Développement de l’Afrique : Le plaidoyer de Joseph Ki-Zerbo

| 04.12.2013
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Joseph Ki Zerbo en 1978_afp
© DR / Autre Presse
Joseph Ki Zerbo en 1978_afp
oseph Ki-Zerbo s'en est allé le 4 Décembre 2006. A l'occasion du 7ème anniversaire de son décès, nous osons revisiter l'œuvre gigantesque léguée à la postérité pour un véritable développement de l'Afrique, Berceau et Espoir de l'Humanité.

Le Pr Joseph Ki-Zerbo s'est consacré en premier lieu à l'écriture du livre intitulé « Histoire de l'Afrique noire » publié par les Editions Hatier, en 1978. Il nous a rappelé en leitmotiv : « On ne développe pas. On se développe. » D'où, l'importance qu'il donne à la culture qu'il définit dans son livre posthume intitulé « A propos de culture » comme étant« la vie créatrice du peuple, qui transforme le milieu naturel et social » « La ressource des ressources. »

Dans ce premier livre, il définissait la culture comme étant l' « ensemble des outils, c'est-à-dire des valeurs, des idées, des techniques, par lesquelles l'Homme a modifié la nature qui constitue son milieu ».
Le démantèlement du mythe de la fracture...

Au commencement était la négation de l'histoire de l'Afrique. Pour relever le défi de l'Histoire de l'Afrique noire, Joseph Ki-Zerbo a dû surmonter au préalable les obstacles des mythes, « écarter rapidement les barrages des mythes qui se dressaient contre cette Histoire de l'Afrique. »Puis, il a fallu mettre en garde contre le développemensonge : « On développe. » « Il faut prendre garde et ne pas considérer que l'objectif stratégique ultime est déjà connu ». Le risque, selon Joseph Ki-Zerbo, est la réduction du projet de société à un projet économique...

Il explique en outre le mal, la sclérose dont souffrent les peuples d'Afrique. « La culture originelle, autochtone, endogène, voilà la matrice d'où il fallait partir pour édifier une culture de développement, au lieu de la répudier comme allergique à la modernité », indiquait-il. Pour lui, il ne s'agit pas de séparer la culture de l'ensemble du bloc social, ni par conséquent du développement. « Une croissance excluant la culture vraie n'a pas de sens et ne peut que déboucher dans la schizophrénie. Loin d'être seulement une dimension du développement, on peut défendre la thèse du développement lui-même comme culture », foi du Pr. Ki-Zerbo.
Précisant que le développement n'est pas une course olympique, il recommandait tout d'abord de renoncer à la « conception linéaire et, impérialiste du progrès ».Il aimait à rappeler : « nous ne sommes pas sur les mêmes rails. Comment l'Afrique peut-elle être en retard ? »

L'Afrique doit être avant d'avoir

Joseph Ki-Zerbo a tenu à donner sa définition du terme « développement », lui-même importé qui signifie, selon lui,« bien sûr avoir, savoir, mais surtout pouvoir. »
Dans son livre-testament « Repères pour l'Afrique », il l'explique : « Le développement c'est la multiplication des moyens et des fins, des voies, des choix de vie et des raisons de vivre. Le sous-développement, c'est la raréfaction des choix. La misère, c'est ... l'absence totale de choix, l'extermination de la dignité. »

Par ailleurs, « Se développer, c'est multiplier ses possibilités de choix libérateurs. » « Se développer, c'est être, être toujours plus, se reproduire et pas seulement produire. Participer par co-responsabilité. »

Le développement étant par définition un processus endogène, Joseph Ki-Zerbo refuse de réduire le projet de société à un projet économique. Il rapproche l'idée de développement de celle d'accumulation de biens et de services mais aussi de valeurs sociales.

La question centrale, essentielle, primordiale est : le développement pour qui ? Pour quoi faire ? D'où l'importance de la recherche endogène pour l'inventaire et la promotion de nos possibilités productives et de la communication qui doivent dresser de chaque collectivité une image globalement positive et motrice.
Le développement endogène implique une identité africaine authentique.
Si l'on en croit Joseph Ki-Zerbo, « l'endogène » est un « concept stratégique ».
Dans son livre posthume « A propos de culture », il passe en revue des secteurs culturels et leur importance sur le plan du développement : l'alimentation, la nutrition, l'environnement...

Riche de sa longue expérience d'homme politique, Pr. Ki-Zerbo souligne que la démocratie est très importante pour l'économie et pour le développement. « Sans démocratie économique, il n'y a pas de développement. En effet, c'est par la justice de la répartition que les producteurs et les consommateurs peuvent être véritablement de bons agents économiques ; en tant que consommateurs (parce qu'ils ont un pouvoir d'achat, la demande solvable est augmentée) et en tant que producteurs (parce qu'ils se sentent concernés) », écrivait-il.

Vivre et non survivre

Joseph Ki-Zerbo met en lumière le lien étroit entre la CULTURE et le DEVELOPPEMENT. « La revitalisation culturelle en Afrique ne peut se concevoir en dehors d'une base économique » avait-il laissé savoir. Il conseille par conséquent la construction d'une base économique suffisamment solide pour créer des modèles de consommation fondées sur nos aspirations, conformes à notre propre civilisation, etc. Sur la base de ce modèle nouveau de consommation, disait-il, il sera possible à partir de nos moyens matériels, de nous donner aussi un modèle de production correspondant à ce modèle de consommation. A défaut, le modèle de consommation et la technologie extérieurs s'imposeront.
Selon l'illustre disparu, « L'Homme doit être au cœur du développement ».Dans son dernier livre posthume : « Réflexions sur le développement » publié par la Fondation Joseph Ki-Zerbo en 2012, Joseph Ki-Zerbo continue de nous poser des questions. Le leitmotiv est le suivant : « Quel homme ? Quel développement ? Pour Joseph Ki-Zerbo, « mettre l'homme au cœur du développement, c'est lui accorder le respect, la considération qui lui sont dus en qualité à la fois de producteur et de consommateur. »

En conclusion : « Il n'y a pas de développement clés en mains. »

Le legs intellectuel de Joseph Ki-Zerbo contenu notamment dans ses six livres posthumes publiés par la Fondation qui porte son nom : « Repères pour l'Afrique » en 2007 ; « Histoire critique de l'Afrique » en 2008, « Regards sur la société africaine » en 2009, « A propos de culture » en 2010, « Education et développement en Afrique : cinquante ans de réflexions et d'action » en 2010, et « Réflexions sur le développement » en 2012, ainsi que dans l'édition de 2013 de « A quand l'Afrique ? » est disponible à Ouagadougou (notamment au Centre de Documentation de la Fondation Joseph Ki-Zerbo pour l'Histoire et le Développement Endogène de l'Afrique : http// :www.fondationki-zerbo.org (Tel : 226.50.45.00.81). Il est également proposé en partage, notamment aux chercheur(e)s pour murir la réflexion contemporaine pour un développement véritable et authentique de l'Afrique.
Découvrons ou redécouvrons le message de Joseph Ki-Zerbo à la jeunesse africaine, mais au-delà, à tous les fils et filles de notre cher continent qu'il a présenté comme Berceau et Espoir de l'Humanité, car : « ...La convocation d'un présent médiocre ou calamiteux comme témoin à charge contre nous, peut mettre en doute notre passé et mettre en cause notre avenir. C'est pourquoi chaque Africaine, chaque Africain doit être, ici et maintenant, une valeur ajoutée. Chaque génération a des pyramides à bâtir. »

La Fondation Joseph Ki-ZERBO

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