Que reproche-t-on à ces candidats dont on peut être certain qu’il y en aura qui seront déclarés inéligible sur la base de la loi électorale en vigueur au Burkina Faso? Tous sont accusés d’avoir encouragé ou soutenu le projet de modification de l’article 37 qui a conduit à l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. De façon pratique, les recours contre Ram Ouédraogo et Salvador Yaméogo se basent sur leur appartenance au conglomérat de partis formant le Front républicain qui a plaidé pour la tenue du referendum sur la question de l’article 67.
Djibrill Bassolé et Yacouba Ouédraogo, eux, appartiennent aux membres du dernier gouvernement de Blaise Compaoré ayant adopté le projet de loi portant révision de la loi limitant les mandats présidentiels.
Le dernier, Roch Marc Christian Kaboré, est accusé d’avoir été l’instigateur ou le concepteur du projet de révision de l’article 37.
Kassoum Kambou, le président du Conseil constitutionnel, et ses collègues ont été très bien servis. Sans présager de quoi que ce soit et en attendant que le conseil siège et tranche, certains candidats peuvent nourrir des craintes pour leur candidature; même si leur entourage estime disposer d’un mémoire en défense assez solide.
Dans la journée du dimanche, certains couraient toujours pour rassembler des pièces à conviction complémentaires: coupures de journaux, enregistrements audio ou audiovisuel,...
La grande curiosité de ces recours reste bien évidemment le cas de Roch, candidat du MPP. Pour avoir été un temps patron du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) et avoir déclaré le 6 février 2010, lors d’une conférence de presse dans le cadre des 14 ans du CDP, que «la limitation du mandat, dans son principe est antidémocratique» et qu’il va «contre le droit du citoyen à désigner qui il veut», le candidat du MPP est considéré comme ceux qui ont conçu le projet de révision de l’article 37. Les autres, dit-on, n’étant que des exécutants. On se rappelle que lors de cette conférence de presse, le Rocco disait en plus que l’alternance «est un combat entre partis pour la conquête du pouvoir politique» et que «c’est à l’opposition de faire son autocritique et éviter la courte échelle».
Alors, quel mémoire en défense pour le candidat du MPP? Il se trouve qu’après leurs déclarations foudroyantes de février 2010, de leurs actes de l’époque tendant à imposer une éventuelle modification de l’article 37, Roch et ses compagnons ont changé de discours en début 2014. Dans son discours de clôture de l’Assemblée générale constitutive le 25 janvier 2014, Roch disait que «l’élite burkinabè, tout comme les autres d’Afrique, porte sur elle la lourde responsabilité de n’avoir pas pu judicieusement capitaliser tous les savoirs et toutes les expériences, quand elle ne s’est pas purement et simplement compromise, incapable de construire un projet de société fondée sur une vision vertueuse au service exclusif de l’intérêt du citoyen». Il ajoutait entre autres que «nous devons nous affranchir de toutes les tares et erreurs du passé et nous mettre résolument au service de ces ambitions. Bien entendu et en toute objectivité, nous tenons à réaffirmer notre part de responsabilité individuelle et collective dans les insuffisances et dérives que nous dénonçons, tout comme nous sommes aussi comptables du bilan positif. Nous reconnaissons et assumons cette responsabilité et nous engageons à nous amender devant le peuple burkinabè».
Après donc avoir désavoué et quitté le CDP, Roch et ses camarades ont pris une part active au combat qui a abouti à la chute du régime Compaoré. La loi a-t-elle parlé de conception du projet de modification? L’un ou l’autre argument suffira-t-il à rendre éligible et inéligible le candidat du MPP comme le pensent certains? C’est au Conseil constitutionnel de trancher.
Wendpouiré Balboné