Le vendredi 12 décembre n'a pas été une journée comme les autres au siège de la CAMEG. Les travailleurs ont, en effet, déserté leurs bureaux pour tenir une Assemblée générale (AG) extraordinaire. Objectif: protester contre la décision prise en Conseil des ministres le 10 décembre dernier de nommer Mahamoudou Compaoré au poste de Directeur général (DG) de l'association. Cette nomination suscite beaucoup d'inquiétude chez les travailleurs, a affirmé la déléguée du personnel, Carole Benon: «Suite à la décision du Conseil des ministres de nommer un nouveau Dg, on s'est réuni en AG ce matin parce que les gens ne comprenaient pas cette décision. Au vu de ce qui est dit sur celui que l'on a nommé, on a quand même une inquiétude».
Mais au fait, qu'est-ce que l'on reproche concrètement au nouveau DG? Ce qu'on lui reproche, a expliqué Carole Benon, c'est surtout le côté moralité. Dès sa nomination et surtout au niveau des réseaux sociaux, a-t-elle précisé, il est dit que c'est une personnalité qui n'a pas une bonne moralité. «Ça nous inquiète beaucoup car gérer une structure comme la CAMEG, il faut choisir la bonne personne qu'il faut. Donc cela nous inquiète» a renchéri la déléguée du personnel.
Ils disent ne pas contester l'autorité de l'Etat mais souhaitent que la voie à suivre pour le recrutement du DG suive la procédure normale.
A l'en croire, Mahamoudou Compaoré a passé une dizaine d'années à la Direction générale de la pharmacie, du médicament et des laboratoires (DGPML). Son passage dans cette direction semble avoir laissé des traces. «Selon nos informations, il a fait plus de 10 ans à la DGPML et les gens ne sont pas satisfaits de son passage là-bas. Donc, nous, on se pose la question si véritablement il pourra gérer la CAMEG. On n'est pas contre la personne, on ne remet pas en cause ses compétences, mais on se dit que la moralité y va pour quelque chose» a martelé Carole Benon.
Celle-ci a surtout insisté sur le fait que les travailleurs de la CAMEG ne veuillent pas remettre en cause, loin s'en faut, l'autorité de l'Etat. Mais le mode de nomination du nouveau DG, a-t-elle soutenu, ne s'est pas faite suivant la procédure normale. «Nous voulons quand même attirer l'attention du gouvernement que la CAMEG a ses procédures de recrutement. C'est un changement qui est là. Nous avons espéré qu'avec ce changement, au moins les nouvelles autorités allaient respecter le principe, les textes de la CAMEG. Il est stipulé qu'à la CAMEG, pour recruter un nouveau DG, il faut passer par l'avis de recrutement. Nous avons espéré que cet aspect soit respecté. A notre grande surprise, on est revenu au même système qu'avant. Pour recruter un DG de la CAMEG, il faut lancer un avis de recrutement. Et c'est le conseil d'administration qui statue sur tout cela. Nous osons espérer que tout cela quand même soit respecté. Malheureusement, nous constatons que c'est toujours des nominations en Conseil des ministres» a déploré Carole Benon.
Certains de ses collègues de service évoquent d'autres raisons qui les poussent à rejeter en bloc la nomination du nouveau DG. «Mahamoudou Compaoré est Docteur en pharmacie. Pour une structure comme la CAMEG, il faut un bon gestionnaire. Pendant son passage à la DGPML, Mahamoudou Compaoré a fait une gestion calamiteuse. Et puis, c'est le cousin de François Compaoré. Il a même largué le ministre de la Santé, Seydou Bouda en 2011, qui voulait l'enlever de son poste en lui rétorquant que s'il avait consulté François Compaoré avant de vouloir l'évincer de son poste. Il a une moralité douteuse et l'ordre des pharmaciens est même contre sa nomination au poste de DG de la CAMEG» a confié un travailleur sous le couvert de l'anonymat.
Que comptent-ils faire si le gouvernement ne revenait pas sur sa décision? A ce sujet, la réponse de la déléguée du personnel est claire: «Nous attirons l'attention du gouvernement sur nos préoccupations, sur notre inquiétude. Au cas où le gouvernement ne revient pas sur la décision, nous allons prendre l'opinion à témoin. Si jamais demain, il y a un problème à la CAMEG, il sera tenu pour responsable de ce qui va se passer. Nous demandons quelqu'un de neutre, quelqu'un qui vient avec ses compétences et qui gère la CAMEG normalement» a souhaité Carole Benon.
Au moment où nous quittions les lieux aux environs de 18 heures, les tractations entre les travailleurs se poursuivaient.
Affaire donc à suivre.
Saïdou Zoromé