En vérité, nous ne voyons aucune raison pour l'ancienne majorité de se plier à un exercice qu'on lui a refusé depuis deux bonnes décennies. Que n'a-t-elle pas imaginé pour essayer cette réconciliation que nos populations réclament de leurs élites ? A tous les coups, ceux qui composent la majorité d'aujourd'hui, et qui étaient à l'opposition, ont tout refusé. Depuis le Forum National de Réconciliation de 1990 déjà conduit par un Mgr, Séraphin ROUAMBA, et qui avait échoué, au CCRP en passant par le Collège des Sages, la Journée nationale du Pardon, etc, tout ce beau monde a toujours joué la politique de la chaise vide.
J'ai beau vouloir positiver et me convaincre du contraire, je n'arrive pas à faire confiance à la commission de l'Archevêque de Bobo-Dioulasso, la fameuse Commission de réconciliation nationale et des réformes (CRNR), qui, pour un organe chargé de réconciliation, commence on ne peut plus mal avec des démissions et une passe d'arme digne des plus viles joutes oratoires entre petits politiciens en manque de publicité.
En effet, et à notre corps défendant, dès sa première expression publique en tant que président de la commission, Mgr Paul OUEDRAOGO renforce notre scepticisme sur ses capacités à conduire à l'apaisement des cœurs dont les Burkinabè ont le plus besoin. C'est avec le caractère que ceux qui le connaissent lui reconnaissent qu'il a brocardé l'un des commissaires démissionnaires, Siaka COULIBALY pour ne pas le nommer, qui avait affirmé que «certains membres s'apprêtaient à proposer un salaire de 5 500 000FCFA par mois, et par personne...». Pour Mgr, ces propos relèvent ni plus, ni moins que «de la malhonnêteté morale et intellectuelle...»
Les mots, il faut en convenir sont forts. Remettre en cause la probité morale et intellectuelle d'un citoyen pour avoir évoqué un sujet et, qui plus est, au conditionnel est en soit d'une violence gratuite inhabituelle. Sans prétendre prendre la défense du présumé déficient moral, on peut bien demander à Mgr quels sont ses preuves que personne ne voulait effectivement «proposer un salaire de 5 500 000 FCFA». Par ailleurs, les propos de M. COULIBALY n'incriminent pas la commission en elle-même puisqu'il dit bien : «certains membres». Faut-il croire que Mgr se porte garant qu'aucun de ceux-ci n'ait jamais tenu les propos que M. COULIBALY relate ? Dans tous les cas, il faut avouer que du haut de sa présidence et de ses fonctions, Mgr Paul OUEDRAOGO aurait pu et dû utiliser d'autres propos que ceux qu'il a tenus pour qualifier ceux du commissaire démissionnaire. Il est sûr que si celui-ci choisit de répondre et dans les formes de Mgr, on entendra des vertes et pas mûres et les arguments voleraient bien bas. Il faut prier Dieu qu'il n'en fasse rien ou, à tout le moins, qu'il élève le débat. Une hauteur d'esprit qui permettrait de sauver quelque part les meubles même si ce seul fait indique les risques réels d'incompréhensions et de quiproquos si le management de la commission ne change pas.
Avait-on seulement besoin de revenir sur ce fait dès lors que les chiffres réels sont donnés ? Si la raison avait prévalu, on aurait fait l'économie d'une polémique inutile, qui malheureusement met à nu un manque cruel de retenue et de discernement, la maladie infantile de la Transition. Alors même que la Commission, elle-même, prétend justement lancer un appel solennel «à la relecture et au respect du sacrifice des martyrs...». C'est à ne rien comprendre.
Pour se faire mieux comprendre, Mgr de dire que «les débordements, les propos négationnistes et les postures arrogantes doivent céder la place à l'apaisement des cœurs...». On l'aura compris, on tance l'ex-majorité ; les contempteurs de la quelle majorité l'accusant régulièrement de «négationnisme», voire d'arrogance alors même qu'on n'a pas fini de pleurer les morts ! Voilà où nous attendions Mgr ! Et une nouvelle fois, il nous donne malheureusement raison !
A l'image de tous les autres membres de sa commission, sans exception, Mgr fait preuve d'un parti pris flagrant parfaitement en droite ligne de ses positions personnelles connues. D'où notre scepticisme, que les faits confirment et que l'avenir démontrera.
Plus que jamais notre conviction est faite que la CRNR ne réconciliera personne et ne rendra justice à personne parce qu'elle ne dira pas la vérité et n'aura pas à cœur de la rechercher. S'il s'agit de la vérité de la lettre épiscopale du 11 juillet 2013, alors la messe est dite et on ferait œuvre utile à suivre les conseils de Siaka COULBALY pour au moins économiser une bonne cinquantaine de millions de FCFA qui pourraient servir aux ayants droit des «martyrs».
C'est dire que le projet «d'une société véritablement démocratique, juste, libre et inclusive au Burkina» n'est pas pour cette fois-ci et que la commission de Mgr Paul OUEDRAOGO sera un simple pis aller, une sorte d'écran de fumée pour avaliser des mesures discriminatoires contraires à notre constitution sous le prétexte de la «mémoire des martyrs». Assurément, au bout du compte, on arrivera à la partition du pays entre «Bourreaux», forcément l'ex-majorité et «Victimes», l'ex-Opposition. Exactement le programme sankariste ! Qu'un prélat le mette en musique est sincèrement le monde à l'envers. Comme quoi, les chemins de l'enfer sont réellement pavés des meilleures intentions.
DIEU SAUVE LE BURKINA ! Car, au-delà de toute considération, tout indique que la commission de Mgr Paul OUEDRAOGO est une véritable injure au peuple burkinabè. Elle est presque exclusivement composée de personnalités qui ont, plus de deux années durant, refusé la moindre concession à l'ancienne majorité, refusant de faire partie de tous les cadres de concertation. Que de telles personnes prétendent aujourd'hui conduire un processus de réconciliation en prenant d'ailleurs le soin d'exclure leurs protagonistes dans les cadres devant y conduire est une véritable hérésie. En écoutant leurs propos dédaigneux et haineux, on ne peut que leur souhaiter de s'assumer pleinement, ce qui aura le mérite d'être clair. Que certaines personnalités leur servent de caution morale est une trahison de notre peuple.
En vérité, nous ne voyons aucune raison pour l'ancienne majorité de se plier à un exercice qu'on lui a refusé depuis deux bonnes décennies. Que n'a-t-elle pas imaginé pour essayer cette réconciliation que nos populations réclament de leurs élites ? A tous les coups, ceux qui composent la majorité d'aujourd'hui, et qui étaient à l'opposition, ont tout refusé. Depuis le Forum National de Réconciliation de 1990 déjà conduit par un Mgr, Séraphin ROUAMBA, et qui avait échoué, au CCRP en passant par le Collège des Sages, la Journée nationale du Pardon, etc, tout ce beau monde a toujours joué la politique de la chaise vide. Alors donnez-moi, bonnes gens, une seule bonne raison pour la Majorité d'hier, devenue opposition de se plier à l'exercice ! L'ancienne Majorité serait bien inspirée de lui retourner la monnaie de sa pièce ! C'est la seule attitude politique valable et responsable pour donner une réelle chance à une véritable réconciliation dans un tout autre avenir !
Par Cheick AHMED
Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.