Situation nationale : Faut-il flipper de la présence du Blaiso à Abidjan ?

| 24.03.2015
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Situation nationale : Faut-il flipper de la présence du Blaiso à Abidjan ?
© DR / Autre Presse
Situation nationale : Faut-il flipper de la présence du Blaiso à Abidjan ?
Hier, il était considéré comme un président à forte potentialité de nuisance pour ses voisins. Après sa chute, fin octobre dernier, il s'est retrouvé en situation d'exilé dans l'un des pays voisins qu'il avait contribué -à tort ou à raison- à «déstabiliser» en 2002. Le Blaiso a été le parrain attitré de la rébellion qui a fini par accompagner Alassane Ouattara au pouvoir en Eburnie. La question qui brûle les lèvres à Ouagadougou est de savoir si la présence de l'enfant terrible à Abidjan peut compromettre la transition politique en cours au Faso.


Cette interrogation est d'autant plus à prendre au sérieux qu'elle se glisse dans la tête au moment où un groupe «d'insurgés» a empêché l'Auguste sinistre de l'Administration territoriale de terminer la rencontre d'explications qu'il devait y avoir avec la diaspora sur l'impossibilité d'étendre les prochaines élections aux Burkinabè de l'étranger. Les mauvaises langues ont vite fait de voir la main du Blaiso -et de son affidé d'ambassadeur Justin Koutaba- derrière le mouvement d'humeur de ces empêcheurs de tourner en rond. L'incident d'Abidjan a donc eu le mérite de réveiller le Faso de son sommeil par rapport aux capacités de nuisance d'un président déchu qui, selon notre confrère Jeune Afrique, s'est désormais installé dans la capitale ivoirienne avec sa Chantou, sa dulcinée de tous les temps. Avec armes et bagages?

On ne s'en doute pas. Car, pour ceux qui connaissent -ou pensent connaître le Blaiso-, l'homme adore la «vengeance» à l'instar d'un monstre froid. Depuis son exil forcé et quelque peu mystérieux du palais de Kosyam, on ne cesse de se demander comment il a pu plier aussi facilement. Jusqu'à présent, rien n'a véritablement filtré du deal qui a été scellé avec ses «lieutenants» avant qu'il ne prenne le large. Curieusement, il était parti avec sa garde rapprochée dont le chef n'est autre que le lieutenant-colonel Moussa Céleste Coulibaly, aujourd'hui installé à la tête du très flippant Régiment de sécurité présidentielle (RSP).
Quand on sait que cet officier a accompagné le président déchu d'abord à Yamoussoukro -où son avion d'exilé a d'abord atterri-, puis au Maroc -où il serait allé se faire soigner-, on n'a pas besoin de dessin pour comprendre le degré d'attachement entre les deux hommes. En tout cas, pour continuer à assurer la sécurité d'un président que l'on dit chassé par une insurrection populaire, il faut avoir de bonnes raisons. Visiblement, le RSP a de bonnes raisons de croire qu'il a son mot à dire dans la gestion actuelle du pouvoir. Pour le dire plus clairement, c'est Blaise qui est parti, mais eux sont là. Et n'entendent pas être exclus des instances de décision. Cela est d'autant plus clair qu'ils gardent solidement la main sur Kosyam. Et ceux qui y vont et viennent.

Le cordon ombilical est donc maintenu entre le Blaiso et la haute hiérarchie militaire. Plus les jours passent, plus on a des doutes sur la capacité des tenants du pouvoir de la Transition à répondre aux aspirations véritables de l'insurrection populaire des 30 et 31 octobre. «La révolution» annoncée par le lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida à l'ex-Place de la nation se révèle aujourd'hui comme du pur bluff. Une ruse qui lui a permis, en son temps, de damer le pion à tous les autres prétendants à la présidence de la Transition. Quand il a eu ce qu'il voulait, il en a aussi fait ce qu'il voulait, à savoir placer ses amis et coreligionnaires aux postes juteux du gouvernement et de l'administration publique. Ceci explique pourquoi ses frères d'armes du RSP ont tenu aussi à avoir leur part du gâteau-cadeau.

Pour revenir à la question de la clarification du «statut de Blaise Compaoré» qu'exigent à bon droit les Organisations de la société civile, force est de reconnaître, pour une fois, que ces «forces sociales» ont mis le doigt sur la vraie plaie de la Transition. Car, aussi longtemps que le pouvoir transitionnel ne sera pas capable de situer clairement l'opinion nationale et internationale sur le sort du Blaiso, il sera difficile de ne pas avoir peur pour l'issue de la Transition. Et surtout de ne pas croire que l'ex-président continue de tirer les ficelles pour ne jamais perdre la main sur la gestion des affaires publiques au Burkina Faso.

Déjà, en permettant à la plupart de ses anciens collaborateurs stratégiques de conserver leurs postes et leurs positions, la Transition avait péché par naïveté, si ce n'est par compromission. C'est connu, on ne met pas du «vin nouveau dans de vieilles outres». Autrement, les outres se rompent, le vin se répand, et les outres sont perdues. C'est à quelque chose près ce à quoi on assiste aujourd'hui avec les principaux acteurs de la Transition. Chef Kaf' et son Premier sinistre Zinedine Zida semblent dépassés par les événements.

Il suffit de jeter un coup d'œil dans leurs tiroirs des dossiers pendants de crimes économiques et de sang pour se rendre compte que rien n'a bougé. Même tantie "J'ose Fine" a perdu de sa verve des premières semaines de la Transition. Elle tourne en rond autour des affaires qui auraient dû être mises en branle depuis longtemps. C'est ainsi que la Transition aurait pu clouer le bec au Blaiso à tous ceux qui pronostiquent aujourd'hui sur son «retour triomphal à Kosyam».

Et puis, il suffit que les tenants du pouvoir de la Transition s'inspirent de la stratégie de son hôte à Abidjan pour mettre définitivement le Blaiso hors d'état de nuire. Au moment où Alassane Ouattara achève son premier mandat présidentiel et s'apprête à en briguer un second, il a donné un coup d'accélérateur à la justice ivoirienne qui vient de coller 20 ans de prison ferme aux partisans de son rival, y compris à sa femme Simone, en plus de 10 ans de déchéance de leurs droits civiques. Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé étant largués très loin là-bas à la Haye, Ouattara n'a donc aucune crainte à avoir.
Pour ne plus continuer à flipper de la présence du Blaiso à Abidjan, il suffit de prendre exemple sur l'home fort actuel d'Abidjan. Et en la matière, ce ne sont pas des dossiers qui manquent à chef Kaf' et à la justice burkinabè, mais la volonté d'aller jusqu'au bout des aspirations exprimées par une bonne partie du peuple burkinabè à travers l'insurrection de fin octobre.

F. Quophy

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