Masato Futaishi, ambassadeur du Japon au Burkina

| 24.11.2015
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Masato Futaishi - Ambassadeur du Japon au Burkina Faso
© DR / Autre Presse
Masato Futaishi - Ambassadeur du Japon au Burkina Faso
Il est le deuxième ambassadeur résident du Japon au Burkina Faso et se distingue, comme les ressortissants du « Pays du soleil levant », par son humilité, sa courtoisie et sa disponibilité. Masato FUTAISHI, 64 ans, a occupé de hautes fonctions, tant dans son pays qu’à l’extérieur, avant son arrivée officielle au « Pays des hommes intègres » en février 2013. Entre son pays le Japon et le Burkina Faso, les relations sont au beau fixe depuis des décennies. Dans l’entretien qui suit, il revient longuement sur les divers axes de coopération et se prononce sur les élections à venir au Burkina Faso.


Sidwaya (S.) : Vous êtes ambassadeur du Japon depuis deux ans maintenant au Burkina Faso. Quel est votre parcours de dipomate?

Masato FUTAISHI (M.F.) : Avant tout propos, je voudrais remercier le quotidien SIDWAYA pour l’opportunité qu’il m’offre de présenter à ses lecteurs les activités de coopération du Japon au Burkina Faso.

Avant ma nomination en tant qu’Ambassadeur du Japon au Burkina, j’ai exercé des fonctions au Maroc, au Cameroun et au Sénégal. Le Burkina Faso est donc le 4ème pays africain où je suis heureux de continuer ma carrière diplomatique, depuis le 25 février 2013. Pendant la période de ma mission, en sollicitant votre précieux soutien, je voudrais travailler à renforcer la compréhension mutuelle entre nos deux peuples et à développer davantage les bonnes relations qui existent, depuis très longtemps, entre nos deux pays.

S. : Existe-t-il des points communs entre le Japon votre pays et le Burkina Faso?

M.F. : Juste après mon arrivée au Burkina Faso, j’ai entendu dire que les Burkinabè sont les Japonais de l’Afrique. C’est-à-dire que nous avons beaucoup de choses en commun. Je voudrais d’abord souligner le fait que le Burkina Faso a des familles royales et que le Japon a la famille impériale. A travers leurs histoires, leurs traditions et leurs cultures, nous avons cultivé les mêmes valeurs morales, telles que l’esprit de respect à l’égard de la famille Royale et de la famille Impériale, le grand respect envers les ancêtres et les personnes âgées. De plus, grâce à ces traditions, nous partageons les mêmes principes moraux tels que l’honneur, la fidélité, l’humilité et le respect à l’égard des autres. Ensuite, les deux peuples sont travailleurs et disciplinés, car ne possédant pas de ressources naturelles, comme de ressources énergétiques. Ils sont obligés de valoriser leur seule richesse, les ressources humaines, pour développer leur pays. Les deux peuples subissent régulièrement les fléaux dus aux catastrophes naturelles. Au Japon, on peut citer les typhons, les tremblements de terre et les tsunamis. Au Burkina Faso, il s’agit des inondations et de la sècheresse.

Cette adversité de la nature a créé en nous l’esprit de solidarité. Je me rappelle du soutien du peuple burkinabè, suite au tremblement de terre suivi de tsunami, que le Japon a connu en mars 2011.

En somme, vous êtes les Japonais de l’Afrique et les Japonais sont les Burkinabè de l’Asie.

S. : Quel rôle joue le Japon dans le concert des nations?

M.F. : Etant conscient de l’interdépendance entre les nations de la communauté internationale, le Japon reconnaît que la stabilité et le progrès des pays en développement sont indispensables à la paix et la prospérité du monde entier. C’est une mission importante pour le Japon, en tant que pays pacifique, de jouer un rôle digne de sa position dans le monde pour maintenir la paix et assurer la prospérité du monde. C’est d’ailleurs dans cette optique que le gouvernement du Premier Ministre Shinzo Abe a décidé de la mise en œuvre d’une nouvelle politique intitulée, « la contribution proactive à la paix», dont l’objectif est de contribuer de manière plus proactive à la paix, à la stabilité et à la prospérité de la communauté internationale tout en assurant la propre sécurité du Japon.

