Ayant traité l'Assemblée nationale, sous la IVe République, de caisse de résonance, les actuels députés mettront un zèle particulier à se démarquer de tout compromis avec l'exécutif. A moins de trouver une autre formule, il faut craindre que le vote de la loi tourne à une action impossible. Le gouvernement, encadré par Michel Kafando et le colonel Zida, présentera, sans trop de difficultés, les textes de loi au Conseil national de transition. Mais au sein de cette dernière, la palabre risque de prendre le pas sur des débats constructifs. Les différentes composantes passeront le temps à se "détruire", une façon de transférer à l'hémicycle les querelles qui les opposent sur le terrain. On peut être certain qu'au sein de l'ancienne opposition, les démarcations ont déjà commencé.
Ibrahima Koné du PDS/Metba l'a appris à ses dépens. Si le bloc politique était soudé, ce candidat au poste de président du CNT aurait été dissuadé par ses collègues pour ne pas tenter cette aventure. Ayant recueilli 17 voix, cet animateur de l'ancienne opposition a compris que la solidarité du CFOP lui a fait défaut. On pourrait assister à de tels désaccords pour d'autres dossiers.
Il ne fait pas de doute que dans cette précampagne qui a commencé, l'UPC et le MPP ne rateront aucune occasion de se rentrer dedans. Les sankaristes ne seront pas en reste. C'est dire que trouver un consensus entre ces acteurs relèverait pratiquement du miracle.
L'ancienne majorité ne garantit pas non plus de pouvoir parler de la même voix. Contraints au silence par les évènements de fin octobre, les partis du Front républicain tenteront, chacun de son côté, de se refaire une place au soleil, même au prix de leur unité. S'il y a un risque réel de dérapage des politiques comme il a été démontré plus haut, il est aussi possible que face à une sérieuse menace, ils retrouvent leur unité d'action pour sauver l'essentiel. Par contre, la composante qui va donner du fil à retordre au gouvernement, c'est bien celle de la société civile, cela pour deux raisons essentielles. La première, c'est que toutes les structures de la société civile ne jouent pas franc jeu. Certains ont juste le vernis de société civile, parce que dans la pratique elles sont des officines de partis politiques. En outre, chacune de ces structures se considère comme la plus légitime du lot, et comme il n'y a pas d'élections pour les départager, c'est à qui hurlera le plus fort. Les querelles de chiffonniers qui ont précédé la désignation des membres du CNT de cette composante en disent long sur leur incapacité à parler le même langage. Alors, les amener à parler d'une même voix serait quasiment la mer à boire. On en viendra peut-être même à regretter le vote mécanique sous la IVe République.
En définitive, il n'y a que les forces de défense et de sécurité qui n'auront pas de difficultés particulières. Discipline oblige, les militaires et paramilitaires seront ceux dont le soutien ne fera jamais défaut au gouvernement.
Adam Igor