Transition au Burkina : Après l’oukaze, l’Union africaine fait amende honorable

| 11.11.2014
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Transition au Burkina : Après l’oukaze, l’Union africaine fait amende honorable
© DR / Autre Presse
Transition au Burkina : Après l’oukaze, l’Union africaine fait amende honorable
A peine plus d'une semaine après la chute du chef de l'Etat burkinabè, Blaise Compaoré, le président mauritanien, Mohamed Ould Abdelaziz a atterri à Ouagadougou. Muni de sa casquette de président en exercice de l'Union africaine, le n°1 mauritanien est donc dans la capitale burkinabè, pour mettre balle à terre, après l'injonction de l'organisation continentale, enjoignant le 5 novembre dernier, le Lt-colonel Zida et Cie de remettre le pouvoir aux civils, sous peine de sanctions.


Au lendemain du pronunciamiento soft par les ex-du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), l'UA avait donné deux semaines aux militaires pour retourner dans les casernes, sinon le couperet tomberait et la communauté cesserait de biberonner le Burkina.

En entonnant des propos conciliants, hier à sa descente d'avion, l'UA par son président en exercice, fait amende honorable, car elle sait qu'au regard des circonstances, 15 jours sont insignifiants pour remettre tout en ordre, surtout après le règne interminable que fut celui de Blaise Compaoré.

En outre, l'UA a dû se rendre à l'évidence : le cas burkinabè pourrait faire tache d'huile, et provoquer un effet domino. En aidant les Burkinabè à bien gérer la transition, elle donne en même temps, un signal fort aux peuples qui croulent sous la férule de timoniers modernes dont ils voudraient qu'ils passent la main. De gré ou de force.

En clair, si par extraordinaire, le cas burkinabè devait inspirer des pays dont les présidents ont 20 ou 30 ans au compteur, ou sont dirigés par des fausses dynasties, c'est-à-dire là où de rafistolages constitutionnels en élections tronquées ou truquées des dinosaures ou «fils de» se maintiennent au pouvoir, que l'UA puisse avoir maintenant des repères pour aider ces peuples à les gérer. Instruite par la jurisprudence burkinabè

L'UA en envoyant son président en exercice Abdelaziz aurait voulu dire aux Burkinabè ceci : «Nous vous avons mal jugés, nous sommes prêts à vous accompagner pour vous en sortir» qu'elle ne s'y serait pas prise autrement.C'est d'ailleurs mutatis mutandis qu'à dit à son homologue burkinabè. Une double session de rattrapage en quelque sorte, puisqu'ils s'en trouvent de nombreux Burkinabè qui estiment que l'UA aurait dû voir venir la Révolution du 30 octobre, et la prévenir. Et comme elle n'a pas eu le nez creux, son rôle est de soutenir les acteurs pour remettre le pays sur les rails.

Le Lt-cl semble donc avoir eu raison, en privilégiant la réussite du processus transitionnel que les délais et autres dates butoirs imposés par l'UA. Encore, que ça ressemblait plus de la part de la fille de l'OUA, à une condamnation de principe qu'à une menace réelle.

Mais, cette visite de Mohamed Ould Abdellaziz revêt une autre signification pour le Burkina Faso : il s'agit d'un début de dégel entre les deux pays.

Sauf erreur ou omission, depuis le président Maaouya Ould Taya jusqu'à Abdellaziz en passant par Ely Ould Val et Sidi Ould Cheick Adellahi, démocratiquement élu en 2007, jamais un président mauritanien n'est venu en visite d'amitié ou de travail au Burkina Faso.

La brouille entre les deux pays est de notoriété publique et un homme semble être à la base de ce froid : Moustapha Chafi, conseiller spécial de l'ex-président Blaise, celui-là même qui a été au cœur de la libération de nombreux otages européens, enlevés dans le désert saharien.

Accusé par la justice mauritanienne de comportement séditieux et surtout «d'appui financier au terrorisme», notamment à la rébellion des Cavaliers du Changement, l'Etat mauritanien a lancé un mandat d'arrêt contre Moustapha Chafi, lequel a répliqué en posant plainte contre le président Abdellaziz.

En faisant de lui son conseiller, Blaise ne pouvait que rendre tièdes les rapports entre les deux pays.

Le litige est tel qu'en 2003, un leader politique, Hermann Yaméogo (opposant à l'époque) avait été accusé par Blaise de s'être rendu en Mauritanie pour avoir de l'aide, afin de déstabiliser son pouvoir.

En décidant de venir dans l'immédiat après Compaoré, le premier magistrat mauritanien trace ainsi donc les sillons d'une décrispation.

Enfin subsidiairement, le général Mohamed Abdellaziz a sans doute profité de ce séjour pour prodiguer quelques conseils au Lt-cl Zida. En effet, l'actuel président mauritanien s'y connaît en matière de coup d'Etat.

Dans une vie antérieure, il fut patron du Bataillon de la sécurité présidentielle (BASEP), l'équivalent du RSP au Burkina Faso. A ce titre, il a été au cœur, sinon l'artisan de plusieurs putschs : pour installer OuldTaya, ensuite, le renverser le 3 août 2005, pour mettre Ely Ould Val, et enfin, il a poussé Abdellahi, un civil, à se présenter à la présidentielle de mars 2007, pour le renverser ensuite le 6 août 2008.

On espère cependant, que ce n'est pas pour inciter le Lt-col Zida à s'accrocher au pouvoir. Le Burkina n'est pas la Mauritanie, et les événements des 30 et 31 octobre n'ont rien à voir avec un banal putsch.

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