S. : Le Burkina Faso et le Japon entretiennent des relations depuis des décennies. Quels sont les divers axes de la coopération entre les deux pays ?

M.F. : Le Japon et le Burkina Faso entretiennent de bonnes relations d’amitié et de coopération. Nous collaborons étroitement sur le plan international pour consolider la paix et la stabilité dans le monde, car nous partageons la même vision de paix et de solidarité.

Nous réalisons également ensemble des projets de coopération pour le développement économique et social du Burkina Faso.

L’indépendance du Burkina Faso en 1960 et sa reconnaissance immédiate par le Japon ont marqué le début des relations diplomatiques entre nos deux pays. Et depuis lors, le Japon n’a cessé d’accompagner le développement du Burkina Faso, en réalisant de nombreux projets de coopération. Dans cette optique, nous avons trois axes de coopération pour répondre aux besoins du peuple burkinabè.

Nous avons d’abord la coopération économique et technique avec les autorités burkinabè. Il s’agit là d’une coopération bilatérale. Nous avons ensuite la coopération économique avec les ONG. Et enfin la coopération multilatérale, c’est-à-dire une coopération entre le Japon, le Burkina Faso et les organisations internationales.

S. : Concrètement, quel est le contenu de ces trois grands axes de coopération?

M.F. : Pour ce qui est du premier axe, la coopération bilatérale avec les autorités burkinabè, notre coopération économique s’est renforcée davantage depuis l’ouverture de notre Ambassade à Ouagadougou, le 2 janvier 2009, par la signature de nombreux échanges de notes concernant l’octroi de dons pour la réalisation de projets dans divers domaines.

Il s’agit tout d’abord de projets dans les secteurs liés à la croissance économique et sociale tels que l’agriculture, l’éducation, l’intégration économique sous-régionale. Et ensuite les secteurs concernant la sécurité humaine comme l’eau, la santé, l’environnement, la sécurité alimentaire.

Par ailleurs, les fonds de contrepartie générés notamment par l’aide alimentaire ont permis de financer aussi l’exécution de nombreux projets. Je peux citer, entre autres, le renforcement des capacités logistiques de la CENI, la lutte contre une éventuelle épidémie de la maladie à virus Ebola, la construction de l’échangeur de l’Ouest et du Pavillon « Soleil Levant » du SIAO.

Quant à notre coopération technique, elle a connu durant la même période, une évolution considérable, par la mise en œuvre du Projet d’appui aux comités de gestion des écoles (PACOGES) et du Projet d’appui à la formation continue des enseignants en matière de sciences et de mathématiques à l’école primaire (SMASE). Cette coopération s’est aussi concrétisée et renforcée par l’envoi des experts et des jeunes volontaires japonais au Burkina Faso. Nous avons également accueilli de nombreux stagiaires burkinabè au Japon dans divers domaines.

En plus de la coopération économique et technique, il faut ajouter celle culturelle et sportive. Ce volet culturel et sportif est également essentiel dans le cadre des relations bilatérales. En effet, nous considérons que connaitre la culture de l’autre contribue à la compréhension mutuelle et à la tolérance entre les peuples. C’est dans cet esprit que nous avons développé les contacts humains et les échanges culturels. Aussi, avons-nous invité l’artiste musicien Bil Aka Kora au Japon, à l’occasion de la fête de l’Afrique qui a eu lieu en mai 2013. Nous avons également organisé en mai dernier une exposition sur l’histoire des arts martiaux du Japon.

En outre, dans le cadre du programme du Service des volontaires japonais pour la coopération à l’Etranger (JOCV), nous renforçons notre coopération sur le plan sportif par l’encadrement de la jeunesse, à travers le judo, le karaté-do et le base-ball. Je voudrais aussi souligner que 5 étudiants burkinabè, boursiers du gouvernement du Japon, continuent actuellement leur formation dans des universités japonaises.

