Le CDP est dans une logique de pré-campagne pour modifier l'article 37
La première observation est que l'on pourrait relever l'incohérence du groupe de la majorité. En effet, ce groupe semble caractérisé par des incongruités. En son sein, nous avons d'une part le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) dont le mot d'ordre du moment consiste à séduire les populations par l'ouverture tous azimuts de chantiers dans la perspective du référendum. De ce point de vue, l'on peut être fondé à croire que de manière cynique, le gouvernement avait rangé dans des tiroirs certaines préoccupations légitimes des populations, pour les sortir de manière opportuniste, à un moment où plus que jamais, il a besoin de gagner leur sympathie pour faire passer et réussir son projet de référendum au bénéfice de Blaise Compaoré. Le CDP est donc dans une logique de pré-campagne pour modifier l'article 37. D'autre part, nous avons l'Alliance pour la démocratie et la fédération /Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA). A son sujet, l'on pourrait se poser la question suivante : que vient faire l'ADF/RDA dans cette galère ? Cette question est d'autant plus pertinente que ce parti avait déjà fait connaître son opposition à la révision de l'article 37. Cette incongruité de l'ADF/RDA pourrait relancer les débats sur la véritable nature de ce parti politique. En effet, les agissements du parti de Me Gilbert Ouédraogo ont toujours été de nature à faire perdre aux Burkinabè leur latin. Les esprits cartésiens pourraient développer des ulcères au cas où ils tenteraient de percer la logique de ce parti. Et pour cause, après avoir vainement et indécemment tenté de revendiquer le label du parti de l'opposition pendant que ses bonzes siégeaient au gouvernement, il avait fini par en être éjecté, pour avoir contrarié le CDP à propos de l'article 37. Aujourd'hui, il revient s'asseoir avec le même CDP face à l'opposition politique dont la principale revendication, au-delà de l'article 37, porte sur l'alternance politique au Burkina.
Il y a là, véritablement, un manque de confiance de l'opposition en Blaise Compaoré
Cela dit, l'autre observation que l'on peut faire sur ce rendez-vous gâché, porte sur le préalable de l'opposition qui a exigé que ses interlocuteurs lui présentent un mandat de Blaise Compaoré les investissant de parler en son nom. A ce sujet, l'on peut supposer que l'opposition, instruite par le passé, sait que Blaise Compaoré a plus d'un tour dans sa besace. L'enjeu de la médiation pour Zéphirin Diabré et ses camarades, pourrait être d'aboutir à une déclaration officielle de Blaise Compaoré dans laquelle celui-ci s'engagera solennellement à renoncer à sa velléité de rebeloter en 2015. Or, dans le cas d'espèce, ils se retrouvent face à des gens dont la parole pourrait être inaudible du côté de celui qui est au cœur même de la crise. Cette attitude de prudence de l'opposition est d'autant plus justifiée que Blaise Compaoré lui a déjà apporté la preuve qu'il n'est aucunement lié aux recommandations d'apaisement que plus d'une structure, mise en place d'ailleurs par lui-même, avaient formulées, pour sortir le pays d'une zone de turbulences. Ce fut le cas du Collège de sages par exemple et dans une certaine mesure du Conseil consultatif pour les réformes politiques (CCRP). Il y a là, véritablement, un manque de confiance de l'opposition en Blaise Compaoré. Dans le même registre, la dimension secrète du tempérament de l'homme peut laisser croire que même ses plus proches collaborateurs peuvent ne pas savoir ce qu'il est réellement en train de mijoter en son for intérieur face aux grandes questions que les Burkinabè se posent aujourd'hui. Dans ces conditions, l'opposition a donc raison de faire comme Saint Thomas : « Attendre de voir avant de croire ». En attendant, l'on peut déjà percevoir tout ce remue- ménage comme une grande diversion avant le référendum dont les signes avant-coureurs pourraient être ces chantiers que le gouvernement lance à tour de bras en ce moment et à l'occasion desquels des discours politiciens et électoralistes sont servis à satiété aux populations. Vu sous cet angle, la prudence de l'opposition pourrait être la traduction de l'adage suivant : « chat échaudé, craint l'eau froide »
Pousdem Pickou