Recommandations et réformes nécessaires de la CRNR pour la réconciliation et la construction d’une paix durable

| 09.12.2015
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Mgr Paul Ouédraogo - Président de la Commission de Reconcilation Nationale et des Reformes(CRNR)
© DR / Autre Presse
Mgr Paul Ouédraogo - Président de la Commission de Reconcilation Nationale et des Reformes(CRNR)
Message de la Commission de la réconciliation nationale et des reformes


Peuple burkinabè, un vent nouveau souffle sur le Burkina Faso!

Pour la réconciliation et la construction d’une paix durable, mobilisons-nous pour lutter contre l’impunité et pour assurer la transparence dans la gestion des affaires publiques. La Réconciliation nationale suppose des réformes dans la gouvernance politique, économique, sociale et environnementale. C’est pourquoi la Commission de la Réconciliation Nationale et des Réformes (CRNR), au terme de ses travaux a déposé son rapport général ainsi que les rapports des 5 sous-commissions. Dans son rapport, la CRNR a fait des recommandations fortes qu’elle a le devoir et le plaisir de rappeler à votre souvenir. Ce sont, entre autres:

1- Au titre de la promotion de la bonne gouvernance

  • limiter la taille du gouvernement à vingt-cinq (25) ministres au plus;
  • renforcer la transparence sur le patrimoine du chef de l’Etat et des membres du Gouvernement par l’amélioration du dispositif de contrôle par les organes compétents;
  • Définir, au moyen d’une loi organique, le découpage ministériel en vue de réduire l’instabilité du format du gouvernement et les coûts inhérents.
  • Instaurer la transparence sur la rémunération des élus, des membres du gouvernement, du Chef de l’Etat lui-même et des Présidents d’institutions.
  • Conduire une enquête diligente sur l’existence de faits de gratification des membres du gouvernement ou d’autres responsables (sous la forme de distribution de liquidités importantes qui prennent quelquefois des allures d’un système de «rémunérations parallèles») rapportés à la Commission. Le cas échéant en tirer rigoureusement toutes les conséquences au plan judiciaire.
  • Mettre aux normes la gestion du parc automobile de l’Etat, du carburant, du téléphone et de l’eau.
  • Réformer la gouvernance des baux de l’Etat par l’adoption d’une politique conséquente d’orientation et d’encadrement.
  • Engager une politique vigoureuse contre la gabegie et les dépenses de prestige. La gestion de l’Etat doit être assise sur la conscience ferme que «l’Etat moderne», «l’Etat modèle», est aussi «l’Etat modeste».
  • étendre la compétence des juridictions de droit commun aux crimes et délits commis par le Président du Faso et les membres du Gouvernement dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions;
  • limiter les compétences de la Haute cour de justice au seul cas de haute trahison ou d’attentat à la Constitution commis par le Président du Faso;
  • soumettre l’Assemblée nationale aux règles de la comptabilité publique et renforcer la responsabilité de son président en matière de gestion;
  • supprimer l’amnistie accordée aux anciens chefs d’Etat dans l’optique de créer les conditions pour la manifestation de la vérité et de la justice, gage de paix et de cohésion sociale.

2- Au plan politique

  • Interdire les cellules politiques et leurs manifestations dans les services publics,
  • Dépolitiser les forces de défense et de sécurité, la Justice, les Organisations de la Société Civiles (OSC) en appliquant rigoureusement les textes.
  • Susciter une clarification des courants politiques permettant une classification idéologique nette des différents partis politiques.
  • Respecter les règles de jeu démocratiques notamment l’alternance.
  • Doter la chefferie coutumière et traditionnelle d’un statut sacralisant sa neutralité, son impartialité dans l’arène politique.
  • Mettre en œuvre une véritable politique de recrutement des forces de défense et de sécurité fondée sur la morale, le respect de la discipline et de l’ordre républicain,
  • Retirer les armes irrégulièrement et illégalement détenues.
  • instituer la bonne moralité comme condition requise pour être dirigeant d’un parti politique;
  • instaurer le respect du quota genre dans les organes dirigeants des partis politiques;
  • obliger les partis politiques à disposer de sièges fonctionnels dans la moitié des régions du pays;
  • interdire au Président du Faso, en tant que garant de l’unité nationale, d’être membre de l’organe dirigeant d’un parti politique
  • obliger les partis politiques à déclarer les subventions, dons et legs à l’autorité de contrôle;
  • élaborer une liste des dépenses éligibles au financement public;
  • obliger les partis politiques bénéficiaires de la subvention hors campagne à consacrer 15% de cette subvention aux activités de renforcement de la participation politique des jeunes et des femmes;
  • instituer le contrôle du financement des partis politiques par l’ASCE.
  • renforcer le principe de la limitation du nombre de mandats présidentiels par le maintien du quinquennat et l’érection de ce principe en clause intangible;
  • instituer une subvention publique pour soutenir la réalisation d’œuvre d’intérêt public par les anciens chefs d’Etat, en vue de promouvoir l’alternance démocratique;
  • réduire l’âge limite pour se porter candidat à la fonction de Président du Faso, de 75 à 70 ans.
  • renforcer le pouvoir d’initiative législative des députés par l’abrogation du principe de la délibération des propositions de lois par le Conseil des ministres;
  • instaurer le contrôle parlementaire sur les pouvoirs de nomination du Président du Faso aux hautes fonctions civiles et militaires;
  • supprimer de la Constitution la disposition consacrant le pouvoir du Président du Faso de fixer les grandes orientations de l’Etat, disposition incompatible avec l’hypothèse d’une cohabitation;
  • encadrer l’exercice des pouvoirs exceptionnels du Président du Faso à travers le renforcement des pouvoirs de contrôle du Parlement et du Conseil constitutionnel

