Assassinat Norbert Zongo an 18 : Un silence de tribunal

| 14.12.2016
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Assassinat Norbert Zongo an 18 : Un silence de tribunal
© DR / Autre Presse
Assassinat Norbert Zongo an 18 : Un silence de tribunal
13 décembre 1998 - 13 décembre 2016. Cela fait 18 ans, jour pour, jour que le journaliste Norbert Zongo a été assassiné. Le collectif des organisations démocratiques de masse et des partis politiques a commémoré l’évènement hier à Ouagadougou. Faits marquants : dépôt de gerbes de fleurs, marche-meeting et sit-in silencieux devant le palais de justice pour dénoncer les 18 ans de silence du tribunal dans la disparition tragique de l’ex-directeur de publication de l’Indépendant.


Ce 13 décembre marque le 18e anniversaire de l’assassinat de Norbert Zongo et de ses compagnons d’infortune. La commémoration de cette journée noire a commencé avec un dépôt de gerbe de fleurs sur la tombe de l’illustre journaliste, celles de ses compagnons et des victimes de l’insurrection et du coup d’Etat au cimetière de Gounghin.

A cette occasion, le président de l’association des journalistes du Burkina, Guézouma Sanogo s’est adressé au défunt confrère : «Le pouvoir de Blaise Compaoré, sous lequel le crime odieux a été perpétré, a tour à tour usé du mensonge, du dilatoire... pour empêcher que la lumière ne soit faite sur ton assassinat et celui de tes compagnons. Certes ton dossier a été rouvert, une rue t’a été dédiée, trois suspects identifiés ont été inculpés. Mais ton dossier n’a pas été jugé. Quelle honte ! » Le recueillement au cimetière est suivi d’une marche-meeting qui a démarré à la place de la Nation.

9 heures 45, la foule prend la direction de la place du Lion. Des jeunes vêtus de gilets verts avec l’aide d’une patrouille de la CRS ouvrent la voie. On scande des slogans contre l’impunité. Une fois devant la Maison du Peuple, une des boutiques joue à fond la caisse la musique d’Alpha Blondy «Journalistes en danger ».

La foule reprend en chœur : «Au clair de la lune mon ami Zongo...», titre consacré au journaliste assassiné par le reggaeman ivoirien. Une fois devant le palais de justice, les messages hostiles fusent de partout. «Les complices, les protecteurs des assassins sont des assassins. A bas la justice pourrie !» crie la foule.

10 heures 40 : les manifestants sont de retour à la place de la Nation pour le meeting. « Alors qu’on leur demande justice pour Norbert Zongo, pour les victimes de l’insurrection, les victimes du putsch, ils ferment leurs yeux, leurs bouches, leurs oreilles. Pendant qu’on leur demande la justice, ils arrêtent l’activiste Naïm Touré », s’indigne Chrysogone Zougmoré.

Le temps court mais l’affaire Norbert Zongo et ses compagnons d’infortune est encore pendante à la justice. La chute du régime de Compaoré puis l’inculpation le 10 décembre 2015 du soldat Christophe Kombacéré, du caporal Wampasba Nacoulma et du sergent Banagoulo Yaro avaient laissé entrevoir des lueurs d’espoir. Aujourd’hui le collectif estime que la commémoration du 18e anniversaire du drame de Sapouy se tient dans un contexte national marqué par le maintien presque en l’état de certains dossiers judiciaires dont on pensait qu’ils connaîtraient à ce jour un règlement définitif ou, à tout le moins, une avancée notable.

«Hélas ! L’impunité à la peau dure et les « anciens-nouveaux » dirigeants semblent la consacrer », se désole Chrysogone Zougmoré. Aussi proteste-t-il contre «le silence macabre, insultant, inacceptable, indigne, etc.» sur le dossier. De cet état de fait il conclut que le traitement des dossiers connaît les mêmes misères que sous le règne du CDP de Blaise Compaoré et qu’il semble que les ‘’nouveaux-anciens’’ acteurs au premier plan de la scène politique avaient des choses à se reprocher et donc à cacher. Loin de se résigner, il invite à poursuivre inlassablement, avec abnégation et plus de détermination la lutte pour le jugement du dossier Norbert Zongo.

Dans l’après-midi à 15 heures, d’autres acteurs donnent rendez-vous aux Burkinabè pour la même cause.

13 minutes de silence comme 13 décembre

En effet, les organisations professionnelles des médias et des organisations de la société civile ont observé 13 minutes de silence devant le palais de justice pour demander justice pour Norbert Zongo. Pour ces derniers, tout ce temps sans la justice est une honte. Le musicien et activiste du mouvement ne cache pas ses sentiments.

«18 ans, c’est à la limite du scandale. Le mouvement de ce soir, c’est la détermination du peuple contre le silence obscur des institutions judiciaires, politiques, l’appareil d’Etat qui ne permet pas de voir clair dans ce dossier ; de mettre des noms sur des criminels qui ont assassiné la liberté d’expression en 98. 18 ans après, il n’est pas normal qu’on soit encore à ce stade, surtout dans un contexte post insurrection», s’insurge Smockey. «Est-ce que ce n’est pas histoire de gagner du temps pour permettre aux auteurs de pouvoir s’éclipser ?» s’interroge le rappeur.

Lévi Constantin Konfé

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