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Déclaration des biens des personnalités: au Burkina Faso, on fait la nique à la loi
Sur proposition du Premier ministre, le président français François Hollande a mis fin aux fonctions de Thomas Thévenoud, le jeudi 4 septembre 2014. Il est reproché à Thomas Thévenoud (qui occupait le poste de secrétaire d'Etat auprès du ministre des Affaires étrangères, chargé du Commerce extérieur, de la Promotion du tourisme et des Français de l'étranger) de n'avoir pas déclaré tous ses biens et impôts «dans le cadre des nouvelles normes mises en place par le gouvernement dans le cadre de la transparence de la vie politique» selon un communiqué de l'Elysée. Thomas Thévenoud a aussitôt été remplacé par Matthias Fekl.
Les Burkinabè peuvent envier François Hollande qui a posé cet acte parce qu'ici au Faso, ne pas déclarer ses impôts et ses biens est un acte anodin. Au Faso, voler les ressources publiques relève plutôt d'un acte de bravoure, la fraude et la corruption étant érigées en système de gouvernance.
Piller les ressources publiques et narguer le peuple est la devise au Burkina. Combien sont-ils de ministres, de présidents d'institutions, de directeurs de sociétés d'Etat ou de simples agents dont les noms sont cités dans des rapports d'inspections de l'Autorité supérieure de contrôle d'Etat (ASCE) ou dans les rapports de la Cour des comptes sans être inquiétés?
Les Premiers ministres Tertius Zongo et Luc Adolphe Tiao, qui ont manifesté une volonté de mettre fin à l'impunité dont jouissent ces personnes, sont restés au stade des intentions. Tertius Zongo n'a pas vidé les dossiers de corruption pleins ses tiroirs et Luc Adolphe Tiao lui a emboité le pas. Pourtant, ils pouvaient au moins remplacer les personnes mise à l'index dans ces rapports, à défaut de les sanctionner sur le plan disciplinaire.
En dehors des cas Guiro, l'ex-Dg des douanes chez qui des cantines contenant près de 2 milliards de FCFA ont été découvertes et du cas Joseph Paré, ex-ambassadeur du Burkina Faso à Paris, dont un rapport de l'ASCE a révélé la mauvaise gestion au moment où il a été ministre, combien de personnes ont été remplacées à leur poste suite à la parution d'un rapport?
Pourtant, dans ce même rapport, le lotissement de Boulmiougou a clairement identifié les responsabilités de l'ancien maire, Séraphine Ouédraogo, sans que celle-ci ne soit inquiétée. Au contraire, la personne qui séjourne depuis janvier 2014 à la MACO n'est autre que le comptable du lotissement.
La gestion au niveau de la CAMEG a aussi été épinglée. On se souvient que la commission d'enquête parlementaire sur les marchés publics réalisée en 2012 a mis le doigt sur les marchés passés dans le cadre du projet ZACA, les salles de conférences de Bobo-Dioulasso et de Ouahigouya, les centrales de Komsilga 1 et 2. Toutes les personnes qui ont géré ces dossiers sont toujours en poste, à l'exemption du DG de la CAMEG.
Pourtant, de l'argent public a été mal géré et même dissipé sans que les auteurs ne daignent craindre quoi que ce soit.
La loi sur la déclaration des biens des personnalités qui existent depuis 1995 et rallongée en 2002 connaît des difficultés d'application. Rares sont les personnalités qui sont informées de cette loi et aucun dispositif de contrainte des déclarations n'existe encore moins de vérification de l'exactitude des déclarations. Le Burkina Faso vit dans une ambiance de mal-gouvernance. Le responsable qui ne vole pas est hué et blâmé tandis que celui qui pille le Trésor est décoré et loué.
Vivement une loi sur l'enrichissement illicite et le conflit d'intérêt. Il faut simplement que les choses changent au Burkina Faso.
Les Echos du Faso