Interdiction des sachets plastiques: « Des peines en cas de non-respect »

| 29.01.2015
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Interdiction des sachets plastiques: « Des peines en cas de non-respect »
© DR / Autre Presse
Interdiction des sachets plastiques: « Des peines en cas de non-respect »
L'interdiction des emballages non biodégradables entre en vigueur le 21 février 2015, conformément à la loi N° 017-014/ AN. En prélude à cette décision, le directeur général de la préservation de l'environnement et du développement durable, Pr Paul Windinpisidi Savadogo revient, à travers cette interview, sur le bien-fondé de cette mesure.


Sidwaya (S.) : Le 21 février 2015, la loi N° 017-014/ AN sur l'interdiction des sachets plastiques non biodégradables entrera en vigueur. Que dit concrètement cette loi ?

Pr. Paul Windinpisidi Savadogo (P.W.S.) : La loi qui porte interdiction d'importation, de la production et de la distribution des sachets et emballages plastiques non biodégradables a pour objectif de freiner et d'arrêter l'utilisation des emballages et sachets plastiques non biodégradables. Ceci pour éviter la prolifération des déchets de sachets plastiques non biodégradables dans notre pays.

S. : Comment comptez-vous appliquer cette loi ?

P.W.S. : Pour l'application de la loi, il y a déjà des dispositions qui ont été prises au niveau de la douane, la police et la gendarmerie. Au niveau local, les autorités vont procéder au contrôle de la distribution des emballages non biodégradables dans les boutiques, supermarchés et marchés, et cela, dans tous les villages. Le dispositif de contrôle de la mise en œuvre de la loi est déjà en place. Ce qui reste, c'est d'aider les importateurs à faire la distinction entre les emballages non biodégradables et les emballages biodégradables. Cela va nécessiter qu'ils soient homologués pour pouvoir importer les emballages biodégradables, surtout les sachets plastiques biodégradables. Cette homologation se fera au sein du ministère de l'Environnement et des Ressources halieutiques et au ministère de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat. Ces homologations ont déjà commencé et certains importateurs ont même déjà identifié les sources d'approvisionnement.

S. : Avez-vous l'assurance que les importateurs accepteront de respecter la mesure, une fois en vigueur ?

P.W.S. : Tout à fait, ils adhèrent au respect de la loi. Car grâce aux échanges que nous avons eus depuis 2013, ils sont rassurés qu'il n'y aura pas de problèmes d'approvisionnement en emballages biodégradables. Ils ont pris le temps d'aller s'assurer au niveau des sources de production de la disponibilité de ces types d'emballages. Ils ont pu se rendre compte que leurs fournisseurs traditionnels peuvent mettre à leur disposition, les emballages biodégradables.

S. : Comment définissez-vous les emballages biodégradables ?

P.W.S. : Les emballages biodégradables sont des emballages qui vont se décomposer après utilisation, très rapidement. Il s'agit de tous les emballages qui ne vont pas perdurer dans la nature et vont se décomposer en 6 mois ou tout au plus en 2 ans. Cela s'explique par le fait que les microbes les utilisent et les transforment en humus comme dans le compostage. Comme exemple, d'emballages biodégradables, il y a les emballages en papier tel le carton, ceux en tissus ou en plastique. Ces plastiques sont traités de manière à ce qu'ils ne deviennent plus un produit résistant à la dégradation mais vont se décomposer très rapidement. Pour les obtenir, on ajoute des additifs pendant leur fabrication de sorte qu'au bout d'un certain temps lorsque ce plastique se trouve en contact avec le soleil et l'eau, ils se mettent à se fragmenter en des morceaux de plus en plus petits. Ces morceaux plus tard vont être utilisés par des microbes du sol ou être absorbés par les plantes et suivent le même cycle qu'un papier abandonné au sol. C'est ce qui fait que ce type de plastique n'aura plus d'impact négatif sur l'environnement.

Une sensibilisation a été faite et je pense qu'en réalité beaucoup sont informés.

S : Que proposent les ministères en charge de l'environnement et du commerce aux consommateurs en remplacement des sachets ?

P.W.S. : Une sensibilisation a été faite et je pense qu'en réalité beaucoup sont informés. La population pourra remplacer les sachets non biodégradables par les sachets biodégradables, les emballages en carton etc., pour ce faire, nous allons continuer la sensibilisation dans toutes localités, même les plus reculées. Nous allons nous rendre sur le terrain. Certaines directions régionales ont déjà commencé mais d'ici là, toutes vont s'y mettre. Elles vont faire la sensibilisation, donner l'information et surtout rassurer la population de la disponibilité des emballages biodégradables. Elles vont faire comprendre également que ce n'est pas tous les emballages qui sont interdits mais uniquement ceux non biodégradables.

S. : En cas de réticence que prévoyez-vous comme sanctions à l'endroit des contrevenants ?

P.W.S. : En cas de réticence, la loi et les textes d'application prévoient des sanctions lourdes. Il s'agit des sanctions d'ordre administratif et pénal. Au niveau administratif, un importateur qui tente de rentrer avec des emballages non biodégradables sera arrêté à la frontière au niveau de la douane. Au cas où il passe et que nous arrivions à découvrir des stocks d'emballages non biodégradables dans ses magasins, ils seront saisi. Il encourt d'autres peines comme le retrait par exemple de l'homologation au cas où ce serait une fraude avérée. Au niveau des boutiques et des marchés, on peut aller jusqu'à la suspension de l'activité à travers le retrait des autorisations d'exercer. Cela dépendra de l'autorité au niveau local. Les sanctions pénales sont pécuniaires. Et la contravention varie entre 1 à 10 millions de F CFA. Il y a aussi des peines d'emprisonnement pouvant aller de 2 à 5 ans.

S. : Avez-vous suffisamment les moyens pour mieux réussir la communication autour de cette loi dans toutes les contrées du Burkina Faso ?

P.W.S. : Vous touchez à un point essentiel, l'argent. C'est le nerf de la guerre. Nous avons reçu un appui du budget de l'Etat. Nous avons exécuté cet appui en 2014. Et pour 2015, nous attendons que les procédures budgétaires se mettent en place. Nous espérons avoir encore un appui pour continuer. Etant donné que c'est une problématique très importante pour notre pays en termes d'impact sur l'environnement, la santé humaine et animale. Nous pensons pouvoir mobiliser d'autres sources de financement avec les partenaires techniques et financiers que nous avons approchés comme l'ambassade de Chine Taïwan. La coopération taïwanaise a déjà mis à notre disposition, environ 500 mille euros soit environ 327 975 000 francs CFA. Cet appui annuel va nous permettre d'accompagner la mise en œuvre de la loi, surtout pour le traitement des déchets plastiques. Vous savez que même si on arrivait à un moment donné que nous n'ayions que du sachet biodégradable, ça ne sera pas une occasion de les abandonner dans la nature. Il faut les collecter et les traiter. Donc, avec l'appui des Taïwanais, nous sommes en train d'installer un système de collecte et de traitement-pilote tout en espérant que ce système va grandir et être appliqué sur toute l'étendue du territoire.

S. : Ne craignez-vous pas de risque de rétropédalage, comme on l'a vu avec la loi sur le port des casques concernant l'utilisation des sachets non biodégradables ?

P.W.S. : Nous avons pris des dispositions dans ce sens. La première c'est la sensibilisation. Nous avons fait le tour des 13 régions pour rencontrer les autorités qui sont des relais dans le processus, les associations qui interviennent dans le domaine de l'environnent ou le social pour les informer du bien-fondé de cette loi. Ce qui fait que la loi a été acceptée. Malgré les contraintes qu'impose la loi, les acteurs que nous avons rencontrés ont accepté cette contrainte au vu des impacts négatifs des sachets plastiques dans notre environnement. C'est déjà une précaution pour qu'il n'y ait pas de rétropédalage. Deuxièmement, les importateurs et les producteurs de sachets plastiques ont été suffisamment sensibilisés et se sont préparés pour passer au biodégradable. Actuellement, ils ont toutes les capacités à offrir aux consommateurs le biodégradable. Je vous informe que les biodégradables rentrent déjà au Burkina Faso avant même cette date butoir du 21 février 2015.

S. : Un appel à lancer à la population et aux importateurs.

P.W.S. : L'appel que je lance aux importateurs, c'est que pour ceux qui n'ont pas encore commencé à importer les emballages biodégradables, que c'est le moment de le faire pour mettre à la disposition de la population, les sachets biodégradables afin que la loi puisse être respectée.

A l'endroit des populations qui ont aussi un rôle très important à jouer dans le processus, je leur demande d'accepter de faire un choix. Il faut qu'ils choisissent le biodégradable et refuser ce qui ne l'est pas.

Propos recueillis par
Somborigna Djélika DRABO

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