Mais, quand on pousse un peu plus loin la réflexion, on se rend compte que Salif n’a fait que couper l’herbe sous les pieds de Roch. Politiquement parlant. Si tant est qu’il pouvait et a pu faire de Roch le président du Faso, pourquoi donc ne s’est-il pas fait, lui-même, président du Faso ? Salif, en vérité est conscient de ses limites à ce niveau-là. Il sait que s’il s’était lui-même présenté, les Burkinabè ne l’auraient pas élu. En politique, on appelle cela de la realpolitik. Il sait mettre l’homme qu’il faut à la place qu’il faut. C’est ce qu’il a fait. Quitte à faire semblant de jouer les seconds rôles. Pour ceux qui ne l’ont pas remarqué, tous les " grands " qui vont à Kosyam rendre visite à Roch pour une raison ou pour une autre, se rendent ensuite à l’hôtel des députés qui fait office d’Assemblée nationale pour la même chose. Bref.
En outre, quand on observe bien les résultats de la présidentielle et des législatives, on se rend bien compte que les Burkinabè ont plutôt porté leur choix sur un homme, Roch Marc Christian Kaboré qui a obtenu un peu plus de 1,669 million de voix. Par contre, aux législatives qui étaient couplées avec la même présidentielle, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) dont le maître à penser et l’un des géniteurs est Salif Diallo, n’a obtenu que 1,096 million de voix. Partant de cette légitimité qui a été accordée à Roch Marc Christian Kaboré, on peut dire qu’il est le vrai chef de l’Etat et devait pouvoir travailler en tant que tel. C’est ce qui a été décidé dans les urnes.
A côté de ces deux poids lourds au sens propre comme au figuré qui dirigent les deux principaux pouvoirs (le législatif et l’exécutif), il y a le pouvoir judiciaire qui veut qu’on lui accorde tous ses pleins pouvoirs afin de lui permettre à son tour de travailler. Mais quand on sait que les positions d’un pouvoir judiciaire, même indépendant, ne peuvent que s’inscrire dans la politique globale du pouvoir en place, on se rend vite compte que chacun voudrait, d’une manière ou d’une autre, le contrôler. Faut-il donc comprendre que la récente grève, suspendue, des magistrats n’est pas anodine ?
Attention ! Le troisième poids lourd qui est Simon Compaoré, a son mot à dire dans tout cela. De quel côté se positionne-t-il ? Sans doute dans le global, dira-t-on. Mais, en tant que seul ministre d’Etat, du reste chargé de l’Administration du territoire, de la Décentralisation et de la Sécurité intérieure, il ne peut que s’inscrire dans la collégialité gouvernementale. Pour l’instant. Idem pour tous ces cadres et autres militants qui rongent leurs freins.
Dabaoué Audrianne KANI