3- Au plan du renforcement des contre-pouvoirs institutionnels

  • consolider l’indépendance et l’impartialité du Conseil constitutionnel:
  • réduire le nombre des membres désignés par le Président du Faso;
  • instituer le Chef de fil de l’opposition comme autorité devant désigner deux membres du Conseil constitutionnel.
  • élargir les pouvoirs du Conseil constitutionnel à la protection des droits et libertés, au contrôle des lois de révision constitutionnelle et à la régulation de la vie politique.

4- Au plan économique.

  • Dédier au moins 30% des recettes fiscales minières à l’investissement
  • Appliquer les textes et sanctionner les auteurs de crimes économiques,
  • Rendre obligatoire l’usage du textile local pour l’uniforme scolaire, le pagne du 8-Mars et le promouvoir pour tous les pagnes événementiel,
  • Prendre dans les meilleurs délais, des dispositions juridiques pour démanteler les «monopoles de fait» qui étouffent l’émergence de jeunes opérateurs et freinent la compétitivité économique,
  • Renforcer les sanctions pénales ainsi qu’administratives relatives aux infractions économiques notamment sur les marchés publics,
  • Mettre en œuvre une véritable politique de sécurité alimentaire en vue d’endiguer le déficit alimentaire chronique,
  • Veiller à ce que les recettes des transactions foncières soient effectivement versées dans les comptes du trésor public,

5- Au plan judiciaire

  • Allouer un budget conséquent au ministère de la Justice afin de mettre en œuvre diverses mesures pour rapprocher la justice du justiciable,
  • Renforcer les capacités des acteurs par la formation initiale et par la spécialisation. Appliquer avec rigueur les règles d’éthique et de déontologie,
  • Humaniser les lieux de détention en construisant de nouveaux et / ou en réhabilitant les vieux locaux,
  • Pourvoir les lieux de détention de structures d’enseignement, de formation professionnelle, de promotion des activités socioculturelles et de suivi socio-psychologique,
  • Construire de nouvelles infrastructures de juridictions et redynamiser les tribunaux départementaux et d’arrondissements,
  • Créer l’Autorité de Mise en œuvre du Pacte (AMP) pour veiller à la mise en œuvre impérative des recommandations pertinentes.
  • Traduire les auteurs de crimes, relevés par des enquêtes, devant les juridictions compétentes,
  • Assurer une réparation à toutes les victimes ou ayants droit,
  • Doter les juridictions en fonds spéciaux pour l’organisation des audiences foraines pour les affaires en état d’être jugées,
  • Constituer un pool d’avocats, une assistance psychologique, pour assister les victimes et/ou ayants droit référés en justice par l’instance de réconciliation nationale.
  • Mener une enquête administrative pour élucider les faits et situer les responsabilités pour les crimes et délits prescrits pénalement mais non civilement

