Peut-on raisonnablement prendre le risque d'aller aux élections avec de tels esprits au cœur des décideurs de la Transition. Est-il seulement responsable de feindre de ne pas voir les risques de conflagration qui pointent à l'horizon ? On peut s'amuser avec beaucoup de choses mais pas avec l'ethnie, la religion et la violence. Les trois mis ensemble forment un cocktail forcement explosif.
Voilà pourquoi il nous semble plus qu'urgent et opportun de parler et d'œuvrer pour une nouvelle Transition plutôt que d'autre chose. A ceux qui s'époumonent pour une nouvelle constitution, nous disons, oui ! Mais avant tout ; ... avant tout ; il faut une nouvelle Transition d'abord !.
La dernière décade aura été particulièrement riche en évènements médiatico-politiques. Alors, qu'on se perdait en conjectures sur la nécessité ou non d'aller à une Ve République et sur le timing de sa mise en œuvre, dans un climat où le débat sur l'exclusion traumatise les uns et les autres, et qu'on croyait avoir touché le fond avec les propos ouvertement ethnicistes et religieux de Ablassé OUEDRAOGO, voilà que Yamba Malick SAWADOGO du MPP, qui en appelle à la violence postélectorale, nous rappelle que la bêtise humaine est sans limite sous cette « Transition » dont le propre est de nous conduire vers le pire en mettant en pratique son slogan « plus rien ne sera comme avant ! » Il faut le dire, on n'a plus besoin de rappel sur le sujet tant on vit le fait dans sa chair au quotidien avec cette impression que seul Dieu pourra nous sauver.
Au moment où la « Ouma » va pour son mois béni et sacré du Ramadan, nous avons espoir que ses prières pour notre cher Faso vont être entendues et que Dieu, viendra de nouveau à notre secours !
Avant tout autre propos, comment ne pas tomber des nues devant ce communiqué, pour le moins anachronique, qui annonce une « offensive diplomatique du gouvernement de la Transition » avec pour seuls arguments les visites de notre cher Président Michel KAFANDO en Europe où on a enfin accepté de le voir et la participation du Premier ministre ZIDA au sommet de l'Union Africaine ! Si ces deux faits participent d'une « offensive diplomatique » alors qu'on sait que l'un et l'autre ont été tancés pour leur politique et leurs pratiques aux antipodes de la démocratie, il faut dire que le Burkina Faso est tombé bien bas lui, qui était connu de par le monde pour être écouté et entendu. Le sujet est d'une telle importance que nous y reviendrons, mais non sans avoir fait observer l'évidence que jamais notre diplomatie ne s'est aussi mal portée depuis que ce pays existe et que Michel KAFANDO est sans nul doute le plus mauvais ministre des Affaires étrangères qu'il ait connu.
Parlant de diplomatie, la transition est bien appropriée pour parler des propos inacceptables d'un des derniers titulaires du portefeuille, et qui aime se vanter de « ses résultats », M. Ablassé OUEDRAOGO, patron du parti « Le Faso Autrement » et candidat de celui-ci à la présidentielle d'octobre prochain, qui se donne pour atouts pour remporter la timbale, son ethnie, sa religion et ses réseaux. Il n'en a pas fallu plus pour que toute la communauté intellectuelle et tous ceux qui se gargarisent de ce « titre » lui tombent dessus ; même la Gendarmerie s'y est mise au motif de propos ethnicistes et religieux susceptibles de relever de délits punis par la loi.
