C'est là où il fallait commencer: trouver non seulement des Hommes capables de parler au nom du CDP mais aussi de reprendre les commandes. Car, quoi qu'on dise, Juliette n'a pas soutenu le projet de modification constitutionnelle comme certains de ses camarades. A peine l'a-t-on aperçue lors d'un meeting à Koudougou.
Ce fut d'ailleurs une surprise de ne l'avoir pas vue avec le trio des démissionnaires du 4 janvier 2014. Car, elle, elle croyait qu'il était encore possible de souder les morceaux du grand CDP, au moment où Blaise Compaoré leur avait confié la mission de réfléchir sur des reformes au sein du parti. Mais Roch, Salif et Simon avaient pris des tickets de train pour la prochaine gare. Restée ''seule'', elle est demeurée aphone jusqu'à cette récente sortie.
En effet, que ce soit dans les derniers instants du pouvoir de Blaise ou après l'insurrection, Juliette a gardé ses pensées pour elle seule. D'ailleurs, si tel était qu'on la comptait comme un soutien actif à la modification, elle aurait également subi la furie des insurgés. Mais non. Ça veut dire que toute militante (elle ne tenait plus un grand rôle dans le parti) de première heure du CDP, membre fondatrice de celui-ci avec son UDS, elle a gardé une distance avec les prises de positions à l'emporte-pièce de certains de ses camarades politiques. Au moment de l'insurrection, Juliette était d'ailleurs rentrée de son poste d'ambassadeure au Canada depuis un long temps et attendait qu'on lui confie une mission.
Femme engagée et de conviction, les mâles l'ont malheureusement ''combattue'' au niveau du CDP. Phallocratie moaga aidant? Elle est connue également pour ses prises de positions indépendantes et son franc-parler. Magistrate, elle a été ministre, présidente du Conseil économique et social et ambassadeur au Canada une décennie durant et ayant contribué de ce fait à booster et à consolider les relations de coopération entre les deux pays. Le boom minier burkinabè a commencé sous son mandat, avec les sociétés canadiennes.
Ce sont les personnes de ce profil, à notre avis, qui peuvent parler de façon crédible au nom du CDP. Malheureusement, Juliette Bonkoungou a aussi embouché la trompète de l'exclusion, alors qu'il ne leur est pas interdit de prendre part aux différents scrutins et à la réconciliation nationale. Dans une certaine mesure, ceux-mêmes qui se sentent morveux devraient l'accepter, certains devant se mettre à la touche, le temps de l'apaisement des cœurs. Elle est mieux placée pour savoir ce que veut dire réconciliation, car, étant du pouvoir, elle en a subi. Faisant partie de pouvoir également, ils ont refusé la vraie réconciliation demandée par les nombreuses familles endeuillées, celles qui ont perdu des êtres chers par la méchanceté gratuite d'hommes qui se croyaient le nombril du Burkina; des familles qui demandent seulement qu'on leur dise la vérité. Des Burkinabè ont été tués et enterrés on ne sait où et on a arraché le pardon des mains de leurs ayants-droits lors de la journée nationale du pardon mascarade le 30 mars 2001. Avec des espèces sonnantes et trébuchantes, on a acheté le mutisme de certains et on a ainsi divisé des familles en plus.
Juliette Bonkoungou fait fausse route car c'est le moment d'arracher le pouvoir du pagne des mains des hommes qui ont conduit le pays presqu'au bord du précipice. Ou alors attend-elle le congrès pour reprendre le poil de la bête?
Les Echos du Faso