Ministère de la culture et du tourisme : des organisations d’artistes font front contre la démission du secrétaire général

| 22.10.2015
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Ouagadougou 25 Novembre 2015 - Le nouveau ministre de la Culture du Burkina Faso, Adama Sagnon, ex-procureur sous le président déchu Blaise Compaoré, a démissionné mardi sous la pression de la société civile qui lui reproche son traitement de l'affaire Zongo, un journaliste dont l'assassinat en 1998 avait embrasé le pays, a annoncé le gouvernement. Photo d'archives, utilisée à titre d'illustration
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Ouagadougou 25 Novembre 2015 - Le nouveau ministre de la Culture du Burkina Faso, Adama Sagnon, ex-procureur sous le président déchu Blaise Compaoré, a démissionné mardi sous la pression de la société civile qui lui reproche son traitement de l'affaire Zongo, un journaliste dont l'assassinat en 1998 avait embrasé le pays, a annoncé le gouvernement. Photo d'archives, utilisée à titre d'illustration
Des artistes et représentants d’organisations professionnelles de la culture ont organisé ce mercredi 21 octobre 2015 au ministère de la culture et du tourisme une contre-manifestation pour protester contre la démission forcée du Secrétaire Général (SG), Désiré Ouédraogo.


Des coups de sifflets et de vuvuzuelas... Des professionnels bien connus du monde de la culture burkinabè regroupés devant le ministère de la culture et du tourisme... C’est ce qui donnait à s’observer ce mercredi matin au ministère de la culture et du tourisme. Ces artistes, environ une trentaine, sont venus exprimer leur désapprobation suite à la démission du SG du ministère, Désiré Ouédraogo, qui a été forcé de rendre sa démission par d’autres artistes.

« Nous (artistes, représentants des organisations professionnelles de la culture) sommes là pour exprimer notre avis par rapport à la situation de turbulences que traverse le ministère de la culture et du tourisme, turbulences qui ont débuté le 16 octobre, qui ont consisté pour un groupe de personnes disant n’agir ni sous l’instigation de syndicats, ni sous l’instigation d’une association, ni sous l’instigation d’une OSC (Organisation de la Société Civile, ndlr), qui sont venus manifester contre la présence de notre SG pour la raison d’avoir répondu à la convocation du Général Diendéré », a expliqué le porte-parole des contre-manifestants, Martin Zongo, administrateur du Carrefour international de théâtre de Ouagadougou (CITO).
Accusé d’avoir fait allégeance au Général Gilbert Diendéré, le chef putschiste, lorsque ce dernier a convoqué les Secrétaires généraux des ministères le 18 septembre 2015 pour assurer la continuité de l’administration, le SG du ministère a rendu sa démission face à la pression de certains artistes. Mais Selon les contre-manifestants, les raisons que leurs collègues artistes ont avancé pour exiger la démission du secrétaire général Désiré Ouédraogo ne sont pas fondées et pire, il a été victime de « diffamation et d’un certain nombre de torts moraux et psychiques ». Puisque, explique Martin Zongo, « on l’a considéré comme un traitre, en quelque sorte, à la cause de la lutte que menait le peuple burkinabè en résistance au coup d’Etat qui venait d’être perpétré ».

Le SG Désiré Ouédraogo, victime d’une naïveté administrative...

