MARCHE-MEETING DE L’OPPOSITION : Ils sont encore sortis nombreux à l’appel de l’opposition

| 29.07.2013
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MARCHE-MEETING DE L’OPPOSITION :  Ils sont encore sortis nombreux à l’appel de l’opposition
© DR / Autre Presse
MARCHE-MEETING DE L’OPPOSITION : Ils sont encore sortis nombreux à l’appel de l’opposition
Alors que les élections sénatoriales se déroulaient, le 28 juillet 2013 dans les différentes mairies, au même moment, les partis politiques affiliés au chef de file de l'opposition ont organisé une marche-meeting. Parti de la Place de la Nation, le cortège s'est ébranlé jusqu'au Rond-point des Nations unies, sans heurt, sans gaz lacrymogène, sans message à remettre aux autorités, « l'autorité » n'ayant pas répondu à la première lettre à elle transmise.

Un mois après leur marche-meeting organisée pour dire « non à la mise en place du Sénat au Burkina Faso », les partis politiques affiliés au chef de file de l'opposition ont organisé une seconde marche-meeting toujours dans la même veine de contestation de la mise en place du Sénat. L'ironie est qu'au même moment, ce 28 juillet 2013, se déroulaient, dans les différentes mairies, les élections sénatoriales.

Des similitudes entre la marche-meeting du 29 juin et celle du 28 juillet : la même cause, le même trajet, mais pas de message remis, pas de bousculade, plus de monde, pas de gaz lacrymogène, même si le dispositif est là. Justement pour ce qui concerne la foule, dès 8h, elle était là, surchauffée, sifflets aux lèvres pour les uns, pancartes en mains pour les autres. Des slogans, des mots à l'encontre du pouvoir en place, de la musique, oui de la musique reggae vue comme musique engagée diffusée et reprise parmi le brouhaha produit par les coups de sifflets et les cris de cette foule en colère. Sur les pancartes, du tout. Du bon et du mauvais français. Tenez ! Sénat avec "T" et sans "T" à la fin, Sénat écrit avec "S" ou avec "C", peu importe le message, lui était on ne peut plus clair : " Non au Sénat, on veut du travail". Le message était tantôt menaçant : " Si tu touches à l'article 37, on t'envoie à la CPI". C'est dans cette ambiance que le cortège s'est ébranlé à 9h 30mn, sans Zéphirin Diabré, sans Arba Diallo et sans Bénéwendé Sankara, mais ces derniers l'ont rejoint plus tard. Ils étaient plus loin devant, attendant le reste du cortège.
Le cortège, de la Place de la Nation, est passé sur l'avenue du Médiateur, l'avenue Gamal Abdel Nasser, celle de Monseigneur Thevenoud pour rejoindre l'avenue Kwamé N'Krumah. De là, il est allé au Rond-point des Nations et a continué pour fermer la boucle à la Place de la Nation. Au cours du parcours, coups de sifflets toujours, slogans, mots à l'encontre du régime en place avec particulièrement des noms cités par la foule. "Que de monde, s'est écrié un badaud !". Au passage, applaudissements, encouragements, slogans pour accompagner les marcheurs alors que boutiques et commerces étaient tous fermés. Plus les marcheurs avançaient, plus ils s'excitaient. Au niveau du cimétière municipal, ils se sont mis à courir à petits trots et ce jusqu'à la Place de la Nation. Au niveau du Rond-point des Nations unies, une grosse frayeur s'est emparée de la foule ou du moins de la partie qui était restée sage. Pour cause, au lieu de tourner pour reprendre la voie menant à la Place de la Nation à partir du rond-point, une partie s'est détachée pour provoquer les policiers qui faisaient le guet. Fort heureusement la sécurité est intervenue et sans broncher, la foule a rallié les rangs et la marche a continué de plus belle. "Malheureusement, il n'y aura pas de gaz lacrymogène", s'est épanché un marcheur, entre deux gorgées d'eau glacée acquise auprès d'un vendeur qui tournait par là. C'est un peu déçu qu'il repartit tout en sueur, toujours avec le sachet d'eau sali par ses mains.
Au bilan donc, pas de blessé au cours de la marche. C'est au retour à la Place de la Nation que dans les bousculades il y a eu des blessés et nous en avons dénombrés deux.