6- Au plan de la gestion des contentieux pendants

  • Prendre immédiatement et totalement en charge les soins des blessés de l’insurrection,
  • Indemniser sans exception les victimes de l’insurrection ou leurs ayants-droit,
  • Indemniser au cas par cas, les victimes de pillages, de vols et d’incendies résultant de l’insurrection ou inspirés par un mobile politique (dossiers de la chambre de commerce et les dossiers individuels),
  • Initier des actions urgentes pour permettre aux sociétés de redémarrer leurs activités en vue de maintenir les emplois et de relancer l’économie,
  • inscrire dans le budget national 2015-2016, une ligne permettant à l’administration d’indemniser les victimes.
  • rendre effectif l’exercice du droit de pétition par une clarification des modalités d’exercice de ce droit;
  • rendre obligatoire le service militaire, facteur de promotion du civisme, du patriotisme et de la cohésion entre civils et militaires;
  • rendre imprescriptibles les crimes de génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, les crimes d’agression, les crimes économiques, les crimes environnementaux et le terrorisme.
  • Créer sous la Transition et par loi un Haut Conseil de la Réconciliation et de l’Unité Nationale (HCRUN) pour assurer la gestion immédiate des cinq mille soixante-quatre(5065) dossiers enregistrés par la Commission,
  • Doter le HCRUN de ressources conséquentes (humaines, financières et matérielles) pour son fonctionnement.

7- Au plan social et culturel

  • Valoriser notre propre histoire et nos différentes cultures,
  • Instaurer, au moyen de la loi, l’obligation de consacrer 1% des budgets de construction d’immeubles publics à l’achat d’œuvres locales d’art et d’artisanat d’art pour leur ameublement et décoration.
  • Elargir la réforme du 1%, dans un deuxième temps, à tous les immeubles ayant vocation à recevoir du public.
  • Récompenser l’intégrité, la compétence et le dévouement au travail sur la base du mérite.
  • Améliorer la qualité du système éducatif en adéquation avec une réelle politique de l’emploi tout en mettant un accent particulier sur la formation à l’auto emploi,
  • Organiser mieux le secteur informel, sylvo-agropastoral en vue de créer des emplois notamment en milieu rural principalement pour les jeunes et les femmes,
  • Créer et/ou redynamiser les usines (textiles, huile, savon, sucre et riz), en vue de les rendre performantes, compétitives pour favoriser l’essor économique et la création d’emplois,
  • Réduire les inégalités et injustices sociales par la répartition équitable des ressources nationales,
  • Initier des activités de développement pour freiner le processus de paupérisation notamment en milieu rural.
  • Améliorer les cadres de formation et d’enseignement des jeunes,
  • Faciliter l’accès des jeunes aux besoins sociaux (santé, éducation, transport, logement)
  • Valoriser la fonction enseignante.

8- Au plan de l’énergie

  • Modifier la tarification de l’électricité et cibler la politique de subvention sur les segments sociaux.
  • Créer un fonds d’investissement dédié au secteur de l’énergie et alimenté par au moins 15% des recettes publiques minières.
  • Confier au fonds d’investissement un rôle d’acteur financier stratégique du développement du secteur de l’énergie (électricité, gaz, solaires et technologies d’économies d’énergie, etc.).
  • Doter le fonds d’investissement dans l’énergie de la personnalité juridique lui permettant de s’appuyer sur les ressources publiques reçues pour lever des financements complémentaires substantiels et à des taux préférentiels.
  • Fusionner le fonds de développement de l’électricité (FDE) avec le nouveau fonds.
  • Refonder la politique énergétique autour d’options stratégiques d’un mix énergétique, des énergies renouvelables ainsi que d’économie d’énergie.
  • Diversifier les sources énergétiques et renforcer la souveraineté énergétique nationale.
  • Renforcer le mix énergétique autour de mamelles alternatives du solaire (production domestique, commerciale et industrielle), du thermique, de l’hydroélectricité, du gaz, de la biomasse, etc.
  • Eriger l’énergie solaire en priorité nationale et y dédier un investissement conséquent.
  • Renforcer les moyens techniques, matériels, humains et financiers de l’IRSAT afin qu’il assume le rôle d’institut de référence pour l’assurance qualité et de labellisation des équipements énergétiques.
  • Adopter une stratégie nationale d’économie d’énergie.