Venons-en ensuite au deuxième axe, c’est-à-dire la coopération économique et culturelle avec les ONG.

Dans le cadre de notre coopération financière non-remboursable intitulée, «Dons aux microprojets contribuant à la sécurité humaine», nous avons financé des projets élaborés par des associations en faveur de la population de base. Des projets de construction d’écoles primaires, de Centres de santé et de promotion sociale (CSPS), de forages et de Centres de formation pour les jeunes filles déscolarisées et les sourds-muets ont été aussi réalisés dans plusieurs provinces du Burkina Faso.

A travers cette coopération financière non-remboursable, nous avons contribué, de l’ouverture de notre Ambassade à ce jour, à la construction de 23 forages, de 33 salles de classe et de 3 CSPS.

Par ailleurs, en collaboration avec les fédérations burkinabè de judo et de karaté-do, nous organisons régulièrement une compétition dénommée, « La coupe de l’Ambassadeur du Japon », en vue de consolider notre coopération culturelle et sportive avec les ONG.

En ce qui concerne enfin le troisième axe, la coopération multilatérale, le Japon a contribué aux efforts déployés par la communauté internationale pour aider les populations défavorisées au Burkina Faso, au cours de ces trois dernières années. Dans ce cadre, le Japon a octroyé des dons respectivement, au HCR pour exprimer sa solidarité envers les réfugiés maliens dans la détresse, à l’UNICEF en vue de contribuer à l’éradication de la malnutrition dans la zone du Sahel et au PAM dans le but de renforcer la résilience des ménages vulnérables à l’insécurité alimentaire.

A travers le PNUD, le gouvernement du Japon a financé le «Projet d’appui à la consolidation de l’état de droit et à l’accès des pauvres à la justice au Burkina Faso». Le Japon considère que l’Etat de droit et l’accès à la justice des personnes vulnérables constituent des piliers essentiels de la gouvernance démocratique et contribuent à la prévention des conflits et à la consolidation de la paix et la stabilité. En apportant son appui financier à l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), le Japon contribue aussi à la lutte contre la criminalité transnationale organisée, y compris le terrorisme et le trafic illicite des armes à feu, et à la consolidation de la paix et de la stabilité dans la sous-région. De plus, le Japon a accordé un don pour appuyer l’initiative de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), visant à renforcer la sécurité des frontières dans le Sahel. Comme vous le savez, le Sahel représente actuellement une des régions la plus sensible et la plus instable d’Afrique.

Face à de nombreuses menaces de sécurité telles que le terrorisme, les trafics d’armes, de stupéfiants et les autres problèmes transfrontaliers, les Etats du Sahel sont faiblement équipés pour gérer efficacement leurs frontières et répondre à ces menaces.

Sur les plans, bilatéral et multilatéral, en termes de montant, notre coopération financière non-remboursable se chiffre, de 2009 à la fin de l’année fiscale 2013, à environ 85 milliards 986 millions de F CFA, tandis que la coopération technique est évaluée à peu près à 42 milliards 456 millions de F CFA. Il faut souligner que durant la même période nous avons envoyé 269 experts japonais au Burkina Faso et avons reçu 469 stagiaires burkinabè au Japon dans divers domaines.

S. : Quels sont les points forts de cette coopération?

M.F. : La globalité de notre coopération est forte. Car, notre champ d’intervention couvre, non seulement les domaines concernant les besoins fondamentaux des populations, le développement des ressources humaines et des infrastructures socio-économiques, mais s’étend aussi à la paix et à la stabilité qui sont les conditions fondamentales préalables au développement socio-économique en Afrique. Autrement dit, la paix, la stabilité et le développement sont inséparables. Sans la paix et la stabilité, les communautés ne peuvent pas préparer leur avenir.