On peut le dire, on hallucine dans ce pays ! D'abord avec un candidat prétendu intellectuel qui limite son programme politique à son ethnie, à sa religion et à son carnet d'adresse, si ce n'est pas lamentable. Ensuite avec une hypocrisie sans nom qui fait l'impasse sur des propos tout aussi répréhensibles, comme ceux de Salif DIALLO qui accusait sans le nommer, Zéphirin DIABRE d'utiliser son appartenance ethnique pour demander à ses « parents de ne pas voter » le candidat du MPP qui est d'une autre ethnie. C'est aussi un secret de polichinelle et une vaste hypocrisie que de feindre ne pas entendre ici et là les propos xénophobes contre le candidat Zéphirin DIABRE qui n'est pas de l'ethnie majoritaire ou la prise en compte du fait ethnique ou régional voire même religieux pour les choix des candidats des partis aux différents scrutins. Puisque la rumeur est érigée par notre gouvernement de la Transition en source d''information officielle, pourquoi ne pas citer celle qui présente Roch Marc Christian KABORE comme le candidat du haut clergé catholique ?! Il faut savoir que la politique ne se fait pas ex-nihilo, qu'elle tient compte du contexte socioéconomique dans lequel elle se mène. Même en Europe et en Amérique, on en tient compte la preuve étant le rôle pour le moins marginal des femmes dans la sphère politique, les populations rechignant à élire celles-ci lorsqu'elles sont opposées à des hommes. Demandez à Ségolène ROYAL en France et à Hilary CLINTON aux USA, elles vous diront combien elles ont souffert de ces complexes.
Il faut donc constater ces faits et les combattre et non faire la politique de l'autruche et feindre de croire que ces problèmes n'existent pas. Enfin sur le sujet, il me semble que Ablassé est plus à plaindre qu'à condamner et il faut craindre le revers de la médaille, c'est-à-dire de le transformer en victime d'une intolérance ciblée qui voudrait qu'on accepte tout des uns et qu'on refuse tout des autres. Ça peut tout simplement être le but de la manœuvre : Un coup de poker pour un candidat qui n'a aucune chance d'être élu président mais qui pourrait cristalliser sur son nom une catégorie d'électeurs qui refuseraient tous les conformismes et pourraient le considérer comme la voix des sans voix, une sorte de martyr !
Pour ce qui est de Yamba Malik SAWADOGO, l'équation est nettement plus simple puisque ses propos sont le reflet de l'ensemble du discours de son parti, le MPP, traduit dans le langage qui est le sien. Que l'on nous dise quelle est la marge entre des expressions du genre « on gagne, ou gagne » ou encore « on gagne en ? de tour ! » et les siens qui indiquent une victoire, même au moyen de couteaux et d'armes à feu. Comment oublier le décompte macabre de son vice-président Salif DIALLO pour qui la majorité des morts des évènements dramatiques d'octobre seraient des militants du parti, parce qu'ils étaient au-devant des manifestations donc des violences ? C'est dire que ce parti s'y connaît en violence politique et aurait tous les moyens de récidiver pour parachever son accession au pouvoir. On peut légitimement penser que transporter dans son élan et devant l'enthousiasme des militants, il a dévoilé sans le vouloir un plan en cours de construction. Voilà pourquoi ce monsieur devrait être présenté au Procureur du Faso et que des mesures de surveillance stricte soient prises à son encontre. En essayant de minimiser son appel à la violence, on fait là aussi preuve d'une vaste hypocrisie qui va avoir de graves dégâts si on n'y prend garde. Là aussi la rumeur est formelle, ce parti serait à la base des mesures anti-démocratiques prises contre l'ex-majorité, notamment la suspension du CDP et de l'ADF/RDA, tout comme de la loi d'exclusion demandée d'ailleurs officiellement par sa jeunesse, aux seules fins de lui tracer un boulevard vers Kossyam.
M. SAWADOGO est donc dans un rôle, le sien, tout comme M. OUEDRAOGO veut jouer un rôle. Quand on connait la place que tous ces deux messieurs occupent dans le système de la Transition par le truchement de leurs partis respectifs, on ne peut que se poser de sérieuses questions sur cette Transition ?
Peut-on raisonnablement prendre le risque d'aller aux élections avec de tels esprits au cœur des décideurs de la Transition. Est-il seulement responsable de feindre de ne pas voir les risques de conflagration qui pointent à l'horizon ? On peut s'amuser avec beaucoup de choses mais pas avec l'ethnie, la religion et la violence. Les trois mis ensemble forment un cocktail forcement explosif.
Voilà pourquoi il nous semble plus qu'urgent et opportun de parler et d'œuvrer pour une nouvelle Transition plutôt que d'autre chose. A ceux qui s'époumonent pour une nouvelle constitution, nous disons, oui ! Mais avant tout ; ... avant tout ; il faut une nouvelle Transition d'abord.
Par Cheick AHMED
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