Burkina/ Dialogue pouvoir-opposition : Les vraies raisons d'un désaccord persistant

| 17.03.2014
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Burkina/ Dialogue pouvoir-opposition : Les vraies raisons d'un désaccord persistant
© DR / Autre Presse
Burkina/ Dialogue pouvoir-opposition : Les vraies raisons d'un désaccord persistant
Après le premier face à face du 10 février dernier entre le collectif de l'opposition et le Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP), la formation politique du président Blaise Compaoré, le second à peine entamé, a été interrompu le lundi 11 mars. L'exigence par l'opposition d'un mandat formel, autorisant les représentants du chef de l'Etat à discuter en son nom, constitue le principal point d'achoppement de ces discussions. Le parti du président Compaoré a opposé une fin de non-recevoir à la demande de l'opposition, au motif que le chef de l'Etat est au-dessus des partis politiques. Par ailleurs, les représentants du CDP à ce dialogue estiment que leur parti étant majoritaire à la représentation nationale, n'a guère besoin d'un mandat pour discuter avec qui que ce soit.

Pourquoi l'opposition s'arc-boute à la question du mandat

Dans ce dialogue du ''chat et de la souris'', l'opposition reste évidemment très prudente, car elle est persuadée des velléités du chef de l'Etat de briguer un autre mandat, contrairement aux dispositions de la Constitution. Pour l'opposition, la volonté de Blaise Compaoré de modifier par référendum l'article 37 de la loi fondamentale, transparaît clairement à travers son projet de mise en place d'un sénat. Zéphirin Diabré, le leader de l'opposition et ses collègues espèrent durant ces discussions, l'inviolabilité de cet article qui fixe le mandat présidentiel à deux au plus. Blaise Compaoré, 63 ans, arrivé au pouvoir en 1987 par un coup d'Etat, a déjà effectué deux septennats (1991 et 1998), avant de s'offrir deux quinquennats, (2005 et 2010). Or, il est presque au terme des deux quinquennats, ce qui lui fera bientôt un total de 27 années de règne. Toute la stratégie de l'opposition a été bâtie sur le maintien en l'état de l'article 37 sur lequel elle ne compte pas transiger.

En exigeant un mandat aux partisans de Blaise Compaoré, l'opposition veut que les décisions qui seront arrêtées à l'issue de ces discussions, aient autorité de la chose jugée. C'est ce «piège» que la délégation présidentielle veut absolument éviter. Assimi Kouanda, le secrétaire exécutif national du CDP et ses amis ont aussi leur plan secret: faire passer toute discussion sur l'article 37 devant le parlement où le CDP jouit d'une majorité écrasante, ou alors s'en référer au peuple par référendum. Là aussi, les chances de l'opposition de réaliser son rêve sont réduites. La médiation dirigée par l'ancien président Jean-Baptiste Ouédraogo a dénoncé cette intransigeance de part et d'autre, et attend un hypothétique consensus, pour reprendre le dialogue.

Or, vu la détermination des deux parties à rester sur leurs positions, aucune entente n'est possible. Blaise Compaoré lui, continuera de brandir l'invitation au dialogue, une façon à lui de tenir en laisse l'opposition, jusqu'à ce que son mandat arrive à son terme. Il peut alors évoquer à juste titre en 2015, le risque d'un vide constitutionnel porteur de tous les dangers pour le pays. En sa qualité de garant des institutions du pays, il peut donc décider de mettre fin à la situation exceptionnelle par des mesures exceptionnelles. Il peut alors convoquer le corps électoral pour un référendum qui pourrait lui permettre de faire sauter le verrou du fameux article 37. Les adversaires du régime qui n'ont aucun intérêt à en arriver là, devraient prouver leur force par leur capacité de mobilisation de la rue. Mais avant, il leur faut un chef charismatique, ce qu'ils ne semblent pas avoir pour le moment, ni dans l'opposition traditionnelle incarnée par Zéphirin Diabré, Bénéwendé Sankara, Ram Ouédraogo et autres, encore moins dans le groupe des ''ouvriers de la dernière heure'' de cette opposition que sont Salif Diallo, Roch Marc Christian Kaboré, Simon Compaoré, des ex-barons du CDP.

Aujourd'hui en rupture de ban avec leur parti, ils ont créé le Mouvement des Peuples pour le Progrès (MPP). Le premier test de mobilisation de ce collectif de l'opposition le 18 janvier dernier, n'a pas été un grand succès: 100.000 personnes, à en croire les organisateurs, 10.000 selon la police. En presque trois décennies de pouvoir, Blaise Compaoré a su maintenir une certaine stabilité politique dans son pays. Au plan économique par contre, malgré une relative avancée, le Burkina Faso n'a pour autant pas bouger de la queue du peloton des pays les plus pauvres de la planète: 183e rang sur 186. Fort de ce bilan, qui n'est pas forcément mauvais, le président burkinabé va-t-il choisir de laisser les commandes du pays à un autre, capable de faire peut-être mieux? On le saura dans les jours à venir.

 

Source : L'inter

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