En outre, pour la mise en œuvre efficace de sa coopération, le Japon travaille avec l’ensemble de ses partenaires que sont le gouvernement burkinabè, les associations et les organisations internationales. Ainsi, d’une part les projets de coopération pour la promotion de la croissance économique et sociale et la sécurité humaine sont exécutés avec tous les partenaires et d’autre part, les activités de coopération liées à la bonne gouvernance, la démocratie, la paix et la stabilité et la lutte contre la criminalité transnationale, auxquelles le Japon accorde une grande importance, sont mises en œuvre à travers les organisations internationales.

Cette orientation de nos actions tient compte du fait que nos domaines d’intervention sont interdépendants et permettent de réaliser une coopération globale et équilibrée en vue de construire une société pacifique et prospère assurant à tous une vie digne.

S. : La promotion d’une croissance économique durable à travers le développement de l’agriculture, le rehaussement de la qualité de l’éducation et la promotion de l’intégration économique sous-régionale sont les secteurs prioritaires de votre coopération avec le Burkina. Pourquoi ces choix ?

M.F. : Actuellement, le monde lutte pour la construction d’une société où la

liberté, les droits de l’Homme, la démocratie et d’autres valeurs seront garantis dans la paix et la prospérité. Mais sans développement, il n’y aura ni paix ni stabilité. De ce point de vue, le Japon estime qu’il est important de soutenir les efforts des pays en développement, en vue de leur décollage économique.

Par conséquent, le Japon exécute sa coopération économique pour une croissance économique durable, à travers le développement de l’agriculture, le rehaussement de la qualité de l’éducation et la promotion de l’intégration économique sous-régionale. C’est à partir de cette philosophie de base que le Japon réalise des projets de coopération au Burkina Faso dans les trois secteurs clés que je viens de citer, en tenant compte de la SCADD.

En effet, les axes stratégiques indiqués dans la SCADD et « les orientations de l’aide par pays » établies par le Japon confirment notre vision commune en matière de promotion d’une croissance socio-économique durable.

Au sujet des raisons du choix de nos secteurs prioritaires, je voudrais d’abord commencer par l’agriculture. Le secteur agricole représente 80% de la population active burkinabè et sa part dans le Produit Intérieur Brut (PIB) atteint 30%.

L’agriculture joue donc un rôle moteur de la croissance économique durable et inclusive. Mais force est de constater que le secteur agricole est vulnérable aux changements climatiques et les prix des produits agricoles comme le coton sont fluctuants selon la situation du marché international. Dans ces conditions, le Japon a jugé nécessaire d’accompagner les autorités burkinabè dans leurs efforts de promotion de l’économie agricole.

Pour ce qui est de l’éducation, son choix est dû au fait que le Japon considère que la première richesse d’un pays, ce sont des hommes bien formés. La valorisation du capital humain est un des atouts majeurs pour le développement durable d’un pays.

Dans ce sens, l’éducation occupe une place primordiale dans la formation du capital humain. L’éducation est donc la clé pour réduire la pauvreté et les inégalités et pour construire les fondements solides du développement du Burkina Faso. C’est la raison pour laquelle le Japon accorde de l’importance à la coopération en matière d’éducation.

Quant à l’intégration économique sous-régionale, nous savons que le Burkina Faso est un carrefour qui relie les pays du Golfe de Guinée et les nations enclavées du Sahel. Il joue un rôle important en facilitant l’intégration économique dans l’espace UEMOA, dont d’ailleurs le siège se trouve à Ouagadougou.

Pour promouvoir le développement économique de la région, il est indispensable de créer un marché commun de cent millions d’habitants qui permet la libre circulation des personnes, des biens, des capitaux et des services, et d’attirer les investissements directs étrangers. De plus, tenant compte de l’enclavement du Burkina Faso, l’intégration économique sous-régionale constitue un volet important de la croissance et le Japon voudrait contribuer au désenclavement de ce pays à travers l’UEMOA.

S. : Quelles appréciations faites-vous des résultats engrangés sur le terrain dans ces trois grands secteurs ?

M.F. : Nous sommes satisfaits d’avoir pu exécuter des projets dans ces trois secteurs en partenariat avec la partie burkinabè.

