Lundi, ce n'était qu'une sorte d'entrée en matière de ce long et pénible travail d'expertise des célèbres tombes du cimetière de Dagnoën avec la remontée en surface des restes présumés de Noufou Sawadogo et Amadé Sawadogo.
La sépulture dont l'examen était le plus attendu a été éventrée hier en fin de journée. Comme vous l'avez sans doute imaginé, il s'agit de celle de Thomas Sankara, suivie dans l'après-midi des tombes de Gouem Abdoulaye puis de Somda Der. Ce qui porte le nombre de corps déterrés à cinq sur treize au deuxième jour de l'opération.
De la tombe présumée de leader de la Révolution démocratique et populaire, les experts ont remonté des ossements, des morceaux de tissus et une bande de ruban rouge.
La sépulture officielle de Thom Sank n'est donc pas vide, comme le redoutaient certains. Et on imagine le soulagement qui est celui de ses ayants-droit et de toute sa famille politique vu que toutes sortes de rumeurs ont circulé sur le sort réservé à la dépouille de l'ancien président du CNR. Pour autant les restes humains et vestimentaires appartiennent-ils véritablement au charismatique chef de la Révolution burkinabé ? C'est l'une des principales questions à laquelle devront répondre les trois médecins-légistes commis à la tâche d'identification.
On attend donc avec impatience les résultats des tests ADN pour la suite d'une instruction judiciaire qui s'annonce longue.
Car une chose est de mettre formellement un nom sur chaque corps, du moins ce qui en reste, et une autre est de remonter aux éléments du commando qui ont fait le coup de feu et subséquemment aux commanditaires du massacre.
Après donc le travail de bénédictin des médecins-légistes et aussi des experts en balistique qui devront déterminer les types d'armes qui ont servi à abattre Thomas Sankara et ses douze compagnons, il reviendra à la justice militaire de démêler cet écheveau politico-militaire trois décennies après les faits. Titanesque.
Certes, des témoins de cette tragédie sont morts, souvent dans des circonstances troublantes. Mais beaucoup d'autres, eux, sont encore en vie et méritent d'être entendus, s'ils ne l'ont pas encore été.
Tout comme doivent être auditionnés tous ces hommes politiques qui ont été de toutes les missions pour expliquer et justifier la mort de « Sankara le renégat ».
Tout ce beau monde-là, s'il devait accepter de collaborer avec la justice sans rechigner, ferait progresser les enquêtes.
Mais puisqu'on dit que c'est le dossier qui conduit le magistrat instructeur et non l'inverse, nul doute que le commandant François Yaméogo accostera sur les rivages vers lesquels mènent certaines pistes intéressantes.
Maintenant il faut espérer qu'en même temps que les tombes, on n'a pas ouvert une véritable boîte de Pandore au contenu insoupçonné.
Alain Saint Robespierre