L'après-coup d’État : Transition, saison 2 : c’est reparti !

| 25.09.2015
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L'après-coup d’État : Transition, saison 2 : c’est reparti !
© DR / Autre Presse
L'après-coup d’État : Transition, saison 2 : c’est reparti !
Après des jours de peur, de colère et de révolte, vécus par les Burkinabè, suite au coup d’Etat perpétré par le Régiment de la sécurité présidentielle (RSP), la locomotive de la transition a été remise en marche, le mercredi 23 septembre 2015. Lors de cette cérémonie de réinstallation du président Kafando, le représentant des chefs d’Etat de la CEDEAO, ainsi que celui des Nations unies, ont invité les différentes parties prenantes à la transition à amorcer un indispensable dialogue national inclusif, afin de parvenir à des élections crédibles et acceptées de tous.


«Les peuples sont multiples, mais le peuple burkinabè est unique», a déclaré le maître de cérémonie, à l’installation du président Michel Kafando. En effet, par cet acte, la transition burkinabè reprend, là où elle avait été interrompue, il y une semaine. «Les évènements intervenus le 16 septembre dernier, ont interrompu de manière irrégulière, le processus de transition au Burkina», a expliqué le représentant spécial des Nations unies en Afrique de l’Ouest, Mohamed Ibn Chambas. C’est pourquoi cette tentative de prise du pouvoir par les moyens «inappropriés» a été rejetée par le monde tout entier. Pour lui, cette transition reprend son cours, à travers l’installation effective du président Kafando dans ses prérogatives légales et légitimes, en tant que chef de l’Etat du Burkina Faso et premier garant du bon fonctionnement des institutions de la transition burkinabè. Ibn Chambas a appelé les Burkinabè à l’unité qui va contribuer à l’apaisement de la situation actuelle et à l’amorce d’un indispensable dialogue national inclusif, afin que les fils et filles du pays puissent s’entretenir sur les différents sujets nationaux à régler, pour rétablir une société harmonieuse.

«Dimanche dernier, sous la base des consultations que nous avons menées, nous avions fait des propositions de sortie de crise que nous avons portés à votre attention», a rappelé le représentant des chefs d’Etat de la CEDEAO, Yayi Boni. Par ailleurs, il a souligné que lui et son homologue Macky Sall, n’avaient aucun mandat de décision, mais qu’ils étaient plutôt là, dans le cadre d’une mission d’information. Il a affirmé reconnaître que nul ne peut douter de la volonté affichée des Burkinabè, de résoudre par eux-mêmes leurs problèmes et donc, le rôle de la CEDEAO ne peut être que celui de soutenir et d’accompagner les efforts des Burkinabè.

«Le sommet extraordinaire a fermement condamné le coup de force et renouvelé son soutien total à la transition civile au Burkina», a soutenu Yayi Boni. Par conséquent, le sommet a demandé la restauration immédiate des autorités de la transition et le rétablissement du président de la transition dans ses fonctions.

Le dialogue inclusif et constructif sera déterminant

«Trouvez ici, à travers cette cérémonie, la reconnaissance de la CEDEAO et de la communauté internationale de votre statut de président de la transition du Burkina», a-t- il adressé au président du Faso.

A Abuja, les chefs d’Etat ont demandé au RSP de déposer les armes et aux FAN de veiller à l’unité de l’armée. «Je suis heureux que cet appel ait été entendu, car l’accord signé entre les loyalistes et le RSP en est la preuve», a-t-il poursuivi. Dans son allocution, le président béninois a prévenu les acteurs de la transition que le dialogue inclusif et constructif sera déterminant pour la suite du processus. C’est pourquoi le sommet a exhorté les parties prenantes à créer diligemment, les conditions nécessaires à la réconciliation nationale et la fraternité. «C’est par cela qu’il y aura des élections libres, transparentes démocratiques et acceptées de tous», a-t-il conclu.

«S’il y a une transition que beaucoup aimaient à citer en exemple, c’est bel et bien la nôtre», a déclaré Michel Kafando. Quelle ne fut donc pas la surprise des Burkinabè, ainsi que celle de la communauté internationale de voir ce coup d’arrêt porté à la transition. «A ce stade, je voudrais vous renouveler ma gratitude, à vous les chefs d’Etat, pour le soutien inestimable que vous avez apporté au gouvernement de la transition», a-t-il lancé à ses homologues. «Je puis vous assurer que nous restons déterminé à poursuivre cette exaltante mission que les Burkinabè nous ont confiée et qui est celle de mettre en place des institutions crédibles et fiables pour l’édification du Burkina nouveau que nous sommes décidé à bâtir dans la démocratie vraie et dans la justice», foi du président de la transition. Selon lui, la condamnation unanime de ce coup d’Etat conforte la certitude des différents organes de la transition qu’ils sont sur la bonne voie et que leur cause est juste. C’est pourquoi, «en dépit de l’endurance et de l’acharnement des forces du mal, nous relèverons le défi», a laissé entendre le président Kafando.

Aline Ariane BAMOUNI
Alexandre TRAORE
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Encadré 1

A l’issue de la cérémonie de ré-installation du président de la transition, Michel Kafando, le chef du gouvernement, Yacouba Isaac Zida, qui a été séquestré plusieurs jours durant par le RSP, s’est prêté aux questions des hommes des médias.

