Barreau du Burkina : « Lénine » reprend le bâton

| 08.06.2015
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Me Mamadou Savadogo - Bâtonnier de l`Ordre des Avocats du Burkina. Photo d'archives, utilisée à titre d'illustration
© DR / Autre Presse
Me Mamadou Savadogo - Bâtonnier de l`Ordre des Avocats du Burkina. Photo d'archives, utilisée à titre d'illustration
Me Mamadou Savadogo a été plébiscité bâtonnier de l'Ordre des avocats du Burkina par 116 voix sur 157, au terme de l'assemblée générale élective, tenue le samedi 6 juin à Ouagadougou. Réclamé par ses consœurs et confrères, il replace Me Mamadou Traoré, en fin de mandat. Ancien bâtonnier dans les années 1997, le nouvel élu a aussitôt affiché ses ambitions : prêcher le respect des règles déontologiques, combattre « résolument » les mauvaise pratiques, ouvrir la profession aux plus jeunes. Celui que des camarades appellent « Lénine », il aime la littérature russe et autres reprend donc la tête du barreau 18 ans après son premier passage.

C'est à la mi-journée que le verdict est tombé. « C'est par un score stalinien qu'il a été élu, on lui fait confiance », a plaisanté un avocat sortant de la bibliothèque Bâtonnier Frédéric T. Pacéré où le vote s'est déroulé à huis clos. Me Mamadou Savadogo a raflé 67% (116 voix) des chiffrages exprimés. Ses deux concurrents sont arrivés loin derrière, avec 25 % (43 voix) pour Me Abdoul Ouédraogo et environ 8% (13 voix) pour Me Kyelem de Tambela Apollinaire. Pour convaincre ses consœurs et confrères, Me Savadogo s'est présenté comme « un homme libre », dévoué, qui ne craint pas l'affrontement, si cela est nécessaire, qui tient au respect dû aux avocats. Un homme qui ne cherche pas à plaire, ni à entrer dans les bonnes grâces de qui que ce soit. Son discours a visiblement fait mouche. Dans son programme de mandature, Mamadou Savadogo appelle à « un réarmement moral », c'est-à-dire à la création d'un discours fédérateur auquel s'identifieront tous ses confrères. C'est à cette seule condition que n'importe quel programme pourra être réalisé, de son point de vue. A propos de programme, le nouveau bâtonnier entend proposer en assemblée générale, des réformes ambitieuses. Il s'agit notamment, de la délivrance du CAPA (Certificat d'aptitude à la profession d'avocat), seulement après « une bonne et complète formation » des admis à l'examen d'entrée au barreau. La fixation d'une limite d'âge pour accéder à la profession d'avocat, l'assurance d'une publicité fonctionnelle au profit de l'Ordre, la sécurité sociale à tous les avocats, la formation continue des hommes en noir, la parution effective du bulletin du Bâtonnier et le soutien aux syndicats d'avocats tiennent à cœur le nouveau promu. Mamadou Savadogo a aussi promis de travailler dans la continuité de ses prédécesseurs, à qui il a rendu hommage. L'autre challenge du nouveau bâtonnier est justement la poursuite des chantiers ouverts durant la précédente mandature. Il hérite en effet, de chantiers de réforme touchant les questions de la déontologie, de l'organisation du barreau par le recrutement de collaborateurs, afin d'alléger le travail du bâtonnier, de la reprise du chantier du Centre de formation des avocats. Face à ces défis, le bâtonnier sortant, Me Mamadou Traoré, a dit toute sa confiance en la capacité de son successeur à les relever, d'autant plus qu'il a déjà assumé ces fonctions. « L'élection au premier tour avec 116 voix, témoigne d'une très grande attente des avocats et d'une grande confiance en l'homme qui vient d'être élu. » a indiqué M. Traoré. Pour lui, le choix de Me Mamadou Savadogo est judicieux, dans la mesure où le barreau est « à la croisée des chemins » et a besoin pour cela, d'un homme d'expérience. C'est un bâtonnier sortant, tout de même, un peu amer qui cède la place à son successeur. « J'aurais pu laisser à Me Savadogo un Ordre beaucoup plus organisé. Mais, lorsqu'on passe deux ans à rappeler les règles élémentaires à un certain nombre de confrères, deux ans à expliquer aux uns et aux autres, que l'avocat n'est pas un commerçant, que l'avocat assume un service public, ça fait perdre énormément de temps » a déclaré Me Traoré.

Karim TAGNAN
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Un défenseur des avocats à la tête du Barreau burkinabè

La grande majorité des avocats du Burkina a porté son choix sur Me Mamadou Savadogo pour conduire le barreau, les trois prochaines années. Et cela, au moment où les relations entre le barreau et certains avocats, entre le barreau et les magistrats, ne sont pas des plus sereines. Ce choix est clairement celui d'un homme qui a une très haute idée de la fonction de bâtonnier et de l'indépendance de la profession d'avocat. C'est sur ce terrain qu'il s'est le plus illustré en 1997, lorsque Bâtonnier de l'Ordre des avocats du Burkina, il avait tout simplement démissionné de son poste pour protester contre une loi portant réglementation de la profession d'avocat. C'était une façon pour lui de défendre l'indépendance de la profession que la disposition querellée semblait remettre en cause. Ladite loi sera d'ailleurs, abrogée en 2 000. Le nouveau Bâtonnier s'est aussi fait connaître, à travers des dossiers de justice qui ont marqué leur époque. A l'image des affaires Bonzi superstar, du contentieux électoral de la mairie de Bobo, Afakaya, des procès des dirigeants du FPI, du procès de Yaovi Agboyibo, entre autres. Il a même été visité par les muses avec ses dossiers qui ont fait l'objet de son premier livre, intitulé « Plaise au tribunal ! », publié à compte d'auteur en 2008.

K.T

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