Modification de l’article 37: « L’heure n’est plus aux discours, mais à la résistance »

| 22.10.2014
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Modification de l’article 37: « L’heure n’est plus aux discours, mais à la résistance »
© DR / Autre Presse
Modification de l’article 37: « L’heure n’est plus aux discours, mais à la résistance »
La réaction de la société civile n'a pas tardé après l'adoption d'un projet de loi demandant à l'Assemblée nationale de convoquer un référendum sur la question de l'article 37 de la Constitution, qui limite à deux quinquennats consécutifs le nombre de mandats présidentiels. Dans l'après-midi de ce 21 octobre 2014, dix*d'entre elles ont annoncé, à la faveur d'une conférence de presse à Ouagadougou, qu'elles vont faire front commun pour empêcher la tenue de cette consultation populaire.

« La ligne rouge a été franchie », constate l'avocat Guy Hervé Kam, porte-parole du Balai citoyen. « Après avoir tergiversé, demandé qu'on le laisse se concentrer sur son mandat présidentiel en cours, après avoir divisé notre peuple pour mieux régner et se présenter en médiateur dans son propre pays, après avoir fait semblant de dialoguer avec l'opposition, notre Président a fini par tomber le masque », fait-il remarquer. Des louvoiements qui portent un coup à la crédibilité du chef de l'Etat, estime le Pr Augustin Loada, du Front de résistance citoyenne, qui assure que « personne, dans ce pays, ne peut prendre encore au sérieux la parole présidentielle ».

Pour ces dix associations de la société civile, nombreux sont les signes qui montraient que le pouvoir se préparait depuis belle lurette au référendum, malgré la main qu'il semblait tendre à l'opposition. La preuve, affirment-elles, il y a quelques jours, le gouvernement a adopté un projet de loi prévoyant le droit de dessaisir la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) en cas de difficultés, pour faire organiser les élections par le ministère en charge de l'Administration du territoire.

Coup d'Etat constitutionnel

Ce que ces associations disent surtout ne pas comprendre, c'est que, estiment-elles, Blaise Compaoré a balayé du revers de la main de nombreuses propositions qui lui ont été faites pour lui assurer une sortie honorable. Et d'énumérer le « régime parlementaire proposé par Salif Diallo en 2008 qui permettrait au Président Compaoré de renoncer à l'exercice du pouvoir exécutif tout en bénéficiant de la protection que lui assurerait sa fonction de Chef d'Etat, (...) l'amnistie, voire de l'impunité qui lui a été octroyée en 2012 par la Constitution, (...) le dialogue sincère qui lui aurait permis de dire à notre peuple ses conditions ou même ses exigences pour qu'il quitte le pouvoir en 2015 ».

Face à ce qu'elles qualifient de « Coup d'Etat constitutionnel en préparation », ces organisations de la société préviennent que « l'heure n'est plus aux discours, mais à la résistance ». Tout en menaçant d'appeler à la désobéissance civile, elles promettent de « résister » et de s'opposer à de « telles velléités par des actions pacifiques ». Faut-il comprendre par là que société civile va continuer les marches les week-end alors que celles-ci ne semblent pas impressionner le pouvoir?, interroge un journaliste. « Nous n'avons ni kalachnikovs, ni chars. Mais nous avons nos mains, nos pieds, le sens du vrai, du juste et de l'intérêt général », tranche le Pr Loada. « Que 30 ministres se réunissent pour plancher sur le cas d'un seul individu en dit long sur la nature du pouvoir (...) Nous allons gagner tôt ou tard », assène-t-il. Pour cela, un « terrain d'entente » avec l'opposition n'est pas exclu, même si « l'agenda n'est pas le même ».

Grève du zèle

Dans les jours à venir, des mots d'ordre précis sont promis. Mais en attendant, ces associations appellent d'ores et déjà tous les citoyens à dire «non» à tout référendum sur la question de l'article 37 de la Constitution. Pour cela, elles proposent toute une panoplie d'actions. « Partout où ils se trouvent, les Burkinabè qui ont soif de changement doivent refuser de participer à des évènements, à des célébrations officielles, boycotter les structures qui soutiennent ce pouvoir à la légitimité finissante », conseille Me Guy Hervé Kam.

Les fonctionnaires et agents publics de l'Etat, doivent résister par la grève du zèle. « Si votre ministre vous demande de faire un travail, à partir d'aujourd'hui, prenez tout votre temps ! Mettez du zèle, du perfectionnisme dans l'accomplissement de vos tâches jusqu'à ce que ce pouvoir renonce à son rêve insensé », ajoute l'avocat qui s'exprimait au non des associations.

Les « députés patriotes » et les forces de défense et de sécurité ont aussi leur partition à jouer. Si les élus sont priés de « rester chez eux » ou « d'aller à la rencontre de leurs électeurs » le jour où ils seront convoqués pour voter la loi sur le référendum, les FDS, eux, doivent « faire preuve de discernement » et se rappeler que « les Burkinabè qu'on peut vous demander de réprimer sont vos frères, sœurs, enfants, parents et amis et pas vos ennemis. »

Une journée d'interpellation des députés sera organisée devant la représentation nationale dès que le projet de loi portant révision de la Constitution y atterrira, promettent les associations. « Si le référendum se tient, c'est que nous aurons échoué », conclut Me Kam.

*Collectif Anti Référendum (CAR) ; Réseau d'Action pour la Démocratie (RAD) ; Balai Citoyen ; M21 ; FOCAL ; Coordination de la Société civile pour l'alternance (COSCA) ; Mouvement ÇA SUFFIT ; AEP ; Association Prendre son Envol ; Front de Résistance Citoyenne.

DTS

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