Interdiction des candidatures de « Blaisistes » et de militaires : Il ne faut pas se tromper de combat

| 17.03.2015
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Interdiction des candidatures de « Blaisistes » et de militaires : Il ne faut pas se tromper de combat
© DR / Autre Presse
Interdiction des candidatures de « Blaisistes » et de militaires : Il ne faut pas se tromper de combat
La revendication à la mode chez certains partis et associations burkinabè est de rendre inéligibles des caciques de l'ancien régime. Deux catégories de personnalités sont la cible des opposants à ces candidatures : des civils et des militaires. On peut comprendre la frustration des acteurs de l'insurrection de voir tout de suite revenir sur le devant de la scène d'anciens fossoyeurs de la démocratie. Mais de là à les priver de leurs droits civiques sans même que la loi ait statué sur leurs cas, ce serait un pas à ne pas franchir.


En effet, qu'ils soient civils ou militaires, les partisans du président déchu sont, jusqu'à preuve du contraire, des citoyens jouissant de tous leurs droits, dont ceux d'être éligibles et électeurs. Tant que ces droits civiques leur sont garantis, les candidatures des anciens dignitaires et des militaires doivent donc être autorisées. Cela participe d'une part de la volonté d'inclure tous les Burkinabè au processus électoral et politique, mais aussi d'éviter de créer d'autres frustrations susceptibles de provoquer une nouvelle crise. Laissons chacun tester sa popularité et le peuple tranchera. Depuis le départ de Blaise Compaoré, chacun se croit en effet capable d'assumer les plus hautes fonctions. On peut certes reprocher à ces anciens dignitaires d'avoir fait preuve de lâcheté en accompagnant Blaise Compaoré dans ses velléités de pouvoir à vie. Mais la page étant tournée, laissons-les montrer de quoi ils sont capables en l'absence de leur mentor qu'ils estimaient irremplaçable.

Le dernier mot doit appartenir au peuple à travers les urnes. Dans la page nouvelle qui va s'écrire, tous ceux qui ne sont pas frappés d'inéligibilité par la loi, doivent pouvoir se mettre dans les starting-blocks. Ce sera la meilleure façon de savoir ce que pense le peuple des électeurs de tous ceux qui aspirent à le gouverner. C'est vrai que dans le Burkina profond, les choix électoraux sont parfois biaisés par l'analphabétisme et la pauvreté. La preuve, Blaise Compaoré s'est toujours fait réélire avec des scores à la soviétique malgré tout son passif. Ces élections devront donc être un test de la maturité politique ou non des Burkinabè, surtout ceux des zones les plus reculées. Avec la nouvelle donne, il se peut que les citoyens votent en leur âme et conscience, sans pression d'aucune sorte, même s'il ne faut pas trop rêver. L'insurrection ne changera pas d'un coup de baguette magique les pratiques électorales au Burkina. L'achat des consciences tournera encore à plein régime. Tant qu'une loi très répressive sur cette question de la corruption électorale ne sera pas prise, il faut s'attendre à la pérennisation de cette notion de « bétail électoral ». Les vrais défis pour le Burkina post-insurrection, ce ne sont pas tant les candidatures des anciens dignitaires, que la mise en place d'une législation bannissant toute atteinte à l'éthique électorale.

Le vrai combat à mener par tous les démocrates sincères doit de ce fait porter entre autres sur l'instauration des candidatures indépendantes aux législatives et municipales, l'interdiction de toute forme d'achat de conscience des électeurs, le contrôle strict des dépenses de campagne, le renforcement de l'impartialité de l'Administration, le bannissement de tout usage des moyens de l'Etat, etc. C'est en bâtissant une loi électorale solide et sans complaisance, capable de démasquer et de punir les fraudes de toutes sortes, que l'on inscrit notre démocratie dans la durée.

Il ne viendra alors à l'esprit de personne, de tenter de tricher pour se faire élire. C'est pourquoi la controverse sur l'autorisation ou non de certaines candidatures n'a pas lieu d'être. Le problème se posera toujours à chaque élection. La meilleure garantie contre les imposteurs, c'est d'assurer l'égalité des chances à tous les candidats et de permettre un vote responsable de tous les électeurs, à travers des textes très stricts.

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