« Hélène dégage », « Mairie fermée jusqu'à l'élection d'un nouveau maire », « Non aux attributions frauduleuses de parcelles », « Oui à la construction d'un CSPS à Gorpoully », « Pour une gestion transparente des ressources de notre commune ». Voilà autant de slogans brandis par les marcheurs et qu'il nous a été donné de lire le jeudi 21 novembre 2013. C'est une foule compacte et disciplinée qui, sur le coup de 11h 54mn, a occupé les abords du marché de Bagaré vers la mairie, première destination. Là, ce sont les forces de l'ordre qui accueillaient les marcheurs et ce, dans le calme. Aussi, des documents ont été remis au commandant de Brigade de la gendarmerie de La-Toden, une commune voisine et au commissaire de Police de Bagaré. Il s'agissait du « Rapport mémoire de défense de Madame le maire de la commune de Bagaré portant sur les différents points de gestion de la commune, objets d'accusations dans la presse », lequel a été rédigé par le maire elle-même le 30 octobre 2013, du « décompte financier des investissements effectués dans le cadre du programme d'actions quinquennal du jumelage solidaire Bagaré-Cologny 2009-2013 », et d'une lettre portant sur les « Projets retenus au plan de financement jumelage Cologny-Bagaré » au maire de la commune de Bagaré. Ces deux dernières pièces ont été signées par le directeur de l'ONU Nouvelle planète Burkina, Joanny Tapsoba, respectivement le 30 août 2013 et le 8 décembre 2009. C'est d'ailleurs sur la base des contenus de ces documents que le principal orateur de la marche, Daouda Sangla, s'est entretenu avec le préfet du département de Bagaré, Kadiatou Waga, à la préfecture, qui fut la seconde destination des marcheurs.
Les faits reprochés au maire
Au cours de la trentaine de minutes qu'a duré l'entretien, Daouda Sangla a relevé les incohérences contenues dans lesdits documents pourtant produits par le maire et son « alliée », Nouvelle planète Burkina. En effet, il y est effectivement écrit en 10e position des projets retenus, la « construction d'une maternité à Gorpoully avec équipement en éclairage solaire, d'une cuisine et d'une latrine ». Ce qui n'a jamais été réalisé et qui est à la base de la crise qui secoue le conseil municipal de Bagaré. Par ailleurs, alors que dans les projets retenus il ne figure aucune réfection de bâtiment, le décompte financier cité plus haut fait cas de réfections de locaux au CSPS de Bagaré évaluées à 10 031 883 F CFA, de réfections et constructions au CSPS de Zougo estimées à 30 579 969 F CFA. En outre, parmi les priorités où ne figure nulle part l'achat d'un véhicule, ce sont 16 597 877 F CFA qui ont été prélevés sur les 100 millions de F CFA du jumelage pour l'acquisition d'un véhicule de fonction du maire, même si celui-ci n'est pas encore acquis. D'autres détails ont été relevés par les marcheurs : il s'est agi de la réfection de deux dépôts pharmaceutiques dont l'un à 2 203 364 F CFA et l'autre à 1 718 789 F CFA à Bagaré et à Zougo. Au total, plus de 106 millions de F CFA ont été engloutis sous le 1er mandat du maire contre une enveloppe financière de 100 millions de F CFA octroyée par les partenaires suisses. L'autre fait majeur évoqué était relatif au choix des projets exécutés. En effet, dans son mémoire en défense, le maire a rappelé ne pas être « associée à la gestion financière des fonds », ce rôle étant dévolu au représentant de Cologny qui est l'ONG Nouvelle planète Burkina basée à Ouagadougou. Les protestataires ont tout de même relevé la responsabilité du maire dans le détournement des fonds à d'autres fins non prévues dans les projets retenus. Pour étayer ses propos, Daouda Sangla s'est appuyé sur la précision du directeur de Nouvelle planète Burkina en bas du décompte financier où il est écrit que « dans le cadre du présent plan quinquennal, les actions ont été réalisées par priorité, laquelle a été définie par le conseil municipal de Bagaré ». Pour tous ces griefs reprochés au maire, l'orateur principal a, au nom des populations, conclu qu' « Hélène a échoué dans sa gestion ». En plus de ces méfaits, et au regard des déclarations du maire sur Radio Liberté, à Ouagadougou, tendant à toujours se proclamer comme étant un maire en fonction, les populations ont fermement exigé « la fermeture définitive de la mairie jusqu'à ce que l'autorité prenne ses responsabilités ». « Les conseillers sont assez responsables pour se choisir un autre maire à qui nous dirons les mêmes vérités. Il n'y a aucun problème politique dans nos revendications, seul le bien-être des populations est notre leitmotiv », a-t-il renchéri. Ces mots, prononcés devant le préfet puis en présence des marcheurs par leur porte-parole, ont été salués par de longues salves d'applaudissements, signe d'une adhésion populaire, du moins de la masse mobilisée devant la préfecture.
Il faut noter que la manifestation a connu la participation de nombreuses personnes âgées, de femmes et du chef coutumier de Gorpoully, Tiga Pagbelem. Aussi, les forces de l'ordre présentes ont encadré les différents entretiens, sans couac avec des manifestants qui s'étaient également donné pour consignes le calme et la discipline. En attendant d'en savoir plus sur la suite des évènements les prochains jours, la mairie est restée fermée dans la soirée du 21 et toute la journée du 22 novembre 2013. Le maire et son comptable, eux, sont persona non grata à la mairie depuis le jeudi 10 octobre 2013.
Abdoulaye DIANDA (Correspondant)