Dans le secteur agricole, nous avons réalisé des projets visant à garantir la sécurité alimentaire et à améliorer les revenus des acteurs des filières agricoles. Il s’agit notamment de l’aide alimentaire que nous octroyons depuis les années 1980. Une quantité de 6.990 tonnes métriques de riz a été remise au gouvernement le 20 juillet dernier, au titre de l’année fiscale 2013.

Il faut noter aussi l’assistance pour l’amélioration de la production de semences, à la riziculture, de même que l’appui à l’élaboration d’un schéma directeur pour la promotion d’une agriculture orientée vers le marché au Burkina Faso. En outre, il y a le renforcement de la production de sésame. Nous tenons à cette filière car les japonais consomment beaucoup de sésames.

En ce qui concerne le secteur de l’éducation, nos projets de coopération sont multiples et multiformes. Je pourrais citer entre autres :

  • la construction des écoles primaires dont la phase V est en cours d’exécution. A la fin de cette phase, ce sont 1.040 salles de classes qui auront été construites depuis 1995 ;
  • la construction de l’ENEP de Dori est achevée en 2011 ;
  • la construction de l’ENEP de Kaya va commencer très bientôt ;
  • la construction d’infrastructures éducatives en appui au post-primaire (50 CEG dans 7 provinces) du Burkina Faso dont l’échange de notes a eu lieu le 25 août 2015.
  • l’appui technique aux comités de gestion d’écoles (PACOGES).

Nous avons grand espoir que les projets réalisés impacteront positivement les conditions de vie des populations burkinabè.

S. : Y-a-t-il des faiblesses à relever à quelques endroits ?

M.F. : La sécurité est un facteur essentiel pour l’exécution de nos activités de coopération. Il s’agit surtout de la sécurité des personnels de la partie japonaise, chargés de la mise en œuvre des projets de coopération. C’est-à-dire, les agents japonais chargés de projet, les consultants japonais et les entreprises de construction qui effectuent des missions sur les sites de projet.

La collaboration active de la partie burkinabè en matière de sécurité lors des travaux de construction dans certaines zones est essentielle. En effet, il y a des régions où quelques fois la situation sécuritaire engendre une incidence sur l’évolution des travaux. Dans ce contexte, nous estimons que le Ministère bénéficiaire du projet devrait collaborer étroitement avec les autorités concernées pour évaluer la sécurité de la zone du projet et prendre en charge la sécurité de la partie japonaise pendant l’exécution du projet, en assurant par exemple une escorte, si nécessaire.

Je voudrais aussi indiquer que quelquefois la contribution financière de la partie burkinabè, dans le cadre de la mise en œuvre des projets de coopération technique, n’est pas assurée en temps opportun. Cette situation constitue parfois un handicap dans l’exécution de projets de coopération technique.

S. : Il y a 15 ans, débutait le déploiement de volontaires japonais au Burkina Faso. Quel est leur apport au développement des localités où ils sont déployés ?

M.F. : Le Programme du Service des Volontaires Japonais pour la Coopération à l’Etranger (JOCV) représente l’idée fondamentale de notre aide qui consiste à contribuer au développement socio-économique des pays amis, et œuvrer à la compréhension mutuelle internationale. L’envoi des volontaires japonais au Burkina Faso a commencé en 2000 et l’année 2015 marque donc le quinzième anniversaire de leur présence au « Pays des hommes intègres ». Je me félicite de constater qu’à ce jour 375 volontaires ont séjourné dans plusieurs localités de ce pays. A la date d’aujourd’hui, nous comptons 16 volontaires au Burkina Faso.

Durant leur séjour, ils procèdent au transfert de leurs techniques et connaissances, ainsi que de leur savoir-faire aux homologues et aux populations locales de leurs lieux d’affectation. Ils participent inlassablement aux efforts pour l’amélioration de la qualité de vie des populations et le développement durable du Burkina Faso avec les populations des localités où ils sont déployés.

