Commune rurale de Kindi : Après l’usine, c’est la terre qui divise le chef et le maire

| 20.08.2013
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Commune rurale de Kindi : Après l’usine, c’est la terre qui divise le chef et le maire
© DR / Autre Presse
Commune rurale de Kindi : Après l’usine, c’est la terre qui divise le chef et le maire
Décidément, le chef de Kindi et le maire de ladite commune ne sont pas prêts à fumer le calumet de la paix. Après l'avis défavorable du maire quant à l'implantation d'une usine de production de boissons alcoolisées du chef, une affaire qui avait fait beaucoup de bruit, c'est autour de la terre que les deux hommes forts de Kindi se disputent. En effet, les hommes du chef, avec à leur tête le conseiller de Kindi, Emmanuel Koama, accusent le maire d'avoir retiré une terre d'une superficie de 12 ha aux populations de Masséré, un des villages de Kindi, pour la donner à son fils. Pour dénoncer ce qu'ils ont appelé « une expropriation forcée », Emmanuel Koama a animé une conférence de presse le 18 août dernier à Kindi.

Lorsque le vieux Bangré Ouédraogo signait le procès- verbal à palabre, il était loin de s'imaginer qu'on lui retirerait ses terres, encore moins sa maison située sur le terrain en question, a fait comprendre Emmanuel Koama, un des conseillers de la commune de Kindi, initiateur de la conférence de presse. Le vieux, la soixantaine bien sonnée, assis au beau milieu de la foule venue écouter le conseiller, témoigne : « ils sont venus me voir à la maison et m'ont dit de signer un papier. Un papier dont la signature devrait permettre l'implantation d'un forage dans le village. Et comme c'est pour le bien du village, je ne pouvais que signer. C'est après qu'on est venu me dire que la signature que j'ai apposée sur le papier était pour m'exproprier de mes terres et de ma maison au profit de Baguemzanré K. Serge, le fils du maire. Je ne suis pas d'accord ; cela fait 15 ans que je suis sur les lieux et on ne peut pas venir me déloger de la sorte ». La parcelle sur laquelle se trouve la maison du vieux a une superficie de 12 ha en zone hors lotissement, un terrain attribué effectivement au fils du maire pour usage agricole sur arrêté N°2012-021/C- KND/M signé par Thomas Baguemzanré, maire de Kindi. Et le fils, ayant tous ses papiers d'attribution en règle, ne pouvait que viabiliser sa parcelle. Chose qu'il a faite en labourant une partie du terrain et en y semant du maïs. Seulement, le samedi 16 août dernier, les hommes du fils du maire, qui se sont rendus sur les lieux pour sarcler, ont été simplement chassés à coups de bâtons et de pioches par des habitants de Kindi. Les sarcleurs partis, les poursuivants décident de passer à une étape supérieure : celle d'arracher les plants de maïs qui avaient bien poussé dans le champ. Pour les frondeurs, ils ont agi ainsi pour manifester leur mécontentement quant à l'attribution du terrain au fils du maire. Une attribution qu'ils jugent anormale parce que « c'est une zone dans laquelle les populations font leurs sacrifices » et qui a été faite sans l'avis des propriétaires terriens.

Le maire a reconnu avoir signé le décret d'attribution

En plus de cette action, les manifestants, avec à leur tête le conseiller Emmanuel Koama, ont marché hier 19 août. Une marche au cours de laquelle ils ont remis un message au préfet de la localité dans lequel ils demandent une enquête judiciaire pour situer les responsabilités sur l'attribution de ce terrain. « Cette marche ne m'inquiète pas », a rétorqué le maire Thomas Baguemzanré qui ajoute que c'est bien que Emmanuel Koama demande une enquête judiciaire parce qu'elle permettra, en effet, de savoir que le terrain n'a pas été arbitrairement attribué à son fils. Il reconnait avoir signé le décret d'attribution du terrain mais de façon légale. « Mon fils a suivi la voie normale. Il est venu me dire qu'il voulait un terrain pour faire de l'agriculture en 2008. Et je lui ai dit d'aller voir les propriétaires terriens. Comme je venais nouvellement d'arriver à la tête de la commune, j'ai demandé à un ancien de la mairie la procédure à suivre. Il m'a appris qu'il faut d'abord l'accord des propriétaires et ensuite un procès-verbal à palabre signé par les propriétaires. Quand j'ai expliqué cela à mon fils, il est venu une année après pour me dire qu'il a eu l'accord des propriétaires terriens. Et j'ai transmis le dossier au service des domaines qui m'ont, deux années après, transmis une enveloppe dans laquelle se trouvait une lettre me demandant, si je ne trouvais pas d'objection, de signer. Et comme je n'avais aucune objection, j'ai signé. Voilà comment s'est déroulée l'affaire », a expliqué le maire. Il fait, par la suite, savoir que le vieux Bangré Ouédraogo a été monté et instrumentalisé par Emmanuel Koama pour qu'il agisse contre lui. « C'est le chef qui est derrière tout ça. Comme j'ai donné mon avis défavorable pour la construction de son usine, il veut user de tous les moyens pour me nuire », a dit le maire Baguemzanré. « Sinon, comment pouvez comprendre qu'Emmanuel Koama qui n'est même pas un conseiller de Masséré soit à la tête des manifestants ? », se questionne le maire. A propos des 3 000 F CFA, il fera savoir qu'à sa connaissance, son fils n'a payé quoi que ce soit. Que c'est sûrement une somme qu'il a donnée au vieux pour qu'il paie du cola. Il affirme que si le vieux dit qu'il veut aujourd'hui son terrain, il dira à son fils de le lui rétrocéder.

Yannick SANKARA

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