La disparition tragique de cet homme de plume, alors Directeur de publication du journal «l'Indépendant», ainsi que celle de ses 3 compagnons sur la route de Sapouy, le 13 décembre 1998, restera gravée dans la mémoire collective comme un triste souvenir. On se rappelle que son assassinat avait engendré une colère généralisée du peuple, qui a réclamé à travers plusieurs manifestations que justice soit faite. Cela a entrainé la mise en place d'une Commission d'enquête indépendante dont les travaux avaient permis de désigner des suspects sérieux membres du Régiment de sécurité présidentielle (RSP).
En revanche, on constate que 16 ans après, le statu quo est de mise. Toute la lumière escomptée n'a pas été faite sur l'assassinat de Norbert Zongo et ses compagnons. La famille éplorée et le peuple burkinabè en général attendent toujours légitimement que justice soit rendue.
En ce jour de commémoration du triste anniversaire, ses anciens camarades de lutte ont sonné encore le rappel des troupes pour lui rendre hommage et renouveler leur volonté farouche de voir aboutir le dossier. Ils se souviennent et se souviendront sans doute encore longtemps de celui qu'ils appelaient affectueusement Norbert qui a marqué l'opinion publique par son courage, sa ténacité, son attachement pour la défense des libertés et de la justice. Son engagement à faire triompher les idées de ces valeurs cardinales dans un état démocratique était perceptible à travers ses nombreux écrits.
«Supposons que l'Indépendant arrête définitivement de paraître pour une raison ou pour une autre (la mort de son directeur, son emprisonnement, l'interdiction définitive de paraître, etc). Nous demeurons convaincus que le problème David restera posé et que tôt ou tard, il faudra le résoudre. Tôt ou tard!». Cet extrait des écrits prémonitoires du journaliste Zongo publiés dans «l'Indépendant n°274 du 8 décembre 1998», soit moins d'une semaine avant son assassinat, traduit à juste titre son engagement dans son métier. Toute chose qui explique aussi toute la détermination de ses anciens confrères à poursuivre la lutte jusqu'à ce que lumière soit faite sur sa disparition. Ce besoin de voir jaillir la lumière sur l'assassinat de leur ancien confrère est exprimé de façon symbolique par une lampe allumée en permanence au Centre national de presse qui porte justement son nom (Centre national de presse Norbert Zongo).
Cette lampe allumée nuit et jour depuis 1998 ne s'éteindra que quand lumière sera apportée au dossier Norbert Zongo. Ses anciens camarades, comme les familles éplorées et tous les Burkinabè épris de justice attendent de connaître les auteurs et commanditaires de l'acte barbare commis sur Norbert Zongo et ses compagnons.
Cette attente est d'autant plus douloureuse et difficile à supporter que des tentatives de brouiller les pistes pouvant apporter la lumière avaient été orchestrées par le pouvoir de la 4e République. La preuve, une ordonnance de non-lieu sur le dossier avait été prononcée en août 2006 par les autorités. De nombreux Burkinabè avaient commencé à perdre espoir, convaincus que sous le règne du pouvoir de la 4e République, il n'y aurait pas de lumière sur le dossier Norbert Zongo.
Il a fallu attendre une quinzaine d'années de lutte pour que renaisse un grain d'espoir avec la décision rendue par la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples le 28 mars 2014. Cette décision accueillie comme une victoire d'étape par les avocats et défenseurs du dossier, a relevé des insuffisances et des entraves notoires dans le traitement de l'affaire Norbert Zongo sous le pouvoir de la 4e république.
C'est pourquoi la chute de ce pouvoir qui avait travaillé à enterrer ce dossier peut se révéler comme une opportunité, voire une réelle chance à saisir pour faire aboutir le dossier Norbert Zongo ainsi que ceux de toutes les autres personnes assassinées sous le règne de Blaise Compaoré. L'espoir reste permis car le gouvernement de la Transition, par l'entreprise du président, Michel Kafando et du Premier ministre, Yacouba Isaac Zida, avaient laissé entendre que plusieurs dossiers seront traités avec diligence.
En attendant de voir l'acte concret joint à la parole des autorités actuelles, on ne peut donc que souhaiter qu'il en soit ainsi et que justice soit rendue!
Saïdou Zoromé