S. : Dans quels secteurs ces volontaires sont-ils prioritairement déployés ?

M.F. : Ces volontaires interviennent dans quatre domaines principaux que sont l’agriculture, le développement communautaire axé sur la santé, l’eau et l’assainissement et l’environnement, l’éducation orientée sur le primaire et le préscolaire, et enfin l’encadrement de la jeunesse et la formation technique, à travers le judo, le karaté-do, le base-ball et l’audio-visuel.

S. : Quelles sont les difficultés auxquelles ils sont confrontés ?

M.F. : Les volontaires sont généralement confrontés à des difficultés causées par les différences traditionnelles et culturelles. Néanmoins, ils arrivent à surmonter le gap lié aux conditions de vie et aux coutumes de leurs localités d’affectation, car ils ont une force d’adaptation extraordinaire. Je discute avec eux de temps en temps ; ce n’est pas facile, parce que certains travaillent dans des zones très reculées, mais ils arrivent à surmonter les écueils. Je trouve admirable l’esprit des Volontaires à surmonter les défis.

Je voudrais saisir l’occasion pour adresser mes sincères remerciements aux populations locales pour leur bienveillance à l’égard des volontaires. Car sans leur appui, ils ne pourraient pas accomplir efficacement leurs missions. Nous sommes très contents de l’accueil chaleureux toujours réservé aux volontaires.

S. : La TICAD V a promis débloquer 32 milliards de dollars d’aide sur cinq ans au continent africain. Où en sommes-nous avec ces promesses, deux ans après ?

M.F. : Lors de la TICAD V qui s’est tenue en juin 2013, le Japon a effectivement annoncé un programme d’investissements pour le continent de 32 milliards de dollars sur 5 ans, dont 14 milliards de dollars d’aide publique. Deux ans après, nous pouvons affirmer que les principaux programmes d’assistance japonaise avancent, conformément aux objectifs à atteindre et aux mesures spécifiques mentionnés dans le Plan d’action de Yokohama 2013-2017 et selon les spécificités de chaque pays d’Afrique.

S. : Quelles sont les répercussions de ces mesures sur le Burkina Faso ?

M.F. : Les projets réalisés ou en cours de réalisation par le Japon au Burkina Faso s’inscrivent parfaitement dans les actions à mettre en œuvre que le Plan d’action de Yokohama énonce. A titre d’exemples, je voudrais citer quelques projets concrets qui reflètent ces mesures.

Concernant l’autonomisation des agriculteurs en tant que principaux acteurs économiques, le Projet d’appui à l’élaboration d’un schéma directeur pour la promotion d’une agriculture orientée vers le marché (PAPAOM) est en cours d’exécution.

De plus, le Japon est en train de mettre en œuvre le projet de renforcement de la production de sésame, un produit que les japonais aiment bien.

Au sujet de l’édification d’une société inclusive pour la croissance, les projets en cours d’exécution sont liés à l’éducation, à la santé et à l’approvisionnement en eau potable. Comme je l’ai souligné plus haut, le projet de construction des écoles primaires dont la phase V est en cours d’exécution permet d’augmenter la capacité d’accueil des enfants.

Le Projet SMASE, le PACOGES et le projet de construction de l’ENEP de Kaya sont également les projets principaux financés pour l’amélioration de la qualité de l’éducation. La construction de 38 CSPS est en cours de réalisation pour le renforcement des services de santé, axés sur la santé maternelle et infantile. Concernant l’accès à l’eau potable et aux conditions d’hygiène, la phase II du Projet d’Approvisionnement en Eau Potable dans les régions du Plateau Central et Centre-Sud est en cours d’achèvement. A la fin de cette phase, 1.067 forages auront été construits.

Dans le domaine du développement des infrastructures et des ressources humaines, le projet de Plan Directeur de l’Aménagement des réseaux logistiques pour l’Anneau de Croissance en Afrique de l’Ouest, est en cours de réalisation et dans le cadre de l’Initiative ABE « octroi de bourses aux jeunes africains pour étudier dans une université japonaise et effectuer un stage dans une entreprise japonaise », deux jeunes burkinabè étudient actuellement au Japon.

