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Mandat d'arrêt contre OBOUF : Le président Kafando met la charrue avant les bœufs

| 26.02.2015
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Mandat d'arrêt contre OBOUF : Le président Kafando met la charrue avant les bœufs
© DR / Autre Presse
Mandat d'arrêt contre OBOUF : Le président Kafando met la charrue avant les bœufs
Le président Michel Kafando vient à nouveau d'avouer son impuissance dans le règlement des affaires de crimes économiques et politiques sous la 4e République. Au cours de la rencontre avec les OSC mardi dernier, le président a en effet fait cette déclaration qui laisse pantois : "C'est moi qui avais dit effectivement que rien ne sera comme avant, mais au contact nous nous sommes rendus compte que tout était miné! ». Michel Kafando aurait été bien inspiré d'aller jusqu'au bout de ses aveux, en révélant au peuple ce qui bloque. Mais dans tous les cas, ce rétropédalage est révélateur de l'amateurisme du pouvoir de la transition.


A plusieurs reprises, le président et le premier ministre ont pris des résolutions qui sont restées sans suite, à commencer par la célèbre promesse de faire identifier le tombeau de Thomas Sankara hic et nunc. On peut concéder que dans l'euphorie des premiers jours de la transition, les dirigeants se laissent aller à des annonces visant à plaire au peuple, sans en mesurer les conséquences. Par contre, une fois le terrain tâté, la vitesse de croisière atteinte, les tâtonnements et les errements ne doivent plus avoir droit de cité. L'apprentissage ne durera pas une éternité face dans une transition limitée où il faut savoir prendre rapidement les bonnes décisions. Et comme s'il n'avait pas retenu les leçons de ses précédents déboires, le président Kafando s'est à nouveau laissé aller à de nouvelles diatribes. le voilà encore déclarant qu'un mandat d'arrêt sera lancé contre OBOUF ; n'est-ce pas encore u Cette fois, la cible des foudres présidentielles n'est autre que Obouf, l'homme aux canettes de boissons périmées. Un mandat sera lancé contre le présumé fraudeur. Tiens, vous avez dit mandat d'arrêt ? La même hypothèse avait effleuré l'esprit du Premier ministre Zida, concernant Blaise Compaoré. Mais depuis lors, beaucoup d'eaux ont coulé sous les ponts et les dirigeants ont mis de l'eau dans leur vin.

La nouvelle sortie du président sur un dossier méritant beaucoup de précautions a de quoi donc laisser circonspect. L'émission d'un mandat d'arrêt relève des prérogatives de la justice et il aurait été de bon ton de s'en remettre à cette instance. Il ne faut ni brûler les étapes, ni mettre la charrue avant les bœufs. La séparation des pouvoirs étant un principe de la démocratie, l'exécutif doit éviter de s'immiscer dans le fonctionnement de la justice. Un chef d'Etat prudent aurait dit par exemple : « La justice fera son travail et le gouvernement y veille ».

Il se ménage ainsi une porte de sortie tout en respectant les tâches dévolues à chaque institution. Parce qu'avant d'émettre un mandat, il y a toute une procédure à mettre en branle et cela est de la responsabilité de la justice. Dans un Etat de droit, cela ne souffre pas de discussion. Voilà pourquoi la refondation du système judiciaire est fondamentale. Une justice indépendante est la solution à bien des problèmes que vit le pays tels que l'incivisme, l'impunité, les règlements de compte extrajudiciaires, etc. Au lieu donc de se perdre en conjectures, la transition devrait travailler à créer les conditions d'une justice non inféodée à un quelconque pouvoir. C'est le vrai combat qui vaille, étant entendu que cela ouvrira la voie à un vrai Etat de droit.

Tout le reste n'est que perte de temps inutile avec en prime un pouvoir qui se ridiculise en permanence. Dans la lutte notamment contre les commerçants véreux, le rôle de la justice s'avère déterminant. Il lui faudra démanteler tous les réseaux en place avec la bienveillance de l'ancien régime. C'est un travail minutieux et long qui permettra de mettre de l'ordre dans les activités commerciales au Burkina. Avec l'affaire Obouf, on voit bien que la tâche est immense. Sans compter bien sûr les dossiers de crimes de sang dont les récents assassinats de jeunes lors de l'insurrection. Le gouvernement ferait donc mieux de donner à la Justice les moyens de travailler en toute tranquillité.

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