Retour triomphal de Zida : Etait-ce bien nécessaire ?

| 08.07.2015
Réagir
Retour triomphal de Zida : Etait-ce bien nécessaire ?
© © Photo : DR / Autre Presse
Retour triomphal de Zida : Etait-ce bien nécessaire ?
La fraîcheur d'Abidjan n'aura donc pas tempéré les ardeurs du lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida. Rentré hier dans l'après-midi de la capitale économique ivoirienne, où il avait effectué une visite de 48 heures pour préparer le prochain sommet du Traité d'amitié et de coopération entre le Burkina et la Côte d'ivoire prévu fin juillet, le Premier ministre a en effet été accueilli par une petite foule dévouée avant de parcourir à pied les quelques kilomètres qui le séparent de ses bureaux.


Un véritable bain de foule comme jadis on l'a vu avec Blaise Compaoré rentrant en janvier 2003 du sommet de Marcoussis-Kléber sur la crise ivoirienne ou, plus récemment en août 2014 avant sa chute, après qu'il s'en fut allé dire ses gbès à Washington à Barack Obama dont l'administration ne faisait pas mystère de son opposition au tripatouillage de l'article 37.

Il est vrai qu'à son départ, après avoir démenti les rumeurs sur sa démission qui s'étaient répandues comme une traînée de poudre la veille et nié l'existence d'une quelconque crise au sein de l'Exécutif, le chef du gouvernement avait donné rendez-vous aux journalistes à son retour sans qu'on ne sût véritablement quelle surprise il réservait à ceux qui ont eu droit lundi sur le tarmac de la base aérienne 511 à un cours de journalisme sur le thème du professionnalisme et de la vérification des informations. On sait maintenant pourquoi il conviait de nouveau la confrérie «pour le retour demain soir», preuve sans doute que l'orchestration avait été faite avant même le décollage.

En se tapant cette cure de jouvence vespérale, le PM fait quelque part la nique au Régiment de sécurité présidentielle (RSP) et à la haute hiérarchie militaire qui réclament sa tête ainsi que celles des autres membres en treillis de son équipe. Faut-il le rappeler, cette nouvelle crispation fait suite au retour mouvementé de Zida le dimanche 28 juin 2015 de Taïwan puisqu'il fut obligé de passer par la base aérienne parce que, avait-on dit, les éléments du RSP, qui s'en défendent pourtant, voulaient l'arrêter.

Mais certains y voient une manœuvre grossière de la Primature et de ses officines pour justifier la liquidation du corps dont il était tout de même le numéro 2 jusqu'à l'insurrection des 30 et 31 octobre 2014. Vrai ou faux, après les éruptions du 30 décembre 2014 et du 4 février 2015, ce nouvel acte du théâtre d'ombres qui se joue entre Zida et ses anciens camardes fait peser une lourde menace sur l'issue de la Transition à trois mois des élections présidentielle et législatives du 11 octobre prochain.

Le rassemblement «spontané» d'hier sur une enceinte militaire s'est donc voulu une démonstration de force d'un PM fragilisé certes mais « toujours en place, plaise à Dieu » et qui sait compter sur d'irréductibles fidèles tel «le camarade Ouattara» (Zida dixit) ainsi que sur l'impopularité établie de l'ancienne garde prétorienne, symbole aux yeux d'une bonne frange des Burkinabè de l'arbitraire et de la violence en politique et qu'on charge volontiers de tous les péchés du défunt régime.

Sur la question du RSP donc, il sait pertinemment qu'il gagne à tous les coups la bataille de l'opinion, et c'est sans doute pour cette raison qu'il engage ce bras-de-fer contre ses contempteurs. Mais ce retour triomphal était-il bien nécessaire alors même que depuis une semaine des tractations se mènent sous la houlette du président Michel Kafando pour trouver une issue heureuse à la présente crise afin qu'elle ne déteigne pas sur l'agenda transitionnel ?

Ousseni Ilboudo

Publicité Publicité

Commentaires

Publicité Publicité