9- Au plan des Médias et de l’Information

  • réduire le quota des conseillers désignés par le Chef de l’Etat et le Président de l’Assemblée Nationale (2 pour chacun d’eux au lieu de 3) au Conseil supérieur de la Communication (CSC);
  • élargir la base sociale de désignation des conseillers du CSC;
  • recentrer progressivement le champ de compétences du CSC sur l’audiovisuel;
  • définir des conditions plus rigoureuses, en termes de profil, pour la désignation des membres du Conseil supérieur de la communication;
  • élargir la compétence du CSC au recrutement des Directeurs généraux des médias publics pour garantir leur indépendance de la tutelle ministérielle;
  • mener une réflexion d’ensemble sur l’opportunité du maintien de plusieurs institutions de régulation des contenus et des contenants (CSC, ARCEP). Une seule institution semble pouvoir rendre cohérente la régulation de la communication au Burkina Faso, au regard des conflits de compétences qui s’observent dans leur gestion. A défaut, il faut relire l’ensemble des textes sur leurs attributions pour en assurer une plus grande cohérence;
  • mettre à disposition du Conseil supérieur de la communication des équipements techniques adéquats pour un contrôle intégral du paysage audiovisuel national.
  • intégrer dans les missions de l’ARCEP, l’appui au secteur des médias qui sont une composante essentielle du secteur de la communication;
  • veiller à une stricte application des compétences respectives du Conseil supérieur de la communication et du Ministère de la communication dont les relations sont parfois marquées par des conflits résiduels non conformes à l’esprit du dispositif juridique en vigueur;
  • Mettre à la disposition de l’Observatoire Burkinabé des Médias (OBM) des moyens nécessaires pour en assurer une plus grande visibilité et une plus grande efficacité d’action (un siège, du personnel et des ressources financières pour son fonctionnement).
  • Octroyer un statut de services d’utilité publique à l’OBM et au Centre national de presse Norbert ZONGO.
  • Orienter la formation des journalistes vers la spécialisation (économie, santé, mines, agriculture, environnement, etc.).
  • Assurer la formation de journalistes dans les universités européennes à l’effet d’une diversification des profils. Dans ce sens, il peut être procédé au recrutement par voie de concours, pendant cinq (5) ans au minimum, de 2 à 3 étudiants pour des formations dans les universités européennes.
  • Augmenter de façon substantielle la subvention de l’Etat à la presse privée, pour tenir compte de la nouvelle configuration du paysage médiatique national.
  • Accélérer le processus d’adoption du projet de loi portant création du Fonds d’appui à la presse privée et de ses textes d’application en vue de sa mise en œuvre effective dans la loi de finances gestion 2016.
  • Reconduire sur un certain temps les exonérations douanières et fiscales accordées par la loi de finance 2015 sur les importations de matériels et équipements aux entreprises de presse privée burkinabè.
  • Créer, dans l’immédiat, des conditions plus propices à l’application effective, par les patrons de presse burkinabè, de la convention collective.
  • Créer une Centrale d’achats pour la presse écrite.
  • Acquérir une rotative pour la presse écrite.
  • Faire conduire une étude de faisabilité pour la création d’une messagerie qui pourrait être envisagée dans le cadre d’un partenariat entre «Sidwaya» et la SONAPOST, mais qui bénéficierait à toute la presse écrite nationale.
  • Soutenir la création d’une structure de formation aux métiers de la publicité.
  • Elargir les pouvoirs de régulation du CSC aux pratiques et respects des attributions et conditions d’exploitation des espaces publicitaires des communes urbaines.
  • Adopter un cahier de charges applicable aux agences de communication.
  • Instaurer une commission paritaire ad’ hoc CSC-Publicitaires associés et autorités fiscales, chargée de la vérification périodique de la conformité des agences de communication aux prescriptions du cahier des charges.

10- Au plan de la gestion foncière

  • Former les agents de l’administration et les acteurs locaux sur la règlementation relative au foncier.
  • Mettre en œuvre les textes juridiques relatifs au foncier et aux ressources naturelles pour une meilleure gestion de l’espace rural, pour la prévention et la gestion des conflits, pour une meilleure protection et restauration des ressources naturelles.
  • Interdire les lotissements à caractère anarchique,
  • Renforcer le contrôle d’attribution des parcelles et sanctionner les contrevenants à la règle,
  • Faciliter l’accès à la propriété aux populations les plus vulnérables,
  • Promouvoir la réalisation des logements sociaux pour diminuer les risques de délinquance et de grand banditisme.

Peuple du Burkina Faso,

Le besoin de renouveau est une urgence dans les principaux secteurs de la gouvernance et de la société, la rénovation politique et institutionnelle, la modernisation du système électoral, la gestion efficace des médias et de l’information; les défis de la gouvernance des finances publiques et de l’économie, la réhabilitation de la santé et de l’éducation; le péril environnemental et la «bombe foncière»; le besoin de vérité et de justice; l’impératif de réconciliation nationale; etc. Face à cette urgence, il faut abandonner les satisfécits minimalistes, les congratulations superficielles et la fixation sur les progrès du pays. Donnons-nous donc la main pour un Burkina nouveau.

La CRNR

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