Au retour à la Place de la Nation, après avoir demandé une minute de silence pour les blessés de l'accident survenu au cours du week-end à Sabou, le chef de file de l'opposition politique, Zéphirin Diabré, a fait le bilan de la marche-meeting : " Au nom de tous les partis politiques de l'opposition ici présents, je voudrais vous saluer, vous féliciter et vous remercier pour votre gigantesque mobilisation d'aujourd'hui. Vous êtes sortis une fois de plus nombreux pour dire non au Sénat et non à la politique du gouvernement. Contrairement au CDP, personne ne vous a donné un marché de gré à gré pour vous amener ici, personne ne vous a promis du travail pour vous amener ici, ni 2 000 F CFA pour que vous veniez ici. Vous êtes venus parce que vous êtes des patriotes, parce que vous êtes contre le Sénat, parce que vous voulez d'un Burkina Faso sans révision de l'article 37. Vous avez marché dans le calme, dans la discipline et sans casse ni violence. Vous avez démontré que contrairement à la propagande du gouvernement et son CDP, l'opposition burkinabè est une opposition responsable. Le combat contre le Sénat, c'est le combat pour l'amélioration des conditions de vie et de travail. L'opposition sera tous les jours solidaire à la lutte menée par les travaileurs. Nous ne sommes pas les ennemis des travailleurs, nous sommes les ennemis des sénateurs. Nous ne sommes pas les ennemis, nous sommes les ennemis de ceux qui veulent d'un pouvoir à vie."

Des acteurs se prononcent

Zephirin Diabré, Chef de file de l'opposition

« Nous espérons que le gouvernement va en prendre acte »

« Mes impressions sont très bonnes parce qu'on a eu une mobilisation extraordinaire. Elle est largement supérieure à celle de la fois dernière (NDLR : la mobilisation du 29 juin). Cela montre que notre peuple ne veut ni du Sénat, ni de la révision de l'article 37 ni de la politique du gouvernement. Nous espérons que le gouvernement va en prendre acte. Quand on voit ce qui se passe à Ouahigouya, à Kaya et partout ailleurs, on sent que les gens ne veulent pas de ce Sénat. Je pense que ce n'est pas bon pour le gouvernement de tenter un passage en force. Il faut qu'il écoute la voix de son peuple. Pour la suite, on vous tiendra informés. »

Me Bénéwendé Sankara, UNIR/MS

« Le changement est devenu irréversible »

« C'est une satisfaction totale au point de vue de la sécurité, de la mobilisation et du message. Au regard de la grande mobilisation, c'est la preuve palpable que le peuple est debout. Le changement est devenu irréversible. C'est une marche en avant, c'est un rouleau compresseur, rien ne peut l'arrêter. Ce que nous pouvons faire, c'est de lancer un appel aussi bien à la société qu'à l'opposition politique pour une unité d'action. Il faut qu'on aille de l'avant dans la discipline, dans l'écoute du chef de file de l'opposition politique où tous les partis politiques de l'opposition se retrouvent et se fédèrent. Ceux que vous avez vus ici, c'est le peuple parce qu'il y en a qui ne se retrouvent pas dans un parti politique mais les mots d'ordre ont leur pertinence et leur justesse et nous interpellent. »

Boukari Kaboré dit « Le lion »

« Le mouvement contre le sénat se consolide »

« Les syndicats ne sont pas d'un côté et les partis politiques de l'autre. Les syndicalistes qui veulent participer au Sénat sont d'un côté avec le pouvoir. Les vrais syndicalistes sont avec l'opposition. C'est comme ça. On ne peut pas obliger tous les syndicalistes à détester le Sénat. Il y a des gens qui sont corrompus. Sinon le mouvement contre le Sénat n'est pas divisé. D'ailleurs, il se consolide. »

