Burkina Faso : A la veille des élections, quel bilan peut-on tirer de la gestion de la Transition ? (ANALYSE)

| 28.11.2015
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Burkina Faso : A la veille des élections, quel bilan peut-on tirer de la gestion de la Transition ? (ANALYSE)
© DR / Autre Presse
Burkina Faso : A la veille des élections, quel bilan peut-on tirer de la gestion de la Transition ? (ANALYSE)
Dimanche prochain, plus de 5 millions de Burkinabè sont appelés aux urnes pour élire leur Président, après la chute du régime de Blaise Compaoré par un soulèvement populaire en octobre 2014. Après 13 mois de gestion, quel héritage le gouvernement de transition va léger aux nouvelles autorités ?


"Un sentiment de devoir accompli au regard de (notre) feuille de route", résume le ministre en charge de la Communication, Frédéric Nikiéma, à 72 heures des élections présidentielles et législatives, sur le bilan du gouvernement dont il est le porte-parole depuis sa mise en place en novembre 2014.

La transition avait comme principale mission, selon la charte signée par les acteurs politiques et la société civile, l'organisation des élections libres, transparentes et démocratiques, le renforcement de la sécurité intérieure et la défense nationale, ainsi que la réforme de la justice.

Sur le plan sécuritaire, le gouvernement de transition dit avoir posé un certain nombre d'actions, à savoir le renforcement des capacités opérationnelles et organisationnelles des forces de sécurité et l'accroissement des effectifs et l'amélioration du maillage sécuritaire.

L'unité d'élites, considérée comme la garde prétorienne de l'ancien président Blaise Compaoré, qui a perpétré un coup d'Etat, le 16 septembre dernier, sera dissoute par les autorités de la Transition. Cette dissolution a consacré à un "retour à une armée nationale unie et républicaine", s'est réjoui le gouvernement sortant.

Dans le domaine de la justice, des Etats généraux de la justice ont été organisés, en fin mars 2015, aboutissant à la signature d'un Pacte national pour le Renouveau de la justice. Des dossiers pendant sous le règne de Compaoré, ont été ouverts.

Il s'agit, entre autres, de l'affaire Thomas Sankara, le père de la révolution burkinabè tué lors d'un coup d'Etat, qui a porté Compaoré au pouvoir en 1987, le dossier Norbert Zongo, journaliste d'investigation retrouvé mort calciné à quelques kilomètres de Ouagadougou, en compagnie de trois camarades d'infortune alors qu'il enquêtait sur une affaire incriminant le frère cadet de l'ex-président, François Compaoré, présentement en fuite.

Malgré une situation économique fragile, le gouvernement a initié un Programme socioéconomique d'urgence de la transition (PSUT) d'un coût global de 25 milliards de F CFA (environ 41 millions USD), pour calmer la grogne sociale qui commençaient à se faire entendre.

Ce programme, selon le ministère en charge de l'Emploi, met l'accent sur le soutien aux initiatives des jeunes et des femmes et le renforcement des infrastructures éducatives et sanitaires.

En avril dernier, le Conseil national de la transition (CNT, Parlement intérimaire), a voté une nouvelle loi électorale, excluant tous les proches de Compaoré qui l'ont soutenu dans son projet de modification de la Constitution qui s'est soldé par une crise sociopolitique.

Cette loi consacre l'apparition de candidatures indépendantes et la suppression des gadgets lors de la campagne électorale.

En campagne électorale, depuis le 8 novembre dernier, les quatorze candidats à la présidentielle et les 6.944 sont en lice pour les élections législatives, qui permettront d'avoir 127 députés, doivent boucler, ce vendredi à minuit, leurs opérations de conquête de l'électorat.

Ces consultations sont jugées cruciales pour l'avenir du Burkina Faso dont l'histoire est marquée par plusieurs coups d'état et le long règne de l'ancien président Blaise Compaoré (1987-2014), alors que le pays est classé parmi les plus pauvres du monde.

Selon les observateurs, les deux grands favoris qui se détachent des autres candidats, sont Rock Marc Christian Kaboré, ancien Premier ministre et Zéphirin Diabré, ancien ministre de l'Economie, tous des anciens proches de Blaise Compaoré. Vu la force de mobilisation sur le terrain, un second tour est possible entre ces deux candidats.

Pour des spécialistes, l'héritage légué par l'équipe de Michel Kafando aux futurs dirigeants reste "mitigé".

"Nous avons eu l'impression que le gouvernement de transition s'est démarqué de sa mission. Il a dispersé ses énergies en voulant s'attaquer à plusieurs dossiers (comme) une équipe issue des urnes", fait remarquer Moussa Ouédraogo, sociologue dans un projet à l'Ouest du pays.

Selon M. Ouédraogo, certaines décisions prises sous la transition risquent de constituer un obstacle à la bonne marche de la gestion du gouvernement à venir.

"Je pense notamment aux dossiers judiciaires ouverts (Thomas Sankara, Norbert Zongo), qui ont du mal à connaître un dénouement (...) tôt ou tard la population va réclamer des comptes sur ces dossiers et cela ne tardera pas", a-t-il dit.

Pour Georges Coulibaly, un jeune commerçant, la question sécuritaire a été "mal gérée", prenant pour preuve les menaces terroristes à travers des attaques de postes de gendarmerie et d'enlèvement d'étrangers sur le sol burkinabè.

"Ils ont supprimé le RSP (régiment de sécurité présidentiel, ndlr), alors que certains éléments sont en fuite. C'est un danger permanent pour les autorités à venir", s'est-il inquiété.

Pour l'heure, le département en charge de la Sécurité a multiplié les actions en annonçant les contrôles d'identité qui seront désormais organisés "de jour comme de nuit" par les forces de sécurité.

Il a aussi annoncé la fermeture des frontières du pays, le 29 novembre, le jour du double scrutin devant sanctionner la transition.

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