Kanu » du secteur 25 de Bobo-Dioulasso. Mais, finalement, avec le gaz lacrymogène sur les lieux, la cérémonie a été reportée laissant ainsi la place aux CRS qui l'ont occupée toute la journée.

Un véhicule CRS heurte le véhicule d'un particulier

Dans la poursuite des manifestants, les éléments des forces de l'ordre et de sécurité qui en avaient la charge roulaient à vive allure dans les différentes artères jouxtant la mairie. Vu la densité de la foule et surtout du gaz lacrymogène qui troublait la circulation, un véhicule CRS a heurté le véhicule d'un particulier. Celui-ci a demandé qu'un constat soit fait pour situer les responsabilités.

Une fête de clôture dans une école perturbée

Si le gaz lacrymogène était destiné aux manifestants, force est de constater que toutes les activités dans le périmètre de l'évènement ont été perturbés. C'est ainsi qu'une école primaire en fête de fin d'année, marquant la clôture ses activités sportives, culturelles et scolaires, a été perturbée par le gaz lacrymogène qui venait de partout. Finalement, la fête a été ajournée afin de ne pas exposer les enfants au gaz.

Rassemblés par MB

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