Saran Séré/Sérémé, Présidente du PDC

« Le peuple se fera entendre par ses voies »

« On ne vient pas en politique pour se servir mais pour servir un peuple. J'ai foi et je crois que le peuple dira toujours son dernier mot parce que du Sénat, on peut aboutir à autre chose. Quand le peuple dit non, c'est non. Aujourd'hui la mobilisation est encore claire. Et si les dirigeants continuent, ils vont pousser le peuple dans son dernier retranchement. C'est ce que nous ne souhaitons pas. Nous voulons un Burkina de paix. Nous voulons aussi qu'on nous écoute. Ceux qui sont en face sont là parce que c'est le peuple qui les a mis là-bas. Et quand ils n'écoutent pas le peuple, il se fera entendre par les voies qu'il décidera en son temps. »

Smockey, collectif « Le Balai citoyen »

« Que le peuple utilise les moyens qui sont à sa portée »

« C'est formidable de voir une jeunesse active, qui accepte une fois de plus de prendre ses responsabilités. C'est une marche à mettre au bénéfice de l'opposition qui l'organise. Nous, dans « Le Balai citoyen » nous savons bien profiter de certains évènements pour passer le message. Il est vraiment important de se rendre compte à quel point cette jeunesse est mobilisée et sensible à ce message. Cela veut dire qu'ils ont compris que c'est vraiment le moment pour eux de réagir. L'horizon 2015 est l'horizon final. Alors, il faut qu'on se dise une chose ; si l'on n'arrive pas à bloquer un passage en force dès maintenant, c'est qu'on n'y arrivera jamais. Quant aux évènements qui se sont passés à Ouahigouya et à Kaya, je trouve cela très bien. C'est de la désobéissance civile mais, c'est une stratégie, le fait d'empêcher les gens d'aller voter. Je pense que c'est ce qui devait se faire sur tout le territoire. Malheureusement, « Le Balai citoyen » vient juste de naître mais nous envisageons mettre des structures sur l'étendue du territoire national pour bloquer les falsificateurs et les fossoyeurs de la démocratie. Notre seul outil, c'est la désobéissance civile. Si on ne peut pas passer par un vote transparent ou par des dispositions qui plaisent à tout le monde, alors que le peuple se retourne contre les dispositions et utilise les moyens qui sont à sa portée. »

Les à-côtés de la marche- meeting

Des marcheurs fans du Dytaniè

Au cours de la marche- meeting, les marcheurs ont entonné plusieurs fois l'hymne national. Ce qui est une bonne chose. Le hic, c'est que le Dytaniè a un peu souffert parce qu'il a été écorché par endroit par certains marcheurs qui ne maîtrisent pas le texte. Pour tout dire, c'est un bon début parce que la volonté y est.

Un flot de pancartes

Vous avez dit pancartes ? Il y en avait en nombre élevé à la marche-meeting du 28 juillet 2013. De la simple feuille de cahier à l'ardoise, chacun y allait de ses moyens.

Le Langage des pancartes

" Le Sénat n'est que la partie visible de l'iceberg"
"Non au Sénat, on veut du travail"
" Si tu touches à l'article 37, on t'envoie à la CPI", cela est une menace, mais le propriétaire de la pancarte ne nous a pas dit à qui elle est adressée.
"Non aux 89 vampires du Sénat, on est fatigué, on n'a plus de sang pour eux"
" Sénat, le peuple ne t'en veut pas". Avouons que là nous n'avons pas compris le message de cette pancarte.
De contenus différents ou convergents, les pancartes dénonçaient, soit la vie chère, soit la modification de l'article 37 ou simplement disait : « Non au Sénat ».

La forte mobilisation des étudiants

« Plutôt un amphithéâtre qu'un Sénat », c'est ce qu'on pouvait lire sur l'une des pancartes des étudiants venus en nombre important pour dire « non au Sénat ».

