Ce n'était pas à proprement parler l'objectif de la conférence de presse, mais actualité politique oblige, les orateurs du jour ont dû s'échiner à démontrer que ce Front républicain n'est pas une réaction à la montée en puissance de l'opposition, renforcée par l'arrivée d'anciens caciques du parti au pouvoir, et qui bat le pavé pour rejeter la mise en place du sénat et la modification de l'article 37 de la Constitution burkinabè. Pas plus qu'il n'ambitionne de permettre la mise en place d'une seconde chambre et encore moins de préparer le chemin à une candidature de Blaise Compaoré à la présidentielle de 2015.
Me Hermann Yaméogo, le patron de l'UNND, semble même agacé quand on évoque la question. «Le Front républicain n'a pas été créé en réponse à quelque chose. Nous n'avons pas peur. Qui a peur de qui? Chacun a ses opinions qu'il défend», assène t-il. A l'en croire, c'est une vielle initiative qui refait surface. «La question du Front républicain ne date pas d'aujourd'hui, affirme t-il. A l'époque même du Front populaire, elle a été esquissée. Et si on a parlé d'ouverture fermée bien avant la IVe république, c'était dans l'esprit de ce Front».
Eviter au Burkina Faso de compromettre sa stabilité
Selon ses concepteurs en effet, le Front républicain a été mis sur pied pour éviter au Burkina Faso de «compromettre sa stabilité, son avenir», pour promouvoir des valeurs républicaines et donner suite aux réformes consensuelles. Dans la panoplie des actions qu'il entend mener, figurent en bonne place la mise en place et l'animation de concertations sur des questions essentielles de la nation, l'encouragement au dialogue social permanent sur les grands sujets de la nation, la promotion de la justice, de l'équité sociale, de la liberté et de la citoyenneté, etc.
Mais la République est-elle si menacée au point qu'il faille un Front républicain pour la défendre? «Quand les gens sont dans la rue pour réclamer ceci ou cela, pensez-vous que ce soit un signe de quiétude ou estimez-vous que c'est une menace pour la paix et la cohésion sociale?», répond, du tac au tac, Me Abel Toussaint Coulibaly, président de l'Union pour la république (UPR).
Et de préciser sa pensée: si les manifestations dans la rue ne menacent pas la République, c'est à dire les institutions, elles mettent en revanche en péril la paix sociale. «C'est pourquoi, il faut que les fils et filles de ce pays se parlent, au lieu de se regarder en chiens de faïence. Pensons plutôt à ce qui nous unis au Burkina Faso et non aux intérêts égoïstes», ajoute t-il, se disant convaincu que le Front républicain va rapprocher les Burkinabè.
Marge de manœuvre
Assimi Kouanda du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), lui, retient surtout que c'est la volonté de placer l'intérêt de la collectivité au-dessus de l'intérêt égoïste qui unit ces quarante partis politiques de différentes obédiences. A l'intérieur, chaque parti conserve sa marge de manœuvre, assurent Assimi Kouanda, Maxime Kaboré du PIT, Diemdioda Dicko de la CFD, Alain Zoubga du PSR/L'Autre Burkina, Hermann Yaméogo et Ram Ouédraogo du REDB.
Une quarantaine de partis y adhèrent, mais d'autres pourraient les rejoindre, à en croire les leaders, qui appellent la classe politique à se mettre dans «une dynamique de concertation, de rapprochement, au lieu de s'éloigner les uns des autres chaque jour davantage.» Et pour cela, estime Assimi Kouanda, pas besoin d'une étiquette majorité ou opposition: «il suffit d'aimer son pays».