Dans quel état d’esprit étiez- vous, durant votre prise d’otage ?

J’ai vécu des journées pleines d’angoisses, des nuits blanches. Je m’inquiétais pour moi-même, mais surtout, parce que je savais pertinemment qu’en ville, il y avait des troubles qui pourraient très mal se passer. Voilà que je n’ai pas eu tort, car il y a eu des dizaines de morts et des dizaines de blessés et je m’incline devant la mémoire de ces disparus, je présente une fois de plus à ces familles, mes condoléances les plus attristées.

Le général Diendéré, vous l’avez bien connu, c’est un baroud d’honneur, il voulait aller jusqu’au bout. Quels étaient selon vous, son état d’esprit et celui de ses hommes que vous connaissez également ?

J’avoue que nous cherchons à comprendre encore véritablement ce qui s’est passé, parce que nous sommes surpris que notre pays, à quelques jours des élections, connaisse une situation de ce genre. C’est inhérent, c’est en l’homme, mais il y a certainement beaucoup d’autres facteurs que nous cherchons à comprendre.

Vous envisagez l’avenir du Burkina, avec ou sans le RSP ?

Je pense qu’au stade où nous en sommes, il est pratiquement inimaginable de conserver le RSP en l’état.

Qu’est-ce que vous pensez du calendrier des élections ?

Pour les élections, à mon avis, il va falloir faire des réaménagements techniques par un report de plusieurs semaines. Vous savez que la campagne présidentielle aurait dû commencer, malheureusement, du fait des évènements, elle n’a pas démarré. Nécessairement, il va falloir un petit aménagement.

Amnistie ou pas d’amnistie pour les putschistes ?

Je ne suis pas celui qui décide de tout cela. Ça sera décidé, plus tard.

Est-ce que vous vous attendiez à un coup d’Etat avec le RSP ?

Je savais que c’était possible, mais je ne m’y attendais pas vraiment à ce stade, surtout que nous avions pratiquement terminé la transition. Je pensais que définitivement, on allait aux élections sans problème.

Propos recueillis par A.A.B.
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Des candidats à la future présidentielle s’expriment

Zéphirin Diabré, président et candidat de l’UPC : «L’essentiel est de voir comment poursuivre le processus de transition»
«Toutes les parties prenantes apprécient ce qui a été fait, car on a pu éviter ce que tout le monde craignait, à savoir le bain de sang que pouvaient causer les affrontements. L’essentiel pour nous maintenant, est de voir comment poursuivre le processus de transition, de manière à ce que les élections puissent se dérouler normalement dans des conditions qui garantissent que les résultats soient acceptés par tout le monde. J’ai bien noté comme tous les autres acteurs que la CEDEAO nous invite à un dialogue politique, inclusif et national. Nous ne sommes pas contre cela, car nous sommes tous des Burkinabè et quand il y a un problème, il faut s’asseoir et discuter. Si la transition nous donne le format et la date d’organisation, nous serons présent pour défendre nos points de vue».

Saran Sérémé, présidente du PDC : «Le peuple burkinabè vient de montrer que ni les réseaux, ni les diktats de l’international ne passeront au Faso»
«Pour sa quête de démocratie et de liberté, et sa volonté à se battre pour sa patrie et un Etat de droit, le peuple burkinabè a su montrer au monde entier que ni les réseaux ni les diktats de l’international qui ne vont pas dans le sens de l’intérêt et des aspirations du peuple burkinabè ne passeront pas. Alors, nous voulons féliciter cette jeunesse, ces femmes et ces hommes qui ont su prendre leurs responsabilités, en disant non à ce coup d’Etat. Que ce soit un coup d’Etat constitutionnel ou militaire, le vaillant peuple restera toujours debout et démontrera que le terme «la patrie ou la mort, nous vaincrons» n’est pas qu’un slogan, mais une réalité».

Tahirou Barry, président et candidat du PAREN : «Accepter l’amnistie pour les militaires du RSP serait une grosse prime à l’impunité»
«En ce qui concerne l’inclusion, personne, aucun organe ne peut s’ériger en juge de la légalité interne d’un Etat. La Cour de justice de la CEDEAO s’est elle-même interdite à cela. La seule structure qui a cette prérogative est le Conseil constitutionnel (CC). Et le CC s’est prononcé. Doit-on prendre les armes et remettre en cause un verdict rendu par un organe compétent en la matière ? A propos de l’amnistie pour les militaires du RSP, l’accepter serait une grosse prime à l’impunité. Alors qu’on ne peut pas construire une grande nation sur les fondements de l’injustice et de l’impunité. L’amnistie, si elle doit intervenir, devrait l’être après vérité, après justice, après réparation. Et puis, elle ne doit pas être imposée».

Françoise Toé, candidate indépendante : «Aujourd’hui, le Burkina mérite d’être regardé et qualifié d’exemple»
«Le Burkina veut une vraie démocratie qui passe par des élections crédibles, libres et transparentes. Ce peuple a prouvé, par sa détermination, à ne pas se laisser voler sa victoire acquise, lors de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. Aujourd’hui, le Burkina mérite d’être regardé et qualifié d’exemple de la sous-région, voire de l’Afrique, par notre détermination à nous prendre en main et à réaliser notre démocratie par nos propres moyens. Je suis fière d’être Burkinabè, aujourd’hui».

Propos recueillis par A.T. et A.A.B.

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