Pourtant, poursuit-il, « dans les faits, le SG a été convoqué par le Secrétariat général du gouvernement et du Conseil des ministres, comme les autres SG, pour répondre à l’appel du Général Diendéré, qui les avait chargé, en outre, par voie de presse, de continuer à expédier les affaires courantes ». Pour les artistes qui défendent la cause du secrétaire général Désiré Ouédraogo, les Secrétaires généraux, sont des administratifs, des techniciens qui sont là pour appuyer le ministère dans son travail, et celui du ministère de la culture et du tourisme, à l’instar des autres, a répondu à cette convocation, sans arrière pensée. « Il n’a vraiment pas fait cet acte délibérément pour faire allégeance, il a voulu aussi représenter le ministère pour entendre ce qui serait dit. Et lorsqu’il est revenu, il est rentré chez lui. Personne ne peut dire qu’il a travaillé, qu’il a incité des gens à reprendre le service, qu’il a incité qui que ce soit à obtempérer aux instructions des putschistes de l’époque.
Pour nous qui le connaissons depuis belle lurette, c’est un agent très consciencieux, très responsable et très respectueux. Nous disons que tous les torts dont on l’a affublé sont des procès d’intention qui ne peuvent pas être prouvés », soutient Martin Zongo.
Pour avoir pris la démarche de rencontrer le ministre, et pour avoir fait le point global de la situation, les artistes qui soutiennent le SG Désiré Ouédraogo disent avoir appris qu’il n’y a pas eu d’instruction de la part du président, ni du premier ministre, pour qu’il y ait un limogeage général des Secrétaires généraux.
« Il n’appartient pas à la rue de venir soulever des invectives. C’est au ministre d’apprécier. Chacun a sa position et son degré d’engagement politique. Il y a des SG, parce qu’ils sont politiquement plus engagés, ils peuvent être au parfum d’un certain nombre de situations, et parce qu’ils peuvent faire une lecture rapide des conséquences de certains actes, ils se sont abstenus d’aller à cette rencontre. Ce sont des prises de positions personnelles, ça n’a été dicté par personne. Mais il y a certains, et nous considérons que le SG du ministère de la culture et du tourisme est dans ce groupe, qui ont commis une naïveté administrative. Ils sont responsables d’un département dont le ministre a été embastillé, on leur demande de venir rencontrer le puissant du moment. Mais ils répondent à cette convocation comme étant une injonction administrative sans arrière pensé ! Après, on peut lui prêter toutes les intentions, mais ce n’est pas la réalité. Quand vous avez la responsabilité administrative, vous devez assurer la continuité de l’Etat, et c’est ce qu’il a voulu faire », argumente le porte-parole des contre-manifestants.

« Nous sommes venus pour porter un contre coup... »

A les croire, le but de leur manifestation n’est pas d’exiger au ministre de la culture et du tourisme, Jean Claude Dioma, de garder le SG désiré Ouédraogo, mais de faire remarquer que celui-ci est victime d’un procès d’intention. « Nous ne voulons rien imposer au ministre. Nous manifestons pour montrer que ceux qui se sont exprimés n’étaient pas représentatifs du département de la culture. Ici, vous avez les responsables des différentes organisations professionnelles de la culture qui parlent au nom des gens qui sont regroupés dans ces organisations. Ce sont des individus qui ont senti quelque chose dans leur cœur, qu’ils n’assument pas et qui sont venus faire du raffut », regrette Martin Zongo, pour qui, on ne peut pas leur prêter plus de responsabilité ou plus de sagesse ou d’expérience que les contre-manifestants. « Nous sommes venus pour porter un contre coup. Notre point de vue, c’est qu’on a chargé excessivement notre SG, on lui a prêté des intentions qui ne sont pas les siennes, de nature à pourrir l’atmosphère, jusqu’à ce qu’il rende sa démission. Mais la décision étant dans la main du ministre, nous voulons dire au ministre, vous décidez en fonction du degré de confiance que vous avez avec votre SG, et pas sur la pression d’une dizaine de manifestants », a-t-il conclu. En l’absence du ministre Jean Claude Dioma, c’est son directeur de cabinet, Boureima Djiga, qui a reçu les contre-manifestants. Après les avoir écouté, il a promis de transmettre leur message au ministre.

Les manifestants qui supportent le SG Désiré Ouédraogo ont eu le soutien du Syndicat National des Travailleurs de la Culture et du Tourisme (SYNATRACT), qui, à travers son porte-parole, Léman Sibidé, a exprimé sa consternation suite aux événements de ces derniers jours et qui ébranlent la bonne marche du département de la culture et du tourisme.

De l’avis de Léman Sibidé, les artistes ne sont que des collaborateurs du ministère de la culture et du tourisme et, par conséquent, devraient au préalable aviser le SYNATRACT, avant d’entamer leur mouvement. « En plus, ce n’est pas le seul SG du ministère en charge de la culture qui est allé à la rencontre du général Diendéré. Nous aurions pu comprendre les artistes dans leur démarche s’ils avaient demandé le départ de tous les SG qui sont allés à la rencontre du général putschiste », s’offusque-t-il.

Sur la position du SYNATRACT par rapport à la démission du Secrétaire Général Désiré Ouédraogo, son porte-parole y est réservé. « Sur la démission du SG, c’est une question entre responsables. Si le ministre fait toujours confiance à son SG, qu’il le garde et qu’ils travaillent ensemble. C’est une question qui doit se régler entre eux. Nous, ce que nous demandons, que des perturbations venant de l’extérieur ne viennent pas entamer le dévouement des agents », martèle-t-il, et de déplorer que « les artistes ne soient pas unis face à un problème d’intérêt national ».

Max Junior

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