Cimetières de Ouagadougou : Ces tombes « décorées » par des tas d’ordures

| 12.12.2013
Réagir
Cimetières de Ouagadougou : Ces tombes « décorées » par des tas d’ordures
© DR / Autre Presse
Cimetières de Ouagadougou : Ces tombes « décorées » par des tas d’ordures
Avec une population estimée à 2 000 000 d'habitants, la ville de Ouagadougou génère 300 000 tonnes d'ordures ménagères par an, soit 800 tonnes par jour, dont 0,54 kg par habitant. Malheureusement, faute de bac à ordures dans des endroits de la ville, les cimetières de Ouagadougou font l'objet de lieux de dépotoirs d'ordures, d'où l'une des causes des odeurs nauséabondes, des piqures de moustiques et des maladies liées à l'insalubrité. Reportage !

Des 35 cimetières que compte la commune de Ouagadougou, seuls cinq d'entre eux (Gounghin, Kouritenga, Dagnoen, Wayalgin et le cimetière municipal) ont été clôturés par les autorités. Quant aux 30 autres, ils sont à la merci de toute sorte de pollution. Une situation inquiétante, sinon alarmante, au regard des encombrements et des menaces auxquelles ces lieux censés être calmes et paisibles dédiés à nos morts, font face. Et des exemples, l'on en dénombre à flopée à Ouagadougou. C'est le cas du cimetière de Tabtenga, situé dans l'arrondissement N° 10, côté Est de la ville où, en ce vendredi 16 août 2013, aux environs de 7 heures, après une pluie tombée dans la nuit, une nécropole se retrouve inondée par des étangs d'eau par endroits. De plus, des tombes sont côtoyées par des tas d'immondices, le tout dans une odeur nauséabonde, au point qu'il est difficile d'y accéder sans se boucher le nez.
Ce cimetière est devenu un dépotoir d'ordures où les riverains y vident leurs poubelles. « On y déverse, par exemple, des vidanges de WC, des déchets issus des salons de coiffure. C'est un lieu de refuge de bandits, de trafic de drogues et également, de pâturage pour des bergers qui vont paître leurs animaux », déplore le directeur du développement durable de la commune de Ouagadougou, El hadj Sidi Mahamadou Cissé. Ainsi, tout porte à croire que la douleur ressentie, lors de l'enterrement du défunt et marquant la séparation définitive n'est rien d'autre qu'un soulagement de s'être débarrassé d'une « ordure ».

Même constat d'un cimetière à un autre

Le cimetière du quartier Toyibin (ex-secteur N°15) jouxtant la gare routière, ne présente également pas un visage digne de ce nom. Situé à proximité d'un marché à bétail, cet endroit sert parfois de réserve de commerce d'animaux, si bien qu'il est quasiment difficile d'apercevoir les tombes. En effet, ces sépulcres sont recouvertes de foin et de tas d'ordures. Quoi de plus normal que les populations vivant aux alentours de ces cimetières ne soient pas à l'abri de ces puanteurs et autres maladies, telles que le paludisme. A en croire Rasmané Sawadogo, riverain du cimetière de Tampouy à l'arrondissement N°16 (ex-secteur N°22), depuis la fermeture de ce cimetière, cet endroit est devenu un dépotoir d'ordures. « On est envahi, à tout moment, par les moustiques. Ce qui est la cause du paludisme », se plaint-il. Pour lui, il faut insister sur le changement de comportement. « J'ai interdit formellement les membres de ma famille de jeter des déchets au cimetière et nous sommes abonnés à une société de ramassage d'ordures qui passe, une fois par semaine, pour ramasser les ordures à raison de 500 F CFA, le mois », indique-t-il.
Une riveraine du cimetière de Taabtenga et vendeuse de maïs grillé qui a requis l'anonymat justifie, par contre, son acte d'incivisme par le manque de moyens pour se louer les services de ramassage d'ordures.

La mairie sanctionne les indélicats

« Je suis consciente que verser des ordures ici (NDLR : dans le cimetière) n'est vraiment pas bien. Cependant, je suis dans l'incapacité de payer 500 ou 1000 FCFA par mois à une société de ramassage d'ordures », avoue-t-elle. Selon Mariam Kaboré, voisine du cimetière de Tampouy, ce comportement vis-à-vis des disparus est à bannir.
Conscientes de la gravité de la situation, des initiatives de restauration de ces nécropoles avaient été entreprises par les autorités communales. Ainsi, en février 2005, la mairie centrale avait signé une convention avec une structure associative, en l'occurrence l'association « Raiim Taaba » pour assainir ces lieux. Cette dernière avait pour tâche, le nettoyage de 17 cimetières de la ville, soit cinq fois dans la semaine à raison de 1500 F CFA par séance et par personne. « En 2010, les séances de travail ont été réduites à quatre par mois, soit une fois par semaine. Ce qui a rendu le nettoyage difficile », confie le président de l'association, Issiaka Jean Ferdinand Nikièma.
Le contrat a pris fin depuis 2010. Mais qu'à cela ne tienne, le président de l'association dit assurer le service minimum, tout en espérant le renouvellement du contrat et un appui en matériels de nettoyage. Du côté des autorités communales, l'on préfère désormais, brandir le bâton en lieu et place de la carotte à tout contrevenant dans les cimetières de la ville. « Si les agents de ma direction prennent quelqu'un qui déverse des ordures dans un cimetière, son matériel est tout simplement saisi. L'intéressé payera une amende de 22 500 FCFA avant d'entrer en possession de son matériel. Les camions vidangeurs de fosses sceptiques, eux, payeront une amende de plus de 50 000 FCFA », a prévenu Sidi Mahamadou Cissé.
En termes de projet dans le cadre de l'aménagement des cimetières, il rappelle qu'il sera désormais, procédé à la parcellisation des sites pouvant servir de cimetière, afin de rationaliser l'exploitation. « Les sites actuels sont pleins à plus de 85% alors, je demande à la population d'adopter des comportements citoyens, afin de mieux entretenir nos cimetières, qui constituent nos dernières demeures », plaide-t-il. Nonobstant ces actions menées pour assainir ces nécropoles, chaque 2 novembre de l'année, les parents des défunts se rendent dans les différents cimetières pour nettoyer les tombes de leurs défunts.

Fleur BIRBA

Publicité Publicité

Commentaires

Publicité Publicité