Permettez-moi de rappeler que la TICAD, initiée par le gouvernement japonais se tient tous les cinq ans au Japon. Actuellement, les organisateurs envisagent de la tenir tous les trois ans et la prochaine édition, c’est-à-dire la TICAD VI, aura lieu en Afrique en 2016. Aussi, je souhaite fortement la participation active du Burkina Faso à l’organisation de cette conférence importante.

S. : Vous avez eu à vous occuper de la presse internationale dans votre pays, quels jugements faites-vous du rôle de la presse burkinabè dans le cadre de vos activités ?

M.F. : Nous apprécions très positivement le rôle de la presse écrite car elle sert de pont entre notre Ambassade et la population. Sans la presse, aucune de nos actions de coopération ne serait visible par les burkinabè.

Permettez-moi d’adresser mes sincères remerciements à tous les organes de presse pour les efforts qu’ils déploient pour la couverture médiatique des activités de l’Ambassade à Ouagadougou et dans les provinces. Je souhaite que les excellentes relations de collaboration qui existent entre nous, se renforcent davantage.

Par ailleurs, je voudrais féliciter le journal SIDWAYA, qui est un organe d’Etat, pour le professionnalisme de ses journalistes et l’encourager à contribuer davantage à la promotion de la liberté d’information au Burkina Faso. La qualité de l’information et la diversité des sujets traités dans le journal SIDWAYA constituent des forces pour relever quotidiennement des défis et demeurer le « Journal de tous les Burkinabè ».

Je voudrais rappeler que c’est avec un esprit de solidarité que nous avons décidé de soutenir la Direction Générale des Editions SIDWAYA, pour l’acquisition de moyens logistiques et de matériels informatiques, à travers le fonds de contrepartie des dons japonais, afin qu’elle continue d’assurer dans les conditions appropriées sa noble mission d’information et de sensibilisation du peuple burkinabè.

S. : Comment avez-vous vécu l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre au Burkina ?

M.F. : Les 30 et 31 octobre 2014, j’ai été témoin des circonstances dans lesquelles les partis politiques, la société civile et les jeunes se sont soulevés courageusement contre la modification de l’article 37 de la Constitution et ont renversé l’ancien régime. Cet événement historique, je pense, reflète la soif du peuple burkinabè pour la démocratie et la bonne gouvernance. C’est également la victoire du peuple burkinabè contre la corruption, l’injustice, l’impunité et la pauvreté. Les jeunes du Burkina Faso ont joué un rôle majeur et ils ont été, en particulier, le fer de lance de cette insurrection populaire. En effet, sans la force des jeunes, il n’y aurait pas eu un changement. Je voudrais rendre un vibrant hommage aux jeunes du Burkina Faso pour leur courage, leurs actions déterminées et leur esprit de sacrifice. Le peuple burkinabè a donné certainement une leçon historique pour le renforcement de la démocratie en Afrique.

S. : Quels sont vos vœux pour les élections du 29 novembre à venir ?

M.F. : Au moment où le peuple burkinabè s’apprête à exprimer sa volonté à travers les urnes, nous souhaitons fortement que les élections à venir soient organisées de manière transparente, équitable, crédible et apaisée et que les résultats soient acceptés par tous les acteurs. Dans le cadre du processus électoral, le gouvernement du Japon a déjà décidé d’accompagner le gouvernement de la Transition dirigé par le Président Michel KAFANDO, en autorisant l’utilisation du fonds de contrepartie des dons japonais pour financer le renforcement des capacités logistiques de la CENI et en octroyant un don au GERDDES pour l’exécution du projet intitulé, « Projet de contribution pour les élections crédibles et apaisées en 2015 et 2016 au Burkina Faso». A travers ces appuis financiers, le Japon voudrait contribuer à bâtir un nouveau pays, « un Burkina Paalga », plein d’espoirs.

Interview réalisée par : Sié Simplice HIEN

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