Les chefs traditionnels étaient également interdits de porter leurs attributs. Une vague de grèves va conduire à des manifestations qui vont déboucher sur le soulèvement populaire du 3 janvier. L’armée est appelée à prendre ses responsabilités et le Chef d’état-major des armées de l’époque, le colonel Sangoulé Lamizana, accède au pouvoir, sans faire couler une seule goutte de sang et sans tirer un seul coup de fusil.
Pourtant, Maurice va payer. De péripéties en péripéties (résidence surveillée, tentatives de suicide), le 8 mai 1969, il est condamné, à l’issue d’un procès à huis clos, à cinq ans de travaux forcés, au bannissement à vie et à la déchéance de ses droits civiques. Ses biens immobiliers sont confisqués.
Hermann Yaméogo a-t-il volontairement oublié cette page de l’histoire du Burkina, pour parler d’exclusion dans la course à l’élection présidentielle du 29 novembre 2015? Son propre père a été banni à vie et déchu de ses droits civiques. Il sera réhabilité néanmoins en 1991.
Lamizana, après 14 ans eu pouvoir, va à son tour être renversé, le 25 novembre 1980, par son ‘’pays’’ comme on dit chez les militaires d’avant, le colonel Saye Zerbo, suite à une grave crise avec les syndicats. Là également, aucune goutte de sang n’a coulé. Et pourtant, Lamizana va être jugé par les Tribunaux populaires de la Révolution institués à l’avènement de la Révolution démocratique et populaire (RDP) conduite par le capitaine Sankara le 4 août 1983, en même temps que son tombeur, le médecin-commandant Jean-Baptiste Ouédraogo.
Les prises de pouvoirs violentes avec effusion de sang ont été inaugurées à l’avènement du Conseil provisoire de salut du peuple (CPSP) de Jean-Baptiste, le 7 novembre 1982. L’une des trois victimes enregistrées est le lieutenant-colonel de gendarmerie Badembié Nézien, abattu pour avoir refusé de ramper. Les deux autres sont une secrétaire et une jeune fille atteintes par des ‘’balles perdues’’... qui ont pourtant atteint des cibles.
Lors du coup d’Etat de Blaise Compaoré le 15 octobre 1983, Sankara, tombeur de Jean-Baptiste, paiera le prix fort, criblé de balles par ses bourreaux.
Tous les prédécesseurs de Blaise Compaoré ont donc été jugés hormis Sankara qui a été tué. Il a donc payé de sa vie. Les 30 et 31 octobre 2014, Blaise a fait tirer sur des Burkinabè qui conduisaient un soulèvement populaire les mains nues, comme en 1966.
En plus des 34 personnes qui sont mortes durant le temps de l’insurrection populaire, une centaine de ses compatriotes ont été étouffés, attaqués à la grenade, trucidés ou simplement été portés disparus durant son long règne. De simples villageois à d’illustres personnalités. Pourtant, Blaise se la coule douce chez ses beaux-parents. Non!
Il ne doit pas mourir sans avoir rendu compte de sa gestion. L’insurrection aurait raté son but ultime.
Les Echos du Faso