Mention spéciale à l'Eglise catholique

« Félicitation à l'Eglise catholique », « Merci à l'Eglise catholique », « Bravo à l'Eglise catholique ». Ce sont de tels messages que l'on pouvait lire sur certains écriteaux. Cette sympathie des marcheurs à l'endroit de l'Eglise catholique est certainement la résultante de la déclaration des évêques du Burkina portant sur le Sénat.

Chapeau bas à la Croix-Rouge

La Croix-Rouge a fait du bon boulot lors de la marche- meeting surtout après le meeting d'après-marche. En fait, suite à une bousculade à la Place de la Nation, des personnes ont été blessées. C'est alors que le speaker a appelé les sapeurs-pompiers à l'aide. Mais peine perdue, ils n'étaient pas au rendez-vous. Finalement, c'est la Croix- Rouge qui a remplacé valablement les sapeurs-pompiers. Ce qui a permis de soulager les blessés et ceux qui avaient des malaises.

Vente de sifflets et commerce de balais, la belle saison à la marche-meeting

Les vendeurs de balais ont dû faire de bons chiffres d'affaires à l'occasion de la marche-meeting du 28 juillet 2013. Les vendeurs de sifflets aussi. Le sifflet se vendait sur place à 200 F CFA l'unité. L'un des vendeurs nous a confié qu'il achète le paquet de 12 sifflets à 2 000 F CFA. A 8h 30, il avait déjà liquidé 4 paquets. Faisons le calcul : Bénéfice est égal à recette moins prix d'achat !

Vaugelas, Molière souffrez dans votre repos !

" Sénat, le people ne t'en veut pas". Quelque chose nous dit que le message n'est pas celui-là. « Séna » tantôt « Sénat » (remarquez avec "T" et sans "T"). Sénat ou Cénat ? Avec "S" ou avec "C" ? Mais quelle est l'orthographe de ce mot, enfin ? En tout cas, ce mot a une certaine célébrité depuis un certain temps. Cela s'est plus senti à la marche-meeting. Il s'écrit S. E N. A. T.

Sams'K Le Jah et Smokey, artiste-musiciens, refusent de marcher pour l'opposition

Les initiateurs du mouvement "Le Balai citoyen", Sams'K Le Jah et Smokey tous deux artistes- musiciens étaient de la marche du 28 juillet 2013. Ils ont été très ovationnés par la foule, en majeure partie des jeunes qui, certainement, se reconnaissent en ces artistes. Ces derniers ont prononcé un mot : "Il faut que l'opposition sache que ce n'est pas pour elle que nous sommes là. Si un jour elle prend le pouvoir et tombe dans les mêmes travers, nous lui réservons le même traitement". Voilà qui est clair.
Aussi, ils ont lancé une pique aux députés : " on va bloquer un jour l'Assemblée nationale et demander aux députés de chanter l'hymne national, il y en a qui ne pourront pas le faire".

Tout le monde est étudiant, fonctionnaire, femme et chômeur à la fois

Pour haranguer la foule, Sams'k Le Jah criait : " Est-ce que les étudiants sont là ?" L'ensemble de la foule a répondu. Nous nous sommes dit qu'il y a vraiment beaucoup d'étudiants. Quand il a repris, mais en disant : " Est-ce que les femmes sont là ?". Toute la foule a répondu. Là, nous avons compris qu'il y a problème. C'est tout le monde qui est à la fois étudiants et femmes. Pas vrai. Ils ont également répondu en choeur quand il a repris sa question pour les chômeurs et pour les travailleurs.

La sécurité du CFOP

Une mention spéciale à la sécurité du chef de file de l'opposition politique qui a mis à la disposition des journalistes des gilets qui se sont avérés plus efficaces que les badges de la marche du 29 juin 2013. Aussi, ils se sont déployés et ont assuré comme on peut le dire couramment. Mais ce qui a été notable, à ce niveau, c'est que dans le cordon sécuritaire, il y avait une dame. Nous l'avons observée et elle a tenu sur tout le parcours. Le CFOP a « genré », mais la dame en question est à féliciter.

Boureima DEMBELE et Françoise DEMBELE

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