Mais hélas! Ce que l'on redoutait le plus est fait, est arrivé à grands pas. Le Rubicon est franchi pour tenter d'imposer une patrimonialisation du pouvoir ici au Pays des Hommes intègres.
En effet, le Conseil des ministres extraordinaire tenu le mardi 21 octobre a marqué l'accord de Blaise Compaoré (c'est sa seule volonté qui est faite) pour la convocation d'un référendum. Le chemin choisi pour réaliser ce coup est l'Assemblée nationale où les députés seront soumis au vote d'un projet de loi qui semble déjà prêt.
Fini donc le suspense! Le locataire de Kosyam a enfin révélé son ambition de s'ériger en monarque. Après 28 ans au pouvoir en 2015, il a décidé donc de réviser l'article 37 de la Constitution. Le vin est donc déjà tiré.
En revanche, les défenseurs de la démocratie doivent refuser de boire son contenu très indigeste. Que faire donc? Telle est maintenant la question et dont la réponse qui s'impose est la lutte politique. Seule la lutte paiera.
Dans cette perspective, la résistance parlementaire de l'opposition politique qui était en branle serait sans doute mise à contribution. En plus des partis de l'opposition vraie et non celle mouton, une frange importante des députés du CDP voteront contre le projet.
Mais il ne faut surtout pas compter trop sur l'ADF-RDA dont la position est ambigüe. Si Blaise Compaoré s'est enfin résolu à choisir la voie parlementaire, c'est qu'il a espoir de bénéficier d'un soutien peut-être de taille qui ne pourrait être autre que «le parti de l'éléphant». Le président de ce parti, Me Gilbert Noël Ouédraogo, pourrait faire basculer sa position, si ce n'est déjà fait, au profit de Blaise Compaoré. A cet effet, la proposition du poste de Premier ministre comme contrepartie pourrait bouleverser profondément son esprit au point de lui faire retourner sa veste. D'ailleurs, les sages de l'ADF-RDA avaient laissé entendre en début de semaine que leur parti n'avait pas de leçon de recevoir de la part de quiconque. C'est dire que l'on commence à prendre ses distances vis-à-vis des autres partis.
On peut donc de penser que la proposition du poste de chef de gouvernement pourrait intéresser fortement le député-maire de Ouahigouya. Lors des rencontres du dialogue à Kosyam, Me Gilbert ne cessait d'afficher, l'on se souvient, un sourire des grands jours comme pour traduire l'avenir est le sien, déjà tout tracé et radieux. S'imagine-t-il déjà Premier ministre recevant des honneurs dignes de son rang? Après le père le fils? Toujours est-il que son parti jouera un rôle décisif lors du passage du projet de loi à l'Assemblée nationale, même si certaines sources indiquent que 5 députés ne seraient pas sous son contrôle effectif.
Quoi qu'il en soit, le projet de loi ne pourrait passer aucunement lors d'un vote à bulletin secret au Parlement. En clair, il ne sera pas possible pour ce projet de bénéficier de l'aval des 3 quarts des députés comme prévu par la loi. De ce fait, rien n'est encore joué. Et, à moins d'un passage en force, l'initiative de soumettre le projet à un vote à l'hémicycle pourrait être contreproductive, voire une déroute pour le pouvoir. Ce serait tant mieux.
En réalité, il s'agit d'une tentative désespérée que le peuple devrait se mobiliser pour étouffer dans l'œuf et empêcher à tout prix par la voie légale.