Imprimer cette page

Verdict du procès « Ousmane Guiro » : Des Burkinabè entre satisfaction et déception pour défaut de peine plus lourde

| 24.06.2015
Réagir
Verdict du procès « Ousmane Guiro » : Des Burkinabè entre satisfaction et déception pour défaut de peine plus lourde
© DR / Autre Presse
Verdict du procès « Ousmane Guiro » : Des Burkinabè entre satisfaction et déception pour défaut de peine plus lourde
Le dossier Ousmane Guiro du nom de l'ancien directeur général de la Douane a connu un dénouement le 20 juin 2015 lors des assises criminelles devant la cour d'appel de Ouagadougou, ouvertes du 15 au 30 juin 2015. Le verdict de l'un des dossiers judiciaires les plus médiatisés est désormais connu : emprisonnement d'un an et le versement d'une somme de 10 millions FCFA. Toute chose que certains Burkinabè apprécient en ce sens que selon eux, ce verdict consacre l'indépendance de la justice par rapport à l'exécutif alors que d'autres estiment que la peine aurait pu être plus signifiante que celle prononcée.


Fréderic Zoungrana, coordonnateur national du Mouvement soyons sérieux

« Ce verdict servira à comprendre que la Justice n'est pas aux ordres de l'exécutif mais que la Justice est là pour dire le droit »

L'un des dossiers de ces assises criminelles qui était tant attendu à savoir le dossier Ousmane Guiro. Il faut noter que les populations ne s'attendaient pas à un tel verdict. Lorsque nous apprécions ce verdict en toute honnêteté, nous pensons que le droit a été dit et la loi a été appliquée. En ce qui concerne les différents chefs d'accusation, à savoir la corruption passive et l'enrichissement sans cause contre Ousmane Guiro, il n'y a pas matière à condamner. La Justice, à travers ce verdict montre très sérieusement qu'elle est indépendante vis-à-vis de l'exécutif. Au regard des pressions précédentes de l'exécutif sous la Transition, nous craignions que la Justice, à travers cela allait donner un verdict en porte-à faux avec les textes en vigueur. Fort heureusement avec ce verdict, la Justice est en phase avec les états généraux de la justice qui a recommandé une justice relookée en phase avec les aspirations profondes du peuple. Il sera également bien que la Justice puisse aller expliquer aux populations les raisons d'une telle sanction. Il faudrait que les gens ne confondent pas qu'un fonctionnaire puisse voler des milliards et que celui-ci puisse s'en sortir avec une peine minimale par rapport à un autre voleur du quartier qui prend une peine lourde. C'est pourquoi, il serait mieux que les acteurs de la justice explique les raisons de cette décision de justice pour les populations puissent comprendre. Le manque d'information peut être source d'une mauvaise compréhension de l'appareil judiciaire. Pour nous, ce verdict servira de jurisprudence pour que les uns et les autres puissent comprendre que la Justice n'est pas aux ordres de l'exécutif mais que la Justice est là pour dire le droit. C'est selon les textes qui existent que la justice a donné ce verdict. Nous sommes satisfaits de cela parce que c'était le plus grand dossier de crime économique. Il y a plusieurs personnes qui réclament la restitution du restant du milliard de FCFA mais nous pensons que le droit a été bien dit, conformément au respect des textes. L'intéressé a démontré qu'il a reçu cette fortune des dons et gratifications et ces pratiques sont devenues à la limite, légales et même institutionnalisées. Guiro ne peut pas restituer cette somme de près de 2 milliards FCFA. C'est pourquoi, nous félicitons la justice pour avoir transcendé toutes les pressions de la partie civile et de certaines personnes. Nous sentons qu'il y a de l'intox par rapport à cette décision de justice et il faudrait que la Justice travaille à redorer son blason.

Lido Therno, journaliste

« Le cas de Guiro devrait servir de leçon pour les uns et les autres »

Concernant le verdict du procès Guiro, je suis satisfait sur deux plans. Au premier plan on a toujours dénoncé la justice au Burkina Faso en disant que c'est une justice acquise ou que c'est une justice qui défend les riches. Mais depuis l'insurrection tout burkinabé sait que la justice est devenue plus indépendante. Donc cette justice s'est prononcée en ne regardant pas les humeurs des autres, en ne tenant pas compte de l'opinion nationale ni de l'influence des gouvernements. Ce qui veut dire que la justice s'est prononcée en s'appuyant simplement sur les textes. Aujourd'hui, je peux dire que le procès me satisfait personnellement parce que tout simplement, ce qui a été dit a été fait à partir des textes qui régissent la justice burkinabé. C'est vrai que pour certains il aurait fallu condamner GUIRO a une peine plus lourde. Mais finalement en ce qui concerne ceux qui défendent GUIRO, on a entendu ses avocats s'exprimer en disant que pour eux, le cas de leur client ne méritait pas une sanction parce qu'il n'a pas commis de faute. C'est le principe dans un Etat de droit, parce que dans un Etat de droit, d'avoir un avocat. Si nous n'étions pas dans un Etat d'exception on allait juger la personne sans avocat, la condamner pour faire plaisir. Et aujourd'hui ce qui me réjouit, c'est vrai qu'on n'a pas condamné pour faire plaisir, mais on a simplement dit que ce sont les textes qui ont été appliqués. Le ministre de l'Administration territoriale, avait dit, dans une de ses conférences de presse en parlant des arrestations que des dignitaires de l'ancien régime, qu'il s'agissait de moraliser la vie politique. Et que moi en ce temps, j'avais répondu c'est vrai, il y a des actes qui ont été posés mais ça sera difficile pour qu'une simple arrestation ou un simple jugement soit un exemple que les uns et les autres vont suivre. Nous pensons qu'il faut travailler à sensibiliser les gens parce que lorsqu'ils sont nommés, ils ont tendance à vouloir se remplir les poches. Cela est devenu presque la gymnastique favorite des uns et des autres. Confier une responsabilité ne veut pas dire qu'il faut se remplir les poches. Le cas de Guiro devrait servir de leçon pour les uns et les autres. Il évoque les dons et les gratifications lors des baptêmes ou autres manifestations mais tout le monde sait qu'on ne lui a pas remis l'argent parce qu'il est un simple individu. C'est parce qu'il est probablement directeur de la douane. Ce qui veut dire qu'on s'attend peut être à autre chose en contrepartie. Malheureusement si on n'arrive pas à justifier la contrepartie, effectivement cela pose un problème.

Michel Iboudo, étudiant en anglais

« L'affaire Guiro servira de baromètre pour mesurer le degré de corruption qui régnait au Burkina ».

Personnellement, j'ai été déçu après avoir entendu le verdict. C'est vraiment décevant de voir un simple Directeur général de douane qui se retrouve avec 2 milliards, dans un pays pauvre comme le Burkina où la majorité n'a même pas le minimum pour vivre. Cela prouve à quel point le régime déchu de Blaise était corrompu. L'affaire Guiro servira de baromètre pour mesurer le degré de corruption qui régnait au Burkina. Mais je ne suis pas étonné du verdict à partir du moment où Guiro lui-même menaçait les juges. En plus de cela, il y a le ministre de la Justice, d'antan qui disait que Guiro n'est pas n'importe qui, qu'il avait du soutien. Il semble encore en avoir au Burkina. Je pense que le minimum serait 5 ans de prison ferme et une amende de 500 millions FCFA. Je suis vraiment déçu.

Michel Koumbem, étudiant en master 1 anglais

« Il devrait être amendé avec une peine d'emprisonnement ferme et non avec sursis »

Concernant l'affaire Guiro, on n'attendait pas à mieux que ça. La justice ne pouvait pas faire mieux que ça, puisque « Guiro n'est pas n'importe qui ». On savait que la condamnation ne pouvait pas être autrement. Maintenant avec ce verdict, il est totalement libre de faire ce qu'il veut. Cela veut dire qu'au Burkina, le « plus rien ne sera comme avant » est nul. Le procès Guiro devrait être un exemple pour tous ceux qui iront dans le même sens que Guiro. Les juges devrait confisquer la somme qu'il détenait, l'amender et lui donner une peine de d'emprisonnement ferme, mais pas avec sursis.

Raphael Bouda, étudiant en Philosophie :

« Les avocats n'ont pas été capables de prouver que Guiro a volé, donc la sanction prononcée est logique »

Je pense que ce dossier est l'un des plus emblématiques qui nous indique la nature de la 4eRépublique. C'est l'emblème de la corruption. Les avocats n'ont pas été capables de prouver que Guiro a volé. Par consequent, la sanction qui a été prononcée est logique. Elle prouve l'incapacité des avocats à pouvoir prouver les faits qui ont été reprochés à Guiro. Cela remet la question de la justice à l'ordre du jour. On a eu des assises, des rencontres, mais ce sont des assises qui, loin de réconcilier la justice au peuple burkinabè seraient des assises de blanchissement des criminels. A l'allure où nous allons, il est logique de craindre le dénouement de cette affaire. Je pense que les sanctions tiennent compte des accusations. Donc la sanction qui a été infligée correspond à l'accusation et à l'incapacité de prouver cela. Ce n'est pas à Guiro de justifier qu'il a volé. C'est aux avocats et à la partie civile de le prouver.

Brahima Diarra, étudiant en lettres modernes

« Je suis vraiment resté sur ma soif ».

Malgré toutes les accusations, c'est une corruption passive qui a été retenue contre lui. Si quelqu'un a été corrompu passivement, cela veut dire qu'une autre a fait l'action. Parmi ceux qui lui ont donné les enveloppes, figure le nom de Boureima Ouédraogo. Pourquoi n'ont-ils pas été poursuivis dans ce dossier ? Je constate une légèreté de la part de la justice. Depuis 2011 jusqu'aujourd'hui, les gens n'ont même pas cherché à comprendre le fond du dossier. La justice a simplement retenu ce que le citoyen lamda, a comme information. Normalement, avant de prendre, les décisions, il faudrait chercher à savoir les raisons de ces dons par exemple de Boureima Ouédraogo. Je pense que 5 millions FCFA dépasse vraiment le cadre du cadeau. Il faut dire que nous avons une justice superficielle seulement. Je suis vraiment resté sur ma soif.

Noel Pagbèlguem, étudiant en anglais

« L'affaire OBOUF est liée à l'affaire Guiro »

Ce verdict peut être surprenant pour ceux qui ne sont pas avisés, mais pas pour ceux qui le sont. Aussi, les autorités de la Transition, à travers leurs agissements, montrent clairement que l'affaire Guiro ne peut pas avoir un dénouement à la hauteur des attentes des uns et autres. Pourquoi est ce qu'ils n'ont pas pris le soin de chercher à savoir pourquoi Guiro a reçu ces cadeaux ? Pour ce qui concerne le cadeau de OBOUF, pour que des produits avariés puissent rentrer au pays, il est obligatoire qu'ils passent au niveau de la douane. Donc l'affaire OBOUF est liée à l'affaire Guiro. C'est une justice des forts contre les faibles. Une enquête devrait être faite sur tous les biens de Guiro, afin de voir s'il y a une proportionnalité entre le salaire d'un Directeur général de la douane et les biens qu'il a acquis. Ceux qui sont en quête de la justice doivent continuer leur travail pour qu'on arrive un jour à purifier notre justice. Pourquoi la justice a fermé les yeux sur la déclaration des douaniers où ils disent que Guiro recevait 380 millions FCFA des douaniers.

Cheick Omar Konaté, étudiant en 2ème année d'Anglais/UO

« En traduisant Guiro en justice, c'est un signal fort aux dirigeants actuels de la douane »

Mon avis concernant l'affaire de l'ex DG de la douane, Guiro est que je fais entièrement confiance à la justice burkinabè. Du fait qu'après l'insurrection populaire, les dirigeants actuels ont dit que « plus rien ne serait comme avant ». Donc, je pense qu'on ne pouvait pas s'attendre à mieux. Je suis un peu satisfait, car cela donnerait courage à la justice de poursuivre d'autres personnes puisqu'il faut un début à toute chose. En traduisant Guiro en justice, c'est un signal fort aux dirigeants actuels de la douane.

Harouna Sawadogo, UFR-SH/UO

"Il est normal qu'un DG de la douane vole 2 milliards FCFA"

C'est un jugement qui ne dit pas son nom. L'affaire Guiro, c'est un règlement de compte. L'affaire OBOUF est un crime plus grave, mais il a été condamné seulement à un an de prison. Un DG de la douane qui vole 2 milliards, c'est normal.

Par VZ, IO, RK

Publicité Publicité

Commentaires

Publicité Publicité