C'est la province du Zondoma que nous avons choisi mais les constats pourraient valoir pour pas mal de localités. Le Zondoma compte une commune urbaine et quatre (4) communes rurales. Nous avons visité quatre de ces localités ; Gourcy- Tougo- Bassi- Léba-Gourcy. Bassi-Léba-Boussou compte au total 1239 enfants casés en classes de 6e sans trop de difficultés. Le foyer des problèmes est Gourcy et Tougo qui ont déjà casé 1061 enfants. La liste additive faisait cas de 586 enfants à caser. A la date du 21 octobre, le directeur provincial de l'éducation nationale du Zondoma (DPENA), Souhaïbou BARRY faisait état de 75% de certifiés casés.
Aminata et Issaka sont des certifiés de la session 2014. Ils ont tous aujourd'hui une ambition commune : aller en 6e. Mais ils rencontrent quelques épines sur leur chemin. Ce mardi 21 octobre, ils ont parcouru environ 10 km pour aller à Gourcy, chef-lieu de la province du Zondoma. Ces deux infortunés, chacun sur son vélo, sont arrivés dans les locaux de la circonscription de l'éducation de base (CEB) Gourcy I avant 7 heures. Portes et fenêtres de la CEB étaient toujours closes. Ils s'asseyent sur deux tables-bancs déposés dehors. Sur le tronc d'un Nimier, ils accotent leurs vélos. Assis, ils ont l'air visiblement fatigués et songeurs. Que faites-vous ici de si bonne heure ?
A cette question, Aminata, très timide se confie d'un ton entrecoupé : « on est là.... pour voir nos noms la liste (additive) ». Mais pourquoi vous êtes en retard. Les autres ont déjà commencé les cours ? Ensemble, ils répondent : « parce qu'il n'y a plus de places au CEG » Il s'agit du CEG de Gnessega, leur village d'origine. « Le directeur de notre école a dit qu'il n'y a plus de place au CEG. On est venu pour voir au niveau de Bethel » précisent les enfants. Le Lycée privé de Bethel se situe à quelques mètres de la Mairie de Gourcy. Il fait partie des cinq établissements privés avec lesquels la direction provinciale de l'éducation nationale (DPENA) compte travailler pour caser les enfants inscrits sur la liste additive. La scolarité dans cet établissement s'élève à 60000f.
Aux environs de 6h 50 arrive un agent de la CEB. C'est monsieur Zabsonré. C'est lui qui a ouvert la porte et ensuite fait sortir le tableau d'affichage. « Venez voir si vos noms se trouvent sur la liste » lance-t-il à l'endroit des enfants. Ceux-ci ne tergiversent pas. Ils avancent et commencent à chercher. Des sourires illuminent leur visage quand ils découvrent leurs noms. « Vous êtes contents ? » C'est également par un sourire qu'ils répondent à cette question.
« On s'embrouille »
Pour beaucoup d'autres, ce n'est pas le même success story, comme celle de Aminata et Issaka. La veille, lundi 20 octobre un soleil d'aplomb tombe sur Gourcy. Monsieur Ouédraogo, un vieux d'environs 70 ans tient à clarifier la situation de sa fille Azara Ouédraogo. Elle est âgée de 14 ans et certifiée de la session 2014. Ensemble sur une moto, ils sont venus à la CEB/Gourcy I pour se renseigner sur le sort de la fille. Ils sont accueillis par deux agents : une fille et un garçon. Les deux tournent et retournent des feuilles, des pages pour vérifier les noms des élèves et voir dans quel établissement ils sont orientés.
Après quelques fouilles, ils retrouvent le nom de Azara. Elle est orientée au lycée privé de Bethel. Un petit ouf de soulagement pour le vieux Ouédraogo. Mais il n'est toujours pas rassuré tant que son enfant n'est pas accepté par les responsables de l'Etablissement. « Ils ont dit que l'Etat doit payer 50.000f. Mais moi je vais aller voir s'ils vont accepter une avance de 15.000f. Les gens disent souvent qu'ils refusent mais je ne sais pas si c'est vrai ou si c'est une simple rumeur »dit-il l'air peu rassuré avant de démarrer sa moto, sa fille à l'arrière. Quelques instants après, arrive un monsieur.
C'est un instituteur. Il est venu vérifier des noms de certains élèves. Après vérification, il se rend compte que certains n'ont pas leurs noms sur la liste additive. Il fait donc appel à son directeur : « monsieur le directeur, est-ce que tous les enfants sont concernés.....Parce que tous les élèves n'ont pas leurs noms sur la liste additive... » Suite à ce coup de fil, un agent de la CEB lui lance avec un air amusé : « Faites attention pour ne pas vous embrouiller » Et le monsieur de rétorquer, la mine décontenancée : « On est déjà embrouillé même... »
A la date du 20 au 22 octobre à Gourcy, beaucoup d'enfants et parents d'élèves ne savaient pas le sort qui est le leur. Comme l'indique une note d'un directeur d'école adressée au chef de la CEB/ Gourcy III sur « la situation des élèves admis à l'entrée en 6e ». En observation de cette note, on peut lire : « Aucun n'est inscrit dans un établissement (...) » La note concernait la situation de six (6) enfants. De nombreuses sources (indirectes) ont fait cas de plusieurs enfants qui sont à la maison à se tourner les pouces. « Il y a mon voisin ou mon parent qui a son enfant qui est actuellement à la maison à ne rien faire » Des informations du genre sont légion. Seulement, quand on demande à leurs auteurs, de vous conduire vers les concernés, ils se rétractent.
« En fait, il y a un peu longtemps que je suis passé là-bas » argumentent ces sources pour se sauver. En ville, la question alimente par moment les conversations entre amis. Chacun va de son inspiration. Comme c'est le cas dans un restaurant situé au bord de la voie. « Cette rentrée-là même on ne comprend rien. On voit toujours des enfants qui se déambulent en ville. » « Ils disent qu'ils vont prendre tous les enfants qui ont eu le CEP l'année derniere en 6e. Qu'ils vont construire des salles pour pouvoir les prendre. Mais depuis là, on ne voit rien. La rentrée..., c'est sûr qu'il y aura des enfants qui vont rester à la maison cette année. »
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