Fasozine: Vous êtes venus recevoir les conclusions des rapports sur l’exhumation des restes de Thomas Sankara et de ses camarades ?
Me Bénéwendé Sankara : Tout à fait. Il y a eu deux rapports : le rapport d’autopsie et le rapport d’expertise balistique. Ce qui a manqué parmi les rapports, c’est celui portant sur les tests ADN pour la simple raison que les résultats ne sont pas encore prêts. En ce qui concerne les deux types d’expertises, balistique et d’autopsie, les résultats ont été effectivement livrés et nous avons pris connaissance et chaque famille a du noter mais nous n’avons pas de copies à vous fournir.
A ce jour est ce qu’on peut savoir si c’est bien le corps de Thomas Sankara qui se trouvait dans la tombe exhumée ?
Il y a beaucoup d’éléments qui concourent à pouvoir dire que c’est lui. Mais il faut attendre encore les résultats des tests ADN pour certifier. Cependant, pour ce qui concerne les éléments des autres rapports, en tout cas, il a été conclu que les assassinats perpétrés le 15 octobre 1987 sont d’origine criminelle et les balistiques ont trouvés qu’il s’agissait principalement d’armes à feu puisqu’on a trouvé des projectiles qui ont prouvés que c’était des balles qui ont été tirées et qui ont fait des orifices sur les restes des corps.
Qu’est ce qui est prévu pour la suite ?
La suite de la procédure est que nous avons 15 jours pour faire nos observations et si nous voulons également des contre expertises, nous en avons la possibilité. Mais je dois vous dire que c’est un dossier d’instruction et le juge a voulu que les parties viennent prendre connaissance des éléments du dossier. Nous pensons que la suite est le rapport sur les tests ADN et à partir de là, le juge va certainement continuer les convocations, peut être des inculpations.
A ce jour combien de personnes ont été inculpées ?
Je pense qu’il y a en 8 ou 9... je crois. Il y a en qui sont déjà déférées et il y a en aussi qui ne le sont pas.
Est-ce que le cas du Général Gilbert Diendéré a été évoqué ?
(Hésitations) Je n’ai pas souvenance de cela pour le moment. Le dossier est très volumineux, j’avoue que prochainement on aura plus de détail.
Y a-t-il une date qui est fixée pour les résultats des tests ADN ?
Non pas encore mais ça ne saurait vraiment trainer...
Pour le rapport balistique, est ce qu’on sait si les balles utilisées provenaient des forces armées nationales burkinabè ?
Les types d’armes qu’on a pu identifier, c’est par exemple les G3, les kalachnikovs... il y a même des pistolets automatiques et peut être même des grenades qui ont été utilisées. En somme, des types d’armes relevant de l’armée.
Quel sentiment vous anime en ce moment avec la connaissance de ces premiers éléments sur l’affaire Thomas Sankara ?
Je dirai un sentiment de fierté. Cela fait quand même plus de 28 ans et je crois qu’on voit profiler à l’horizon une instruction sereine, sérieuse où les droits de la défense sont garantis. Ce que nous souhaitons est que le juge ait cette sérénité jusqu’au bout pour faire son travail et qu’on puisse aboutir à la manifestation de la vérité.
Donc vous êtes confiants ?
Tout à fait.
Pouvez-vous nous en dire plus sur les inculpés ?
(Rires) je crois que ce que j’ai pu relever, ce sont des militaires de l’EX-RSP (Régiment de sécurité présidentiel) pour la plupart comme Goambasba, Nabonswendé Ouédraogo. Le médecin est aussi inculpé pour faux en écriture publique, j’en n’oublie... il y a un certain Bancé, Bambara, Traoré, ...bref ce n’est que le début du commencement...
NDLR: La justice militaire, par la voix de son directeur, le Colonel Sita Sangaré, a prévu un point de presse le vendredi 16 octobre prochain pour faire le point sur cette affaire et celui du coup d’Etat du 16 septembre dernier. Pour l’heure, nous vous proposons ci-dessous la brève interview que Me Sankara a accordée aux journalistes qui ont fait le pied de grue pendant plus de 5 heures devant le tribunal militaire de Ouagadougou.
Propos recueillis